Charisme, force et hyperactivité devraient être les maîtres mots du rock 2k9. Oubliez la pose et relevez la tête, feignasses ! Pour le geste, parce que c’est son époque et qu’il est stimulant de se dire qu’on peut foutre en l’air cinquante ans de bon goût moisissant en un seul disque qui vise l’avenir même en tapant à côté.
La première fois que j’ai écouté Mirror Mirror, j’attendais le tram. Sous la pluie et les néons, je battais du pied sur les pavés aussi humides qu’avait pu l’être dans sa jeunesse la petite vieille qui a glissé à quelques mètres de la station. Quand elle était encore capable de donner du plaisir. J’ai pas pu me retenir de rire intérieurement. Ca m’a fait penser à ce film que j’avais vu à quelques nuits de là, Ex Drummer. Une bombe flamande.
Y’a ce moment ou le héros décide de terminer en beauté une histoire déjà bien sordide, pour son plaisir. S’occuper de trois handicapés qui veulent gagner un concours de rock local, je comprends que ça donne envie de sang qui gicle.
Tellement malsain que ça en devient drôle. Pour cette scène, y’avait Ghinzu avec Blow, la chanson, en fond sonore.
«Every sign you’ve maaaaaade, to tell me who I aaaaaaaam». Bla bla bla. A part le panneau des horaires et le Quick en face, rien ne pouvait vraiment m’indiquer la réponse à cette question, qui j’étais, mais ça m’était égal, c’était Mirror Mirror que j’écoutais.
J’ai allumé la tige à nicotine, regardé s’envoler la fumée et laissé se consumer ma bonne haleine. A défaut d’être de bonne humeur, j’avais au moins encore ça pour moi. J’étais sûr que c’était mon époque, que j’étais en plein dedans. Et c’est pour ça que j’aime Mirror Mirror, en plus du fait que Ghinzu a repris les choses « là où ils les avaient laissées » selon la presse (Blow était effectivement très bon). Ce nouveau disque n’est en réalité ni bon, ni mauvais. Il est honnête. Est-ce que ça suffit ?
A part pour se rappeler qu’un jour on a eu mauvais goût et qu’on a aimé ça, les choses simplement honnêtes ne servent à rien. Du tout bon ou du mauvais, rien d’autre. ON/OFF mode d’emploi.
Le groupe tape à côté quand il s’embourbe dans des bidouillages et un éclectisme imposant qui lui font perdre en consistance, comme cette tentative de placer des chœurs malvenus (Dream Maker). Mais Ghinzu a quelque chose que beaucoup n’ont pas. John Stargasm. Voilà quelqu’un qui sait mener son affaire entre ses autres activités, hyperactivité. Capable de mettre un bon coup de balai sur un tas de références poussiéreuses. Pour aller jusqu’où il a envie d’aller et se donner les moyens d’y arriver, force et charisme. C’est en ça que Ghinzu fait partie de ces groupes intéressants. Parce qu’ils ont un leader et donc une vision, braquée sur l’avenir, au pire le présent. Qu’ils visualisent ce qu’ils font et font ce qu’ils veulent, balancent des images à coup d’accords plus ou moins virils. A une époque où beaucoup voient le salut dans le passé, ça a le mérite d’être salué.
Ghinzu avance, va vite et court comme un trader après les chiffres qui le font vibrer et se sentir vivant.
Arrêtons alors de nous cacher dans le col de notre trench lorsqu’on nous propose une alternative à la discothèque de papa qui n’existe plus qu’en digipack-petit-prix-réédition. Jetez une oreille sur ce disque, Mirror Mirror, un exemple parmi d’autres. Et regardez dans le rétro l’ancien temps tomber comme la petite vieille à l’arrêt du tram. De manière vaine, pathétique. En souriant un peu coupable mais en étant sûr d’une chose. Le moment de baisser définitivement la tête sous le poids du passé n’est pas encore venu. Certains disques agissent comme des ballons météorologiques accrochés à vos oreilles, même s’ils peuvent parfois se dégonfler rapidement.
Ghinzu // Mirror Mirror // PIAS