16 août 2011. 20h. Warner, dans le 8e arrondissement de Paris. J’attends que le téléphone sonne. Bon, soit, au bout du fil je n’aurai pas Ben Gibbard, le songwriter de Death Cab. J’en fais le deuil – espérant pouvoir rattraper le coup plus tard en lui faisant parvenir quelques questions par mail, si ce n’est pas trop demander hein (ce que je ferai, sans réponse de sa part) – et je positive. Depuis San Diego, où le groupe fait escale dans le cadre de sa grande tournée nord-américaine, c’est le batteur Jason McGerr qu’on va me passer. En vingt minutes il devrait tout de même avoir deux ou trois choses intéressantes à me dire.

Jason est le troisième batteur du groupe depuis sa formation en 97 à Bellingham, près de Seattle, dans l’état de Washington (tout en haut à gauche), et la sortie en 98 de Something about airplanes (8,6/10 sur Pitchforkmedia). Il s’en est passé des choses, avant lui !.. Deux autres albums sont sortis, We have the facts and we’re voting yes et The photo album, ainsi que deux EP, The forbidden love et The stability. Mais Jason est arrivé au moment précis où Death Cab réalisait sa percée mainstream, et où je commençais enfin à entendre parler d’eux – c’était en 2003, par l’entremise de Give up, l’unique album de The Postal Service, l’adorable side project électro-pop de Ben Gibbard et Jimmy Tamborello (des groupes Dntel et Figurine). J’ai d’ailleurs mis des années avant de voir que The Postal Service avait un lien avec ce groupe d’indie rock que je ne connaissais alors que de nom. Et donc en 2003 avec Jason, Death Cab sortira son quatrième album. Celui du tournant. En un an Transatlanticism franchira la barre des 225 000 exemplaires vendus aux USA, sera repris en bande-son de films et de séries en vogue (The O.C., Six Feet Under, How I Met Your Mother, Californication…), et finira même classé parmi les 50 albums les plus importants de la décennie par le site npr.org.

Jason est contemporain du Death Cab que j’aime. Le Death Cab catchy et scratchy qui a quitté Barsuk pour signer chez Atlantic en 2004 et a alors cassé la baraque avec Plans, – enfilade de pop-songs brise-cœurs vendue à plus de 823 000 exemplaires aux Etats-Unis – et Narrow Stairs. Le Death Cab entriste qui a atteint les charts US et UK, casé une version live de Photobooth sur la pub d’un jeu Xbox 360 (Project Gotham Racing 3), a signé le titre phare de la BO de Twilight 2 (Meet Me On The Equinoxe). Le Death Cab qui continue de taquiner la marge en sortant des EP (Studio X Sessions, The John Byrd, The Open Door), sollicitant des cinéastes (onze courts-métrages inspirés des chansons Plans sortirent en DVD sous le nom de Directions), batifolant ailleurs (avec Steve Fisk, Ben a composé la BO d’About a Son, docu-fiction sur Kurt Cobain). Le Death Cab qui avance soudé comme une belle bande de potes et vous emmerde gentiment si vous êtes trop naze pour n’y voir que des Coldplay amerloques, alors qu’ils ont encore un petit côté college-rock d’ados ludico-geek mal dégrossis à la Weezer (le nom du groupe vient d’ailleurs d’une chanson satirique du groupe Bonzo Dog Doo-Dah Band, chanson jouée dans le film des Beatles, The Magical Mystery Tour, durant une scène de strip-tease. Isn’t it geek ?). J’ai un gros capital sympathie pour ce groupe-là, même si – ou parce que – parfois ça m’a joué des tours. Capital renouvelé et enrichi depuis le 31 mai dernier par la sortie (mondiale, la sortie) de leur nouvel album, Codes And Keys. Un album ensoleillé par l’amour (marital, l’amour) de son leader pour l’actrice Zooey Deschanel, également connue comme chanteuse du duo folk She & Him qu’elle forme avec Matt Ward. Bref, sans Ben au bout du fil, l’interview (exclusive, l’interview) perd de son impact émotionnel, parce que je voulais lui parler d’amour (factice, l’amour), mais tout n’est peut-être pas perdu.

