Défoncer un disque en quelques lignes, c’est drôle et ça fait souvent rire les cyniques que nous sommes devenus. Mais défendre un groupe dont on ne soupçonnait pas l’existence il y a encore quelques jours, c’est une autre paire de manches.
Avec Promise, aucun regret. « Well done, Simone », comme disait Montand. Ceux qui aiment McCartney, (celui des débuts en solo, de Ram, etc.) ou les La’s de Lee Mavers vont adorer ce disque. Enfin une nouveauté qui claque, un groupe au look 80’s, une pochette sobre et ultra-classe, du songwriting à la pelle, et des mélodies en béton armé. On tient un album qui contient d’immenses morceaux (Guitar, Main street lanes ou encore Captain Domino) et quelques sauces Beatlesiennes de qualité (Say Allright ou Later on tonite, classiques mais ultra efficaces) agrémentées d’un ou deux ratages en règle permettant de rehausser l’ensemble. Petit bémol à l’histoire : ce disque est déjà sorti dans une vie antérieure. C’était en 1980. Réédité aujourd’hui par Got Kinda Lost Records, le disque est l’oeuvre d’un groupe oublié de tous, modulo quelques fans hardcores et monomaniaques de powerpop. Merde, ce truc serait donc un album de Powerpop ?
Alors disons tout de même que Promise va bien au-delà d’un genre qui pourrait vite indisposer ceux qui ne goûtent pas ce genre avec fanatisme. Un genre parfois synonyme d’étouffe-chrétien sur la longueur, l’écoute consécutive d’une quinzaine de titres powerpop pouvant rapidement engendrer une grosse indigestion de mélodies trop sucrées et de riffs over acidulés. Grand bien nous en fasse, en 10 titres, Promise fait exactement l’inverse : une exception labellisée 100 % sans matière grasse. Un album inusable car hors du temps.
Si l’étiquetage de l’objet peut donc se discuter en magasin, le rayon influences est lui clairement fléché : Paul McCartney, Paul McCartney et encore Paul McCartney. Celui des premières années solo. Je ne sais d’ailleurs pas si Paulo nu-pieds est mort ou non pendant l’enregistrement d' »Abbey Road », mais une chose est certaine : s’il est à ce moment là passé par la case chirurgie esthétique pour regagner les joies de l’anonymat, je ne serai pas étonné d’apprendre qu’il se soit transformé en Curt Mangan ou Danny Mey, les deux leaders de Promise.
Pochette noire, nom du groupe en blanc : indémodable. Sobriété, efficacité. Ce n’est pas Hedi Slimane qui nous contredira. Sur scène par contre, c’est une autre histoire. Chaque membre du groupe porte le même uniforme : chemise unie à manches courtes et pantalon de la même couleur. Tolérable ? Non, puisque le tout est en satin. Ouais, ouais, en satin. Mais qui leur a soufflé cette idée grandiose synonyme de ringard, de kitsch, de foutage de gueule assuré ?
Tout avait pourtant bien démarré, puisque Curt est né six ans après la fin de la deuxième guerre mondiale, et qu’à la maison, papa lui passe des disques d’Hank Williams, d’Ernests Tubbs ou de Chuck Berry. Pendant ce temps, maman, en bonne joueuse joueuse professionnelle de piano, aiguise l’oreille du petit. Le show Curt va pouvoir commencer. A 10 ans, il se met en dilettante à la gratte, influencé par Chet Atkins ou encore Roy Rogers, une étoile montante du petit écran de l’époque. Pas de bol, deux ans plus tard, on lui diagnostique une maladie grave qui devrait mettre fin à sa croissance. Pas démonté, le gamin se lance alors comme un dingue sur sa gratte, devenu un exutoire salvateur. Le voilà petit avec des pieds immenses. Pratique pour qui voudrait tenir le rôle d’une équerre dans une pièce de théâtre avant-gardiste, mais pas vraiment l’idéal pour emballer les meufs du coin. A 14 ans, bien avant les improbables She and Him, en même temps que Them et The Who, il monte The Us avec son pote Gary, qui sera quelques temps plus tard de la partie Promise. Bref, tout est normal au pays des (pro)noms. Pendant une année, il joue du Beatles (beaucoup), ou du Paul Revere and The Raiders (un peu). Son avenir est plein de promesses.
Quelques années plus tard, la roue tourne. En sortant cet album à 1000 exemplaires pressés pour leur propre label Cumulus, le quatuor mouille le maillot. Un maillot bourré de promesse qui ne saurait souffrir des lendemains nuageux. Nous sommes en 1980 et la décennie reste à inventer. Pas gagné avec Cumulus, leur propre label. Pourquoi Cumulus ? Parce que ça sonne bien, et qu’ils pensent que les acheteurs potentiels le confonderont avec le célèbre label Columbia. Apparemment, leur stratégie de domination du monde n’a pas si bien marché que ça. Et les quatre fantastiques ne décolleront pas.
Peu importe, il nous reste Promise (l’album), le genre de bonne surprise pas si fréquente. Promise, un groupe passé en-dessous du radar de ceux qui étaient alors les seuls gardiens du temple de l’époque pré-internet : les chroniqueurs rock. A l’époque pas de liens Soundcloud, de Bandcamp ou de viralité informatique, mais tout un tas d’autres emmerdements qu’on vous épargnera pour cette fois.
3 commentaires
Rassure moi Albert, ce groupe c’est le Spinal Tap de Liverpool right ? Ca me fait penser à l’histoire d’Anvil en plus pileux sur la grosse lèvre. Et cette pochette mon Dieu ! Même Amadou et Mariam auraient fait moins pire !
C’est tout le problème : faut écouter les disques à l’aveugle, mon cher Bester. Et ensuite ouvrir les yeux. Il y a quelques années on était assez nombreux à s’extasier sur le « Deface the Music » d’Utopia (le groupe de Todd Rundgren) sorti la même année que ce Promise. A mon humble avis, on s’est trompé de vainqueur à l’époque. Ps : j’ai un doute sur la pochette. Comic sans MS ou Arial 16?
Ce qui me semble flagrant pour ce disque, c’est que quand t’essaies de faire coller leur photo à leur musique, tu te dis qu’il y a un truc dans la musique indépendante US des late 70’s que t’as dû louper.