Contrôle de flics, vol de matos et maladies mentales : le chemin tortueux d’Allein in der Badewanne

« Tout seul dans la salle de bain »: telle est la traduction littérale du nom du groupe des Rennais derrière Allein in der Badewanne, un projet balancé entre krautrock et post-punk à la veille d’une certaine pandémie… Trois ans plus tard, ils sortent leur deuxième album éponyme sur Icy Cold Records. Rencontre à la terrasse mouillée d’un café rennais.

À quel moment vient l’idée de lancer un projet krautrock post-punk en allemand à Rennes ?

Théo : J’ai grandi en France avec une mère allemande. J’ai eu envie de m’y mettre parce que personne ne parle allemand dans ma famille. Même si je ne connais pas vraiment la culture et que je suis un piètre germanophone, j’ai démarré des premières démos tout seul. Puis, j’ai réuni des musiciens. Tom, à la guitare, Jules à la basse et Baptiste, aux synthés et au chant en français. C’est aussi le musicien du groupe, autrement dit le seul qui pense aux harmonies etc. Et les autres membres du groupe ont aussi accroché alors qu’ils ont tous fait espagnol LV2…

Jules : Ma grand-mère était prof d’allemand donc je capte quand même quelques mots par-ci par-là.

Lancer un projet fin 2019, vous avez eu le nez creux…

Théo : C’est sûr… On a quand même pu jouer timidement en France et sortir un album de démo en auto-production Steriles Land.

Malgré la pandémie, vous tournez jusqu’en 2022. Mais, cette année-là, j’ai comme l’impression que vous mettez le groupe en sommeil ?

Théo : Oui, c’est arrivé après avoir perdu notre matos. D’ailleurs, c’était sûrement un vol. On ne sait pas trop comment c’est arrivé.

Jules : En gros, on est parti de Paris pour aller jouer à Rouen. On s’est fait contrôler par les flics en sortie de péage donc soit ça a été perdu à ce moment-là ou après notre date à Paris.

Théo : Deux synthés, un ordi et le cash de la tournée… Gros coup dur.

Jules : On avait déjà un album de prêt mais ça nous a un peu démotivé alors chacun a commencé à faire son truc de son côté.

Qu’est-ce qui a provoqué ce “retour” ?

Théo : On a joué sur 2, 3 dates. On a vu que les gens aimaient toujours bien. Ça a pris. On s’est dit qu’il fallait relancer le truc. Puis on reste de bons potes. On aime jouer ensemble.

J’ai déjà entendu dire qu’il était plus facile d’écrire et de chanter en allemand sur ce genre de musique. Tu confirmes ?

Théo : Il y a un côté très haché. Parfois, il y a des formulations avec lesquelles le refrain se fait tout seul. Il y a aussi le fait que j’ai honte de chanter en français parce que je n’écris pas très bien. Ça permet un peu de me cacher ! J’assume de mal écrire en français… Alors qu’en allemand, je ne connais pas assez les subtilités de la langue pour pouvoir en juger.

Certains de mes proches sont atteints de maladies mentales. Ce sont des choses qui me touchent. Tout ça mêlé aux angoisses génériques de notre génération telles que la peur du fascisme ou encore l’éco-anxiété.

Qu’est-ce qui a valu d’intégrer du chant en français ?

Théo : Baptiste ne parle pas allemand mais il a une très belle voix donc ça aurait été bête de ne pas l’exploiter.

Jules : C’est cool aussi les groupes en deux langues !

Théo : Ouais c’est chouette ! Surtout que maintenant il me back en phonétique. On essaye de tous faire les chœurs en live aussi. Ça risque d’être challengeant.

Et pour composer vous fonctionnez aussi de façon collégiale ?

Théo : Ouais, on compose à quatre. Souvent ça vient des cordes sur lesquelles on cale la batterie puis après j’adapte les paroles.

Justement t’as quand des thèmes prédéfinis ?

Théo : Certains de mes proches sont atteints de maladies mentales. Ce sont des choses qui me touchent. Tout ça mêlé aux angoisses génériques de notre génération telles que la peur du fascisme ou encore l’éco-anxiété.

Pourquoi ces sujets ?

Théo : Ils sont communs à toute notre génération. Puis, dans certains morceaux, ces thématiques se confrontent à notre quotidien. Dans Eine Dose, qui signifie littéralement Boîte de conserve, je parle de la liste des courses alors qu’on vit dans un monde au bord d’une troisième guerre mondiale entre les conflits qui règnent en Ukraine, en Palestine et à Taïwan.

Et de ton côté Jules ?

Jules : Avant qu’on compose, j’aime bien réfléchir sur la direction que l’on va prendre. Quel propos on va choisir. Est-ce qu’on veut faire quelque chose de beau ? de pop ? de dark ? En général, j’aime bien quand il y a deux niveaux ! Un truc joli et un autre plus moche et de jouer sur lequel va prendre le dessus sur l’autre. Comme un beau tapis sous lequel il y a plein de crasses quand tu le soulèves !

Cette dualité est nécessaire pour obtenir un résultat satisfaisant ?

Théo : Carrément ! Les trucs trop sonnants ou trop léchés, c’est à vomir…

Jules : En tous cas, c’est le résultat que j’aime. C’est presque comme si tu attendais pas. Ça ramène un truc plus humain et plus spontané. Alors que si tu fais un truc super clean, je me dis que d’autres gens pourraient le faire mieux.

Est-ce que vous vous accordez cette liberté de jouer sur cet équilibre lorsque vous interprétez vos morceaux en live ?

Jules : On travaille davantage avec de la drum machine alors qu’avant c’était de la batterie programmée. Ça va nous donner plus de liberté alors qu’avant c’était chronométré par le morceau lancé sur l’ordinateur. Si jamais j’avais un petit train de retard à la basse, c’était compliqué de rattraper, là ça va être plus simple.

Théo : On garde toujours quelques parties chronométrées. Avec Baptiste, en bons psychopathes de l’harmonie et de l’arrangement, on va jouer tel accord au moment précis. Mais la drum machine va nous accorder davantage de frottements avec la possibilité d’étirer les morceaux. L’idée c’est de jongler entre les deux ! Jammer pendant une heure et demie c’est chiant au même titre qu’un truc tout cadré. Idles en live, c’est affreux ! C’est la même chose que sur leur captation. Même ces speechs quand il parle au public, c’est tout le temps la même chose. C’est con parce qu’à la base, j’aimais bien.

https://alleininderbadewanne.bandcamp.com/album/allein-in-der-badewanne

Gonzaï Nights

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