Bonjour Jason. Death Cab For Cutie tourne actuellement aux USA dans le cadre de la sortie de votre nouvel album. Là, vous alignez vingt-et-unes dates entre le 27 juillet et le 23 août. Ces grandes tournées vous fatiguent-elles ?

Non, on a déjà fait des tournées de huit semaines. Il y a quatre ans on a même enchaîné vingt-sept jours d’affilés. C’est donc comme ça qu’on travaille et voilà, à force, c’est comme tout, on est rodé, on sait faire. Mais ça faisait un moment qu’on n’avait pas tourné autant. Ce disque nous remet dedans.

Oui, le moins qu’on puisse dire c’est que Codes and Keys vous fait voir du pays. Vous avez déjà fait treize dates en Amérique du Nord, neuf en Europe, et il vous en reste encore vingt-quatre à faire d’ici à fin novembre. Mais dans tout ça, pas de concert en France ; comment est-ce possible ?

Ah, je me doutais bien que cette question me tomberait sur le coin de la gueule. On ne pourra pas venir avant l’automne prochain. Normalement nos albums sortent entre fin août et début octobre. A cette période on aurait donc déjà donc dû être allé deux, trois fois en Europe, mais comme la sortie de Code and Keys a été reportée fin mai pour des problèmes de planning, et que notre tournée est entrecoupée par les vacances d’été et la pause du milieu de l’hiver où chacun retrouve sa famille, tout est décalé. Désolé.

Ces concerts ressemblent-ils à ce qu’on peut voir dans le clip de You are a tourist, premier single extrait du disque, où vous interprétez le morceau dans une ambiance de plateau télé fastueuse, avec danseuses emplumées, ballons, guirlandes et light shows à gogo ?

Non, on n’a pas ces light shows ni les costumes noirs incrustés de diodes électroluminescentes. J’aimerais bien ! J’ai toujours le mien d’ailleurs, chez moi. On a de belles lumières à nos concerts – si tu regardes certaines vidéos sur YouTube tu verras même que derrière nous on a parfois des écrans qui envoient une lumière tour à tour verte, rose, jaune, orange – mais ce n’est pas celles du clip. C’est une grosse production. On n’a pas les moyens de transporter tout ça en tournée.

J’ai entendu dire que pour l’enregistrement de ce septième album vous vous seriez inspirés des travaux de Brian Eno. Est-ce vrai ? Si oui, de quels travaux ?

D’entre nous, Chris est probablement celui qui est le plus fan de Brian Eno, même s’il ne suit plus trop ce qu’il fait. Et il y a une constante dans l’approche musicale de Brian Eno : c’est qu’il ne construit pas forcément un morceau sur les instruments traditionnels que sont la guitare, la basse et la batterie. Il a plutôt tendance à construire le morceau sur ses éléments atmosphériques, à l’aide de claviers, et de n’utiliser qu’ensuite guitare, basse et batterie comme des textures pour colorer le morceau. Ca rend les choses moins ordinaires, tout en produisant toujours des vraies chansons, fortes, et c’est ce qu’on a essayé de faire sur ce disque. Mon pied de batterie marquait souvent le début de l’enregistrement d’un morceau, derrière on ajoutait des claviers pour ouvrir l’espace musical, puis la guitare, la basse. Tu entendais tout ça se mettre petit à petit en place, et ce n’est qu’après que le chant démarrait. Une fois le paysage sonore installé.

