Jeremy Jay mesure 1.93m et possède de grandes mains.

Jeremy Jay mesure 1.93m et possède de grandes mains. Il a le regard Droppy, la peau blanche des pierres et la mèche de ses cheveux tombe mollement sur ses yeux mi-clos. Souvent Jeremy parle d’une voix à cheval entre la monotonie et l’excitation, peu convaincu lui-même. Comme si le simple fait de s’adresser à l’autre prenait soudain des allures de speech national. Ses épaules fondent dans le torse comme un glaçon sur le whisky, ses muscles atrophiés. Ses pieds ? Deux boulets de sauvetage taille 47. What else ?

Il n’en faudrait guère plus pour que je le soupçonne de relever de pisser assis. « Etre rock en 2009… », vous connaissez la suite. Et pourtant, contre toute attente, Slow Dance, son deuxième album en moins d’un an, est un disque de crooner, le disque des bals, la disco funky pour paraplégiques, un peu de chewing-gum sur tes Repetto blanches. Le disque des Richie Cunningham, le disque des Scritch, pour ceux nés après 1980. La musique porte-parole de ceux qui rentrent souvent seuls, perdus à ressasser les regrets de la jolie blonde impossible à lever. Not enough. Slow dance, album des loosers, perdition des solitaires, Sangatte de l’amour ? J’assure : Jeremy Jay est un perdant magnifique. Le leader des chiens crevés, chantre des SMS qu’on n’a pas su envoyer au bon moment et du larynx mal déployé.

Mais à l’inverse des concurrents, ceux qui tendent à transformer du pathos privé en discours promotionnel, le Californien use de ses dix doigts sur le manche pour ébranler l’auditeur. L’un des plus hauts faits d’arme du grand dadais, ce sont les synthés crades mixés à la guitares ; chaque titre est un hit (Gallop, Breaking the ice, In this lonely town), chaque note un regret. L’extrême inverse du rêve américain, ici décrit à travers l’histoire d’une gigue collée à sa chaise en disco night.

Jeremy Jay venge, une fois n’est pas coutume, tous ceux qui bégayent, peinent à serrer ou tardent à conclure. Froide, synthétique (Canter Canter), la neige tombe chez Jay plus vite que chez la concurrence. Slow Dance, un grand disque, vous en doutiez encore ? La basse est un antalgique, la douleur un prétexte, l’écho des voix, sur la platine, réveille le groove blanc des timides.

Raclement de gorge :
« Veux tu danser avec moi ? »

La fille déjà loin :
« Non merci, mon petit copain est là-bas »

Raclement du parquet :
« Ah ok, je retourne m’asseoir »

Les loosers de l’indie-rock approuvent et mettent 4 étoiles, la moindre des choses pour Jeremy Jay, cet (anti) héro qui a su cristalliser en 32 minutes l’échec de plusieurs générations à pratiquer autre chose que le cold coït.

Jeremy Jay // Slow dance // K Records (Differ-ant)

http://www.myspace.com/jeremyjay

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