Le guitariste est un individu emmerdant. Du printemps à l'automne, hagard, échevelé, il ânonne dans les parcs et soirées urbaines, arpégeant avec afféterie les accords de vieilles sc

Le guitariste est un individu emmerdant. Du printemps à l’automne, hagard, échevelé, il ânonne dans les parcs et soirées urbaines, arpégeant avec afféterie les accords de vieilles scies nineties qu’il a trouvés dans son magazine de guitare du mois précédent.

Mais le guitariste est encore plus gonflant en tribu, quand il notifie ses congénères que « c’est pas un la mineur, là, c’est un mi mineur septième ». Lorsque deux guitaristes se rencontrent, traditionnellement, les branleurs mous endossent les oripeaux de duellistes graves et offrent à la cantonade un fatras vaguement pentatonique qui révolte jusqu’aux toutous des poufs en adoration devant ceux-ci.

Le « duel de guitares » est assurément l’une des pires trouvailles du rock.

Quand, en fac, un camarade enthousiaste s’exaltait de la chanson Blue Sky, des Allman Brothers, dans laquelle les guitares de Duane Allman et Dickie Betts se chevauchaient dans des soli bavards, je prenais congé promptement pour m’en retourner à mon exemplaire de Songs The Lord Taught Us… Les « supergroups » avec deux guitaristes « monstrueux », « démoniaques », « non-euclidiens » représentaient pour moi une abomination quasi-lovecraftienne… Un vrai truc de blaireaux. Sauf peut-être les Yardbirds.

Puis j’ai découvert Pentangle.

Et j’ai compris que les journaux rock s’étaient bien foutus de nos gueules avec leurs pseudos « supergroups » de hype infantile. Il apparaissait que tous ces fameux duellistes dont on nous avait rabâché le mou étaient de biens piètres bretteurs en comparaison des épéistes exceptionnels nommés Bert Jansch et John Renbourn, eux qui tricotaient de fabuleuses fresques folk à la pointe de leurs fleurets magiques… Danny Thompson et Terry Cox  arbitraient les joutes sur un tempo d’une finesse et d’une précision exquises. Et Jacqui McShee (c)hantait la geste avec la spectrale solennité d’une dame blanche. Et tout s’harmonisait merveilleusement! Je m’étais trompé: il avait donc bien existé un groupe composé de musiciens virtuoses qui arrivait naturellement à jouer ensemble, qui n’en rajoutait pas dans l’esbroufe, dont le résultat excédait la somme de toutes les notes jouées pour former une véritable chanson!

Pourquoi personne n’en parlait? Pourquoi Light Flight, cette perfection de trois minutes, ne figurait-elle pas dans les classements de la meilleure chanson de tous les temps? Pourquoi les affreux guitaristes du parc d’à-côté ne jouaient-il pas Sovay au lieu de Knocking On Heaven’s Door? Pourquoi les critiques ne mentionnaient-ils pas Lyke Wake Dirge dans leurs papiers sur les excellents Fleet Foxes? Mais pardi, parce que Pentangle a été une exception oubliée. Le Pentangle n’a engendré aucun imitateur- tout simplement parce qu’aucun groupe depuis n’a possédé autant de talents capables d’approcher de cette musicalité-là. Surtout pas les gratteux d’en bas de chez vous.

http://www.myspace.com/pentangle

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