Ce n’est pas la première fois que vous mettez les claviers au cœur du processus de création d’un disque au détriment des guitares, c’était déjà le cas sur le célèbre Plans, sorti en 2005…

Oui, ces deux albums ont mis la guitare en sourdine, mais Plans était basé sur des schémas pop traditionnels et utilisait des pianos organiques, alors que Codes and Keys utilise des synthés aux textures qui traduisent des vues plus aériennes et oniriques typés années 70, voire 80. C’est toujours étonnant de voir comment fonctionnent les choses. Nos albums se font sans cesse en réaction les uns par rapport aux autres. Par exemple Transatlanticism comportait pas mal de grosses grattes, c’est pour ça que Plans était plus orientés claviers et qu’à son tour Narrow Stairs s’est distingué par un certain retour aux guitares. Et voilà, en réaction à cette alchimie organique guitare-basse-batterie qui se passe quand quatre gars jouent live dans une même pièce, Codes and Keys nous a fait passer pas mal de temps en studio, à gamberger sur les machines, développer du son.

Combien de temps avez-vous passé en studio ?

Beaucoup de temps. On a commencé par enregistrer une cassette. Cette période d’écriture a duré entre 2008 et milieu 2010. Au bout du compte on avait plusieurs chansons, dont une qu’on avait laissée à l’état de démo en 2002. L’enregistrement du disque a pu alors commencer en juin 2010. Je crois qu’on est allé dans 6 ou 7 studios différents, histoire d’éviter les tentatives de piratage. On faisait des sessions de deux semaines et on prenait deux semaines de repos, etc. On a fait ça pendant près de 7 mois, et puis il y a eu le mixage durant février-mars. Ce disque a donc nécessité 10 mois de studio. Un record pour nous. Et de loin. C’est deux à trois fois plus long que d’habitude.

Vous n’avez jamais pensé à solliciter Brian Eno lui-même pour produire ce disque ?

Non, parce que c’est toujours Chris qui produit nos disques, et je pense qu’à l’époque Brian Eno était très occupé avec Coldplay [Mylo Xyloto, qui sort le 24 octobre prochain, sera une nouvelle fois produit par Eno, comme Viva la Vida et X&Y – NdA]. Mais oui, un jour ce serait bien qu’on bosse avec lui ou avec Daniel Lanois [découvert par Eno au début des années 80, ce songwriter québécois de 60 ans a produit des artistes d’obédience plutôt pop-soul-folk comme Bob Dylan, les Neville Brothers, Ron Sexsmith, Emmylou Harris, U2, Brandon Flowers, Neil Young, etc. – NdA]. On est assez fan des albums qu’ils ont fait ensemble. Mais depuis sept albums et quatre EP, on aime et on réussit tellement à bosser tous les quatre, avec Chris à la prod, qu’on veut continuer dans ce sens.

Préférer être produit par l’un d’entre vous, plutôt que par une pointure de la production connue des majors comme Eno, est-il un moyen de défendre votre indépendance artistique ?

Non, pas vraiment. A ce stade de l’aventure on aurait très bien pu tenter ce genre d’expérience, qui n’aurait pas pu être envisageable il y a cinq ans de ça. On pourrait travailler avec qui on veut. Si le gars respecte le groupe, pour nous ça ne pose pas de problème. D’ailleurs c’est un peu ce qu’on a fait au niveau du mix, car on a fait appel à Alan Moulder et, vu les artistes pour qui il a déjà travaillé, il n’y a pas plus gros que lui pour ce qui est du mix [en effet, ce producteur anglais de 52 ans qui a débuté dans les années 80 comme assistant de Jean-Michel Jarre puis de Flood sur les Jesus and Mary Chain a ensuite produit Ride, My Bloody Valentine, les Smashing Pumpkins, Nine Inch Nails, Marylyn Manson, les Cure, les Killers, Blonde Redhead, Placebo, Interpol, etc. – nda]. Et il était plus qu’heureux de travailler avec nous, il était excité.

Alan Moulder est fan de Death Cab For Cutie ?

