C’est dans la colère que l’on termine « Hyperion », le deuxième et forcément très attendu album du Lyonnais Gesaffelstein qui aura mis six ans à éclore (encore plus long que Justice).

Colère provoquée par la douleur d’une chute de quarante minutes au cours de laquelle rien n’a su nous retenir. Quelle impression de vide saisissante, quelle vertigineuse vacuité. Et ne venez pas nous dire que nous y mettons de la mauvaise volonté; « Gesa » était pour moi et pour beaucoup de gosses des années Social Club une sorte de pilier de marbre de la musique électronique, jalon massif d’une épopée musicale qui finit en soirée techno au Berghain. Déception donc au menu ce soir avec ce disque où il n’y a pas tant à dire; l’amertume aspirant toute verve comme un trou noir. Avec lui, on était habitué à la déprime, mais pas comme ça, pas sans saveur, pas sans l’efficacité inouïe du premier album, cette manière de faire sonner des chaînes en acier comme une caisse claire ou de créer une ambiance délicieusement inquiétante, presque macabre, à l’instar de ses modèles Dopplereffekt ou The Hacker.

Le secret du son de Gesaffelstein n’a d’ailleurs jamais été la violence d’une distorsion, mais le crapuleux élagage de tout ce qui n’apporte pas à la lourdeur du groove techno et à l’atmosphère suffocante. Une recette à laquelle on ne goutte malheureusement qu’une seule fois dans ce disque, sur le un peu gras du bide Reset, premier single dévoilé de la monumentale (littéralement) promo du disque, qui nous mettait malgré tout l’eau à la bouche avec son clip intelligent et anxiogène comme on l’aime. Mais ça c’était avant de découvrir qu’il était le meilleur titre d’un album comptabilisant une période de gestation de 72 mois. Une formule remaniée donc au profit, peut-être, du profit, d’une starification à un niveau mondial comme un certain Paul Kalkbrenner ; bref, comment ne pas comprendre que ce disque n’est pas pour ses premiers fans mais ses derniers, calibré pour le marché américain quand on lit simplement les noms des featurings : Pharrell comme un rituel de passage pop obligatoire, HAIM pour un titre tout bonnement inutile ou The Weeknd sans aucune surprise, plus mièvre que le hashtag #CoupleGoals sur Instagram.

Même cette signature chez Columbia, la maison de disque qui abrite au hasard Daft Punk, n’est évidemment pas anodine. Le message est très clair et ok, on l’accepte. On sait en 2019 qu’on passe pour un connard réactionnaire à s’opposer à l’inévitable désir de conquête d’un artiste qui possède un talent indéniable, une bonne idée ou un son à lui. Mais l’essai n’est pas transformé pour « Hyperion », ébloui par ses propres ambitions.

Gesaffelstein // Hyperion // Columbia

3 commentaires

  1. Arrêtez de faire genre, Gesaffelstein ça a toujours été de la merde…
    Et dire que vous osez la comparaison avec Dopplereffekt, c’est limite gênant.

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