Son dernier album, il aurait pu l’appeler : "Ruin & Beauty, des confins de Zen Arcade à aujourd'hui". Car Bob Mould ne fait jamais rien comme personne. Et il ne faudra pas s'étonner si ce disque sonne donc comme une rétrospective à l'envers.

Onzième album solo d’un type qui servit de déclic à la création de centaines de groupes dont certains squattent le haut de l’affiche sans fatigue, « Beauty & Ruin sonne comme à sa façon comme un « tu vois Kurt Cobain, ton héros d’ado? Et bien quand lui étais ado, c’était moi son héros« . C’est fou comme l’écoute de ces douze titres – et autant de bonnes chansons – marque surtout l’empreinte de Mould sur les années 90.

Bob-Mould-cover
La musique et les textes avancent ensemble d’une façon parfois paradoxale. A le lire on ne peut imaginer sa musique. A l’écouter on ne peut imaginer ce qu’il dit. Après un remarquable « Silver age », la perte de son père lui a donné une autre raison d’écrire, une réflexion et une nouvelle révolte. La pochette n’est-elle pas le reflet d’une relation père-fils autant que la juxtaposition de deux périodes? On a de la chance. Mould réussit à faire un disque qui soit intéressant sans être chiant, un putain d’album de rock alternatif aux refrains imparables. Aussi l’ensemble se divise, du moins thématiquement, en plusieurs parts ou visions. Quatre thèmes qui se suivent ainsi: la perte, la réflexion, l’acceptation et le futur (l’espoir toujours vivace?). Mould parle de son âge et des phases qui vont avec mais sa musique, elle, ne vieillit pas. Un quinqua qui ne joue ni au jeune con ni au vieux moralisateur, mais un type qui découvre chaque étape de sa vie et les questions qui vont avec, sans juger les précédentes ni les suivantes. Un mec bien dans sa peau.

Et puis on en vient au disque. Est-ce un hasard si Low season commence par un bruit d’usine? S’ensuit un morceau très apaisé, mélodieux avec son mid tempo et un refrain presque solennel. Le morceau est d’autant meilleur qu’on craint le coup de l’album de la sagesse. Mais non, dès Little glass pill on accélère pour un excellent titre power pop très Hüsker Dü. I don’t know you anymore bat le fer tant qu’il crame et ravira les fans de Sugar sans tomber dans le bilan de carrière. C’est toujours pertinent et cohérent, et forcément on a droit à ces refrains fédérateurs !
Avec les potentiels tubes power pop au goût punk (de nos jours seul The New Trust m’excite encore avec ces termes) comme Hey Mr Grey ou Tomorrow Morning, je peux ranger Monkey Wrench au placard. Oui j’exagère un peu le trait, j’aime bien faire ça….

http://youtu.be/RkPXdINi4tA

Voilà, ça y est. Nous avons pris douze pépites un brin nostalgiques dans les dents (vous les avez toutes les amis?). Nostalgique parce qu’on y entend des échos. Mais au final cet album sonne comme si rien ne s’était jamais arrêté. L’honnêteté de Mould ne fait aucun doute et c’est avec cet allant qu’il envoie une bombe furieuse, en nous rappelant que le temps n’a sur nous que le pouvoir qu’on lui concède.

J’ai relu une de ses célèbres liner note (celle de « Warehouse »), avec toute la pertinence qui font de ses chansons autre chose qu’une simple mélodie chantée. Nan, Hüsker Dü c’était autre chose, c’était une parole. Et cette parole on la retrouve bien ici. Du coup je n’ai que pu faire le rapprochement entre « Beauty & Ruin » et « Warehouse » le surdimensionné. 12 titres, 36 minutes, what else? On évite ici l’écueil de disque best of ou le patchwork d’un mec qui n’a plus rien à dire. Et l’on entendra sûrement tôt reparler de lui. Il y a de la beauté dans ces ruines.

Bob Mould // Beauty & Ruin // Merge
http://bobmould.com/

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