Oui, et je pense qu’il est d’autant plus fan depuis qu’il a mixé notre disque. Mais voilà, à part ça on n’a pas fait appel à un gros producteur car comme je te le disais tout à l’heure on aime bien travailler tous les quatre, et je pense qu’on reste un groupe de rock indépendant au sens où on fait la musique qu’on veut, même si on n’est plus quatre gars signés sur un label indépendant.

Ok, pour le dire autrement : craignez-vous de vous Coldplayiser en agissant de la sorte ?

En travaillant avec un gros producteur ? Non, je ne pense pas qu’on ait peur de ça parce que j’ai confiance en mon jeu de batterie, de la même manière que Chris a confiance en ses productions et que Ben a confiance en son songwriting.

Contrairement à Coldplay, vous n’avez donc pas besoin de Brian “ Super Nanny ” Eno ?

Non, on n’a pas besoin de nounou. Mais qui sait, si l’année prochaine un nouvel album débarque avec une production qui nous en met plein la tête, on aura peut-être envie d’aller chercher le super freak du son qui se cache derrière pour qu’il travaille avec nous. On continue à vouloir nous améliorer, explorer, ne pas refaire ce qu’on a déjà fait. Je veux dire, par exemple on est tous fan de ce que Nigel Godrich a fait avec Radiohead et Beck. C’est peut-être quelqu’un avec qui on aimerait prochainement travailler.

Ce n’est qu’un souhait, ou tu me laisses entendre quelque chose qui va vraiment arriver ?

Ce n’est qu’un souhait car d’une je ne me verrais pas faire ce genre de grandes déclarations à la presse au nom du groupe tout entier, ça me paraîtrait bizarre, et de deux quand on dit aux médias qu’on aimerait travailler avec untel ou untel en général ce qui arrive c’est qu’au moment de faire le disque rien de tout ça ne se fait, et on se remet à bosser juste tous les quatre en nous disant : “ Pourquoi ne pas faire ça entre nous ? ”. La fois où on s’est le plus ouvert à un collaborateur extérieur, c’était durant l’élaboration de l’album Narrow Stairs. Chris a appelé un ami à lui, Beau Sorenson, pour l’assister en tant qu’ingé-son.

Tu évoquais Nigel Godrich. Radiohead est-il un groupe à part pour Death Cab For Cutie ?

Je trouve que ce groupe est fascinant car il pose la question de savoir comment on peut prendre autant de virages si rapidement pour réorienter sa trajectoire et pour rester maître de son parcours. Tu ne peux pas tracer de ligne droite entre Creep et Paranoid Android ni même entre The National Anthem et… quel est le nom de leur dernier single au fait ?

Lotus Flower.

Voilà. Comment tracer une ligne droite entre tout ça ? Entre Pablo Honey et The King of Limbs ? C’est comme les Beatles : tu ne peux pas. Je pense les gars de Radiohead sont avant tout des artistes du spectre musical. Ils ont évolué comme les Beatles. Et ce sont mes songwriters rock anglo-saxons préférés. Ce qui est hallucinant dans l’histoire de Nigel Godrich et de Radiohead, c’est qu’au départ Godrich n’était que l’assistant de leur producteur, mais ils se sont tellement bien entendus qu’il a pu aller plus loin avec eux et devenir ce qu’il est. [En 1994, Nigel Godrich assistait John Leckie dans la production de The Bends, deuxième album de Radiohead, et un jour, le remplaçant ponctuellement alors qu’il était allé à un mariage, il s’est attelé à ce qui ne devait être qu’une face B, Blackstar, mais le résultat a tellement plu au groupe que le morceau a fini sur le disque et qu’il a produit l’intégralité du My Iron Lung EP sorti en amont de The Bends – NdA]. La pop compte quelques histoires de ce genre. Par exemple à leurs débuts les Beatles ne savaient pas se servir de l’équipement de studio, mais grâce à l’aide du producteur George Martin ils ont ensuite tenté des sons bizarres, et c’est ce qui fait qu’ils sont encore célèbres aujourd’hui. Je pense que c’est ça qu’on aime le plus : explorer le son qu’on peut sortir, mais par nous-même, comme quand Jimmy Page produit Led Zeppelin.

