Cai Burns, leader du groupe grunge de Nottingham Kagoule, sort un premier album en solo sous l’alias Blood Wizard. Le disque, qui fait le pont entre Kurt Vile et Arthur Russell, s’écoute comme du petit-lait sans faire de mousse. 

Il faut, de temps en temps, des albums qui s’écoutent dans le plus grand des calmes, sans forcer, sans vous faire saigner l’oreille ni vous sortir de votre zone de confort. Certains diront qu’il s’agit d’un disque plan-plan linéaire, sans surprise, qui ne réinvente pas la roue. D’autres y verront 10 morceaux bien orchestrés, une folk music qui s’extirpe de ses codes pour en titiller d’autres, tout délicatement. « Western Spaghetti », sorti sur le label Moshi Moshi Records un peu plus tôt dans l’année, est l œuvre d’un artiste relativement peu connu en France : Cai Burns, leader de Kagoule, groupe mi-punk mi-grunge de Nottingham qui a sa petite réputation outre-Manche, mais comme il existe des centaines. Autant dire qu’on n’attendait pas forcément l’Anglais au tournant. Mais le virage a été bien négocié.

Pour justement éviter de réaliser le disque folk du grenier à papa, Cai a puisé dans l’avant-garde (il dit s’être inspiré de Dean Blunt, musicien britannique fondateur du groupe expérimental Hype Williams), puis a électrifié certains passages pour donner de la nervosité. Si Breaking Even, premier titre de l’album, flotte dans les airs sans vraiment laisser d’odeur, le morceau Halo est la vrai point de départ. La guitare slide, sortie à la dernière minute en studio pour épaissir la sauce, apporte la force nécessaire au disque pour enclencher la deuxième. La voix lente et lourde de Cai, comme s’il récitait une poésie à une classe de primaire, s’accole aux mélodies comme du ruban adhésif. « Western Spaghetti » va continuer ainsi, sur encore 8 titres, à faire des va-et-vient entre une folk passe-partout « sympathique mais sans plus » et des moments éclatants et osés, qui fatalement, accrochent plus l’oreille. 

Par exemple Mother’s Illusion, une chanson écrite pour sa mère et offerte comme cadeau à Noël à cette dernière, est clairement chiante. Par contre juste après, Cai enchaîne avec Total Depravity, assurément le titre le plus pop de l’album, qui se termine sur un solo de guitare bien crados (comme si Kevin Morby faisait un feat avec Thee Oh Sees).

Le reste de l’album reste en suspens, comme figé. Il y a un passage où Cai s’excite un peu (Carcrash), un autre qui sublime l’art de la chanson pop (Somehow I Knew) et puis arrive la fin, sans faire de remous. C’est dommage : « Western Spaghetti » est envoûtant. Mais qu’à moitié. Cai sonne parfois comme une mauvaise imitation mollassonne d’Animal Collective puis sort de terre pour donner des sueurs froides à Kurt Vile. Ce yoyo est le seul bémol de ce disque aux orchestrations limpides, qui apporte, dans sa simplicité apparente, une dose de réconfort.

« Western Spaghetti » est sorti le 5 mars sur Moshi Moshi Records.

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