Comme son dernier EP en date s’intitulait « Shock Pop Vol. I », rien d’étonnant que nous retrouvions cette année l’artiste danois Chopper, qui aurait certainement rêvé de confronter sa musique à la faune sous ecsta de l’Haçienda, pour un « Shock Pop Vol. II » encore plus ébouriffant. 

Dans un lointain royaume de l’Europe septentrionale, contrée où jadis une communauté de marginaux politisés, freaks errants et autres indigents bohèmes ont fondé leur propre cité autogérée au sein même de la capitale royale, se terre une créature ténébreuse qui se fait appeler Chopper. Briscard de la scène rock du Copenhague du nouveau millénaire, les affres de la pandémie ont fait muter Jonatan K. Magnussen en un spectre tourmenté, d’un romantisme burlesque, compositeur d’une bande-son à l’univers post-apocalyptique. 

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Avec ce nouveau volet de l’autoproclamé shock pop, réponse à l’eurodance scandinave, Chopper poursuit sa croisière autour des influences raves, madchester, glam et gothiques qui esquissent son esthétique aussi tonitruante que d’une sensualité vaniteuse. Alors que ses nouveaux morceaux restent globalement dans la même veine que les précédents, l’auteur-compositeur fantasque a néanmoins réfléchi à une logique spécifique dans sa démarche de sortir deux EPs plutôt qu’un album avec l’intégralité des chansons.

« Les deux EPs représentent différentes facettes de Chopper. La première étant le côté plus grand que nature et légèrement maniaque et, la seconde, celui plus introverti et peut-être plus sombre », m’a-t-il confié. « J’aime beaucoup réaliser des vidéos musicales, donc c’était aussi un peu une excuse pour le faire en sortant plus de singles sur une période plus longue », dit-il alors.
Et en effet, Jonatan K. Magnussen donne subtilement corps à son alter ego à travers des clips à l’esthétique plutôt cinématographique. «
J’ai toujours voulu faire des films, mais je suis devenu musicien à la place. Je suis ainsi très heureux d’avoir inventé Chopper car, lui et moi, nous nous ressemblons beaucoup, et nous aimons mélanger les médias, poser devant les caméras et créer de petits mondes bizarres et magiques. » 

Copendingue Rave On !

D’entrée de jeu sur « Shock Pop Vol. 2 », le ton semble lancé avec Living for the Night à l’intro qui pourrait à s’y méprendre être un sample des Happy Mondays. Magnussen ne verse cependant ni dans le tribute ni dans le revival pour ce morceau qui a contribué à le populariser davantage sur sa scène nationale. La chanson évolue progressivement vers les schémas rythmiques et motifs mélodiques qu’on lui connaît, sur lesquels cette voix qui oscille entre lascivité plaintive et candeur vient animer tout un univers baroque qu’il s’est construit. Pour son clip, Chopper joue le traîne-savate en recherche de sensations, miné par le désespoir et l’aliénation nocturne des grands espaces urbains, nu dans son bain lorsqu’il ne galère pas en ville ou en pleine psychose dans une automobile.

 

S’ensuit Secret Side qui s’ouvre avec ses pulsations électroniques entre indus et rave. Le Danois s’y emploie cette fois à chanter de sa voix la plus angoissante comme sortie des ténèbres ou souffrant d’une angine en rémission, parfois suppléé par Vamilla, artiste concitoyenne – qui l’accompagne également sur la chanson suivante –, avant de conclure avec une trentaine de secondes de nappes ambient. Ses partenaires semblent cependant moins démonstratives sur ce volume 2 que ne l’était Glitchi (qui joue ici la trompette de Moongirl) sur Sugar and Spice du volume 1. Elles sont pourtant bien présentes à l’instar de Josephine, « qui fait aussi partie du Chopper live gang et chante sur presque tous les morceaux » ou Marie Nyhus sur Moongirl.

 À la chanson suivante, Magnussen renoue avec le glam rock de ses débuts pour un Cope dont la mélodie vocale semble invoquer le David Bowie de Space Oddity, puis Ziggy Stardust juste avant de s’envoler pour le dernier tiers du morceau dans une sorte de hard tech associée aux sonorités noise no wave avec Marie Nyhus au sax.

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Sur Wet Hot Summer, il ne renie pas son héritage eurodance mais s’applique à l’assombrir autant qu’il ne le tourne en dérision. « Il est très rare que je ne sois pas inspiré par ce que j’écoute, que ce soit Alizée [avec qui il rêverait de chanter en duo] ou Alice Cooper », m’a-t-il répondu lorsque je lui ai demandé d’où lui vient l’inspiration. « C’est en fait le cœur même du projet Chopper, ne pas être limité par des genres ou des styles. Le silence est peut-être ma principale source d’inspiration. Je marche beaucoup, sans écouteurs, et de nombreuses mélodies et paroles viennent de là. » 

 « Shock Pop Vol. II » se clôture avec son cinquième morceau sur une sorte de power ballade gothique dont l’intensité monte crescendo. Plutôt que d’improviser une analyse, j’ai demandé à Jonatan – ou bien était-ce Chopper ? – de me parler de Moongirl et de son clip à l’iconographie religieuse omniprésente. « C’est en partie une chanson pour ma sœur, sur le fait de grandir et de se séparer, mais c’est aussi une chanson d’amour plus romantique. Je suppose que le thème principal pourrait être la dévotion à quelque chose de plus grand que soi, comme Dieu, la mort, l’amour, ou tout autre cliché prétentieux et disproportionné que vous voudriez y ajouter haha. C’est à peu près ce qui explique tout le côté religieux de la vidéo. Comme Moongirl est en quelque sorte ma version d’une ballade rock de stade, j’ai trouvé très tentant de tourner à l’intérieur d’une église. »

Customisé comme une grosse cylindrée

Depuis le lancement de ce projet musical, Magnussen, qui me confiait il y a deux ans vouloir camper « cette sorte d’incomprise, triste et misérable pop star à petit budget ou de perdant magnifique », a laissé évoluer son personnage à la manière d’une légende scandinave. Même s’il ne compte toujours pas chanter en langue vernaculaire, il relate : « J’ai toujours besoin de me sentir ambiguë à propos de tout ce que je fais, pour que cela reste intéressant pour moi, mais je me sens plus ancré aujourd’hui. Le perdant magnifique était aussi un reflet de la production du premier album, qui était très lo-fi. Chopper se dirige maintenant lentement et progressivement vers l’arène hi-fi, et je veux toujours être une pop star. »

Il y a déjà cinq mois, le sujet de la couronne danoise présentait chez nous son alter ego lors d’une tournée organisée par Adèle Colona Cesari, chargée de communication et de production à la Boule Noire, durant laquelle le Chopper live gang n’a « pas saccagé de chambres d’hôtel ni relâché de serpents » mais s’est coltiné un virus qui l’a immobilisé « entassés et en sueur, dans le même lit à Nantes pendant deux jours ».
Loin de tirer sa révérence, la prochaine fois que nous entendrons parler de Magnussen ce sera certainement pour un album mais sa couleur reste pour le moment incertaine. «
Soit je fais deux albums, l’un avec principalement du rock, et l’autre avec beaucoup de house/dance dramatique et des compositions d’inspiration classique, soit je fais bouillir le tout ! Je prévois également de partir en tournée au Danemark et, je l’espère, en Europe à l’automne 2025 », conclut l’artiste qui nous écrit depuis le pays des trolls.

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