Tout à l’heure j’évoquais Coldplay. Vous sentez-vous plus proches d’eux ou de Radiohead ?

Hum, je ne sais pas. Je veux dire, Coldplay est vraiment un grand groupe, ils passent presque partout. Je crois qu’on est là depuis plus longtemps qu’eux, non ? On est là depuis presque quatorze ans. (Silence.) Je pense que leur musique est pop. Et la nôtre un peu plus déviante.


Tu veux dire qu’elle dévie gentiment des schémas de la pop de stade, comme le fait Elbow ?

J’aime Elbow, Elbow c’est bien, mais je dirais qu’on est encore plus déviants qu’eux au sens où on montre les choses sous un angle un peu plus sombre et rugueux. Je dirais que pour moi Elbow est le groupe qui se situe pile entre Radiohead et Coldplay, en termes de propos et d’ambiance. Mais c’est vrai qu’Elbow a une belle carrière. Lorsqu’ils ont gagné le Mercury Prize [en 2008 pour The Seldom Seen Kid – NdA] c’était mérité. Les gens voyaient enfin que ces gars faisaient de belles choses depuis un bon bout de temps, se réinventant sans cesse sans se soucier des modes. J’aurais plus de mal à te dire quel genre de groupe on est. C’est comme si toi et moi on se tenait dos à dos face à un miroir et que je te demandais : “ Décris-toi à moi ”. C’est bizarre. Comme de s’asseoir pour écrire soi-même sa biographie.

Oui, ce n’est pas facile, ça peut même être une expérience quelque peu “ schizophrénique ”. A propos d’écriture, parlons de vos textes. Tu dis que votre musique est plus “ sombre ” et “ rugueuse ” que celles d’Elbow et de Coldplay, mais les textes de Ben sont souvent centrés sur l’amour. En cela vous m’avez l’air plus proches du sentimentalisme de ces derniers que du scepticisme de Radiohead. Qui plus est sur Codes and Keys, où la joie semble de mise…

Oui, je vois ce que tu veux dire, même si je ne suis pas sûr de savoir de quoi parlent les chansons de Thom Yorke. Je suis tellement sur la musique que je ne fais pas vraiment attention aux textes. Il y a évidemment des chansons qui m’ont déjà touché pour leurs textes, mais à la limite pour moi la qualité des paroles importe peu, au sens où elle ne sauve rien. Si la musique craint, tout craint. [Le manager intervient et me somme mécaniquement de poser ma dernière question – NdA].

Votre musique est parfois qualifiée d’ “emo rock”. Qu’est-ce que cela t’inspire ?

Je n’ai jamais vu un article employer cette expression pour décrire notre musique.

En tous cas, en France ça arrive. Il y a quelques jours je parlais de vous à une fille qui vous écoute, et elle m’a dit que pour elle Death Cab c’était de l’emo…

Catégoriser la musique peut aider certaines personnes à acheter un disque quelle que soit l’étiquette que tu lui colles, appelle donc ça comme tu veux. C’est sûr qu’il y a des groupes qui rentrent plus dans des cases que d’autres, mais il y aussi des groupes qui brouillent les pistes. Par exemple, comment peux-tu catégoriser un groupe comme Of Montréal ? Tu ne peux pas. C’est trop barré. Alors je ne sais pas. Si “ emo ” signifie émotionnel, comment décrirais-tu la musique shoegaze ?

Je pourrais effectivement dire qu’elle est, entre autres choses, émotionnelle.

Elle l’est. Le shoegaze n’est qu’un genre de musique émotionnelle. Et qu’est-ce que la musique, si ce n’est de l’émotion ?

Death Cab For Cutie // Codes and Keys // Warner

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