PAN ! Vic, réveille-toi, c’est la révolution. Par-delà la Méditerranée, mais pas seulement. Tends l’oreille : c’est l’anarchie dans l’aciérie, on a rouvert les mines au personnel et plus personne ne semble avoir la mine. Plus loin, on dévale dans les plaines en bulldozer et des armées de moustachus défilent au pas comme d’autres impriment la cadence, perchés sur les machines. Voilà qu’on questionne le monde à nouveau, qu’on cherche un repère stratégique pour planter la tente. Chicago ou quelque zone industrielle, on ne sait plus vraiment tant le deuxième album de Disappears soulève de la fonte.

D’accord, j’étais sans doute un peu vulnérable. Une chiée d’albums mous comme une couche pleine m’avaient musicalement placé au service gériatrie de l’hôpital des névrosés. Bavant sur des galettes léthargiques, condamné en ce terne début d’année à se lustrer les vinyles pour éviter de penser qu’on n’a trouvé réconfort que dans le disque de Lia Ices et sa simple promesse de lendemains qui ventent. Plutôt logique puisque jusqu’ici, je confessais trois pêchés musicaux bien peu hétérosexuels : la blue-eyed soul la plus kitsch, les synthés qui chouinent sans décence, et – justement – les filles qui s’épilent le piano à la cire tiède. Puis les quatre rockers poilus de l’Illinois sont venus planter leur deuxième lame dans ma perfusion de Lexomil, envoyant valdinguer mon déambulateur et me rappelant au bon souvenir de la musique en bleu de travail : besogneuse et aliénante.

Alors pour l’occasion, on oubliera qu’il s’agit de s’enthousiasmer une énième fois sur du shoegaze qui s’enkraut, ou que parfois l’envie d’en découdre au fer à souder passe avant celle d’écrire des chansons. A ce titre, Revisiting, qui clôture l’album, déclenchera sans doute sarcasmes et ironie chez les plus pointus d’entre vous tant il est aisé d’imaginer les quatre chevelus en question ricaner en chœur à l’idée d’allonger sur quinze minutes une chanson si futile. Mais l’ambiance étant au déridage des écoutilles, je préfère y voir une psychotique partie de ping-pong pour contremaîtres zombies réglés comme la voisine avant sa ménopause. Ca saigne, ça cogne et ça repart, indéfiniment. Afflux sanguin jusqu’au bout des ongles, et cette balle qui rebondit sur les tempes : torture chinoise pour les encartés du Parti.

La conclusion, dispensable mais cohérente, d’un périple rythmé par le fracas et la combustion mécanique de l’acier. On est en février et pourtant on entend les journées de juin s’étendre jusqu’à Moscou en octobre.

Superstition, c’est l’appel bref et concis aux semblables opprimés par la tyrannie des plic et des plac autotunés. L’aurore se pointe sur cette guitare en fusion et l’on voudrait entendre cette voix à la radio officielle du régime. Not Romantic bat le pavé tant qu’il est chaud, la réverb’ soufflant sur les braises. Halo ouvre des brèches au lance-fuzz dans les murs des usines de boîtes à rythmes. Coup de pioche mental le plus puissant de 2011, Guider ne radine pas sur ses efforts pour électriser les masses. On peut même savourer la victoire du sang, de la suie et des armes sur New Fast, oasis de charbon dans un monde trop lounge.

Heureusement imparfait, Guider perd la clé des chiants et renvoie le train de la mine vers les sommets. Qu’importe le wagon, pourvu qu’on ait l’Everest.

Disappears // Guider // Kranky (Differ-ant)
http://www.myspace.com/disappearsmusic

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