23 mars 2009

ELVIS PERKINS
In Dearland

Retiens la nuit. Le cou qui fléchit, la bouche ouverte et l’impression d’avoir la tête coincée dans l’étau du sommeil. Voilà en quelque sorte la tenue que j’avais en écoutant In Dearland d’Elvis Perkins la première fois.

Quand on est insomniaque, chercher à savoir quand a commencé sa nuit et quand celle-ci s’est terminée rélève de l’impossible. Alors disons que la mienne, même si je peux pas dire en avoir vraiment profité, a commencé ce soir là vers 23h30. Les autres étaient tous couchés, et j’avais l’impression d’avoir la maison à moi seul. Disons alors que c’est à partir du moment où l’on se sent seul, quil fait noir à travers la fenêtre, que la nuit commence. Evidemment, tu sais très bien que c’est ce que je pensais jusqu’au moment où…

Jusqu’au moment où j’ai lancé In Dearland. Elvis Perkins, je me souviens d’un jeune homme physiquement à mi chemin entre Françoise Hardy et John Lennon, l’air trop gentil pour être honnête.

Il a pas beaucoup changé, vu que la dernière photo que j’avais vu, c’était en 2007. 2007-2009, ça en fait des nuits blanches et des photos. Mais au final, ça fait pas énormément de disques toujours au dessus de la pile, juste à côté des nouveautés potentiellement capables de la rejoindre qu’on n’a pas encore écouté en priorité parce que pressé-ennuyé-rien à branler. Trouver ses pépites sans avoir jamais acheté de dictionnaire discothèque idéale et du bon goût grisonnant, on se rend vite compte en faisant l’inventaire que c’est pas difficile, mais long. Une affaire personnelle qui ne sortira jamais de la chambre de bonne et dont on ose pas trop parler, maniaque genre. Comme une nuit blanche, « mais putain qu’est-ce que tu fous quand tu dors pas encore à quatre heures du matin ? ».

Je fais des pompes entre le sommeil et le réveil au rythme des heures comme la respiration expire inspire en regardant vers l’avenir, puisque rien n’est jamais vraiment terrible. Suffit d’avoir les yeux bien ouverts et fixer le lointain, le moment de faire le bilan pour n’avoir envie de rien d’autre que contempler avec insolence la nuit qu’on possède jusqu’à ce que les chiens du voisin commencent à siffler et que le café sonne dans la cuisine. C’est ce moment d’attente qu’exprime In Dearland. Quand on sait qu’on a déjà raté, perdu beaucoup de choses mais que les trompettes sonneront une nouvelle journée qui enterrera la dernière. Ecouter In Dearland, c’est avoir ce sentiment d’apaisement, quitter la frustration de ne pas trouver le sommeil seul devant le cendrier qui se remplit en pensant à demain alors que le soleil s’est déjà pointé à travers le store IKEA.

In Dearland mérite d’être une perle parce qu’il change le cours de la nuit. Parce qu’il prend la main de celui qui l’écoute sans pour autant donner trop d’indications et l’emmène là où l’auditeur a envie de se rendre. C’est se rendre compte les yeux mi-clos avec nostalgie qu’une nuit passée avec son ex vaut plus que dix add sur Facebook et que sans vos parents, vous ne seriez pas en train de lire tout ça.

Elvis Perkins // In dearland // XXL (Beggars)

http://www.myspace.com/elvisperkins

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