(C) Aristide Lacarrière

Avec leur premier album « Speed it up » chez Tricatel, les gamins jazz-funk de Lord$ créent une carte surprise sur Mario Kart, avec cette impression que des palmiers ont été plantés à Paris Plages et que cette nouvelle génération jazz, totalement décomplexée, va clairement plus vite que la précédente.

Ce n’est certainement pas un hasard si le nouveau projet signé chez Tricatel et composé d’une jeune clique comprenant notamment l’ancien batteur de Catastrophe a choisi de placer un dollar dans son nom. Lord$, créé voilà à peine deux ans, ne sera jamais millionnaire comme Stevie Wonder ou Herbie Hancock. Certes. Mais on retrouve cet esprit d’entreprendre typiquement américain dans leurs mélodies rondes, ce fantasme de Venice Beach traversé en écoutant Aja de Steely Dan, et cette maitrise technique mise au service de morceaux, il faut bien le dire, surprenants pour un groupe français évoluant en zone 1-2 pass Navigo.

En termes de soul-jazz, il faut cela dit préciser que Tricatel possède un certain historique, voire une tentation. Les plus vieux – et les moins amnésiques – se souviendront certainement du Burger and fries de la très jeune Allegra à la fin des années 2010, puis du combo néo-jazz La Classe qui tentait déjà de sortir les notes jazz de la prison dans lequel le genre s’était enfermé au milieu des années 2010. Avec Lord$, Tricatel semble enfin avoir trouvé la bonne formule : sur le premier album « Speed it up », porté par une production impeccable, les cinq foufous autant fans de jazz rock (peut-on encore citer Weather Report en 2024 sans risquer un exil sibérien ?) que de gaming s’infiltrent avec aisance dans le tunnel d’aspiration créé par Louis Cole et plus récemment Domi & JD Beck, nouveaux représentants du cool jazz de la côte Ouest suite à l’explosion de Thundercat ou Anderson .Paak.

Le dollar, on y revient, devient alors le symbole d’un son américain qui, de Supertramp à Michel Colombier, a permis de faire les grandes heures de la période 1979 – 1984, quand enfiler une paire de rollers en écoutant Billy Joel était encore autorisé.
Et si ces enfants de Youtube dominent avec aisance leurs instruments au point de transformer leurs partitions en avalanches de notes à la seconde (cf le titre de l’album), ce n’est jamais gratuit ; ce qui rend l’écoute de « Speed it up » à la fois ludique et parfaitement adapté à une écoute estivale, mais tout en ayant l’impression de ne pas perdre de points de QI au fur et à mesure que se déroule ce tracklisting généreux (13 titres) muni de belles vagues (Billy Joel, Make it alright, Here we go) sur lesquelles on se surprend à surfer sans efforts. Des dollars, finalement, c’est tout ce qu’on leur souhaite. Au regard du taux de change, celles et ceux qui auront le courage de miser sur Lord$ pourraient bien faire une belle plus-value sur le cours mondial du groove.

Lord$ // Speed It Up // Tricatel
https://tricatel.com/lord_s/

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