Chercher et détruire. Courir sans raison et ne s’arrêter que pour tomber. Casser n’importe quoi. Le briser de ses mains nues, mais ne pas donner de sens à l’acte ou à la cible. L’objet redevenu matière. Ah la vache, qu’est ce qu’on a besoin d’un groupe comme Gay Witch Abortion !
Actu hyper-chaude, groupe emblématique sur le retour, participation d’untel en guest… plein de raisons parfaitement logiques et légitimes qui nous obligent à nous fader de ces disques. On se les envoie comme des cachets d’aspirines : one shot, no taste, et aucun souvenir après-coup. Il y a aussi les disques qu’on se remet dix fois pour essayer de savoir si au fond vraiment peut être est-ce que au final, on aime. Ou pas. Et c’est pareil avec les séries que vous détestez mais qui passent de « allez encore une minute » à « ah putain ils se sont bien foutu de nous » au générique de fin. Je ne vous la refais pas mais c’est le même air avec les équipes sportives décevantes, forcément décevantes, les partis militants, les infos tragiquement prometeuses, les activisites incapables de s’activer, les spécialistes de l’automobile, votre fournisseur d’accès, votre revendeur habituel, votre opticien conseil… Gay Witch Abortion aujourd’hui, c’est aussi indispensable qu’une guerre. C’est la RAZ. Format C:
Une nuit épaisse comme du rhum ambré et un concert de cigarettes m’avaient entrainé sur la brèche de Youtube avec un ami. Ce versant lynchien du monde où l’ont douterait de la réalité des faits s’ils n’étaient pas filmé. C’est cette nuit-là que m’est tombé, entre le tympan et l’enclume, ce Maverick. Rien que le nom ! Comme de s’assoir sur une ogive nucléaire. Pas besoin de chercher de l’autre côté de la sobriété, ce disque baignait dans une mare de kérosène et presser Play équivalait à abaisser un brandon rouge-orange. Wouf…
Attaquons à l’aube STOP.
Deux mômes de Minneapolis comme à la grande époque d’Hüsker Dü mais avec le son trompe d’éléphant congestionné de Flipper. Une guitare, une batterie; ça pourrait être Black Keys mais bordel ça ne l’est pas du tout. On passe du train de marchandise plein ras-la-gueule sur des rails en fonte à la crise d’hystérie bave aux lèvres et yeux injectés de bêtes avides en moins de temps qu’il n’en faut à la balle pour atteindre votre cerveau. En fait entre les futs de Shawn « Off the dead » Walker et le manche de Jesse « of spades » Bottemly, il y a un troisième larron : une pédale de distorsion qui a eu une liaison avec King Buzz Osborne. Pas de paroles, ou rarement, mais un défilé vert camouflage de pulling-off saturées qui prépare le terrain pour les chenilles des roulements de toms. Pas connu de meilleur batteur depuis Grohl sur Songs For The Deaf.
Introuvable en France j’ai dû harceler pendant trois mois Learning Curve Records pour me procurer ma dose. Résultat des vendanges de feu, dans le détail : Le premier album (Maverick donc, 2009) était un déchainement de violence merveilleux et tout sourire, sans aucune rébellion zappatiste, sandiniste ou anti-reagan cachée. On pourra s’en trouver des motifs à travers les titres abscons (notamment Group Think avec son sample de bergerie bêlante) mais ce sera peine perdue. Juste deux cons qui font joujou avec des armes atomiques. Le nom du groupe par exemple, d’aussi mauvais goût soit-il, a été volé à un disque de hardcore des Halo Of Flies, le groupe du fondateur d’Amphetamine Reptile records. Et bien voilà-t-il pas qu’un nouveau maxi est sorti en janvier dernier en collaboration avec le chanteur des H.O.F. en question en guest singer, et est intelligemment nommé Halo of flies sessions. Vous suivez ? Non ? C’est bien le but. D’ailleurs même la front cover est un pastiche confusant de l’album des H.O.F. Le résultat tombe souvent à hauteur de Scratch Acid (il y a d’ailleurs un Drinking with Yow qui en dit long là dessus) mais cela remplace quand même admirablement votre pause redbull-clope de 10h.
La déception n’existe pas chez qui prône l’anéantissement.
Ne nous éternisons pas sur un courant qui a tout fait pour faire toujours plus court. Je dis et j’affirme après 6 mois d’écoute que Gay Witch Abortion est une des meilleurs formation du moment. Et oui, le fait que 90% des canards n’en parleront jamais n’y est pas pour me déplaire. Concluons. Si écouter un groupe c’est l’inviter dans votre salon, autant vous prévenir que votre table basse désormais c’est la piste Hô Chi Minh. Je compte envoyer mon press kit de G.W.A. à Ban Ki-moon comme solution à ses troubles dans la bande de gazés; il faut trop de monde pour faire la paix, alors que deux nerds suffisent à déclencher une bonne guerre.
Gay Witch Abortion // Maverick // Learning Curve Records
Gay Witch Abortion // Halo Of Flies Sessions 10″ // Learning Curve Records