Mylène Farmer, 57 ans, toujours catin

A l’heure où les monstres sacrés se font la malle vers l’infini et l’au-delà, je tiens à en garder une sous la main. S’il ne doit en rester qu’une, je prendrais Mylène pour mes vieux jours. Je serais son Michel Onfray du vice, le maître de sa « dé-zob-eissance ».

Depuis quelques mois, un peu partout, sur les murs de France et de Navarre, se trouve affiché le retour de Mylène Farmer. On voit à l’image mémère se laisser aller sur une chaise Premier Empire. Un crâne sous le pied pour fouler Shakespeare, une épée phallique sous le cul (pour rappeler à d’autres que la queen Christine, c’est du chocolat fondu face à elle ?) et un coté badass salement irrésistible. On irait pas jusqu’à attendre la belle rousse mais c’est pas dégueu à voir et à tout prendre, entre une publicité pour Carglass et un appel à la « Désobéissance », j’ai fait mon choix. Mylène Farmer est et restera mon petit péché mignon. Mon premier émoi audio-vidéo-lubrique. Avant elle, le gothique c’était une cathédrale, depuis elle et ses clips sur M6, c’est une baignoire où Waterloo ne sera jamais plus morne plaine.

Qu’est-ce que je peux vous dire sur ce disque ? Ha oui : qu’elle a 57 ans.

Désolé mais je suis obligé de commencer par là. Les féministes devraient s’attaquer à ce gimmick de journaliste, quand un artiste masculin sort un album on ne commence pas par donner son âge. Chez Mimi, c’est la première chose qu’on balance : sa date de naissance. Elle a des heures de vol et ça se voit pas, ça se voit pas du tout même, voire, elle efface les kilomètres au compteur. C’est injuste pour vous mais c’est pas de sa faute si le temps n’a pas de prise sur sa personne (contrairement à votre serviteur). Adolescent je collectionnais ses posters sur les murs de ma chambre et là, si on nous met l’un sur l’autre, les gens me demanderont comment j’ai fait pour avoir une fille aussi lumineuse. C’est ça aussi être exceptionnelle : la peau de pêche et le rein primesautier.

Ce n’est pas son meilleur album, mais je n’ai pas écouté les autres.

Comme je suis consciencieux, me voilà à écouter son album. Je ne recule sur aucun effort pour vous satisfaire. Conclusion efficace : c’est pas son meilleur. Faut que je sois honnête : je connais pas les autres. On saigne pas des oreilles mais on ne va pas jusqu’à se le repasser en boucle. C’est un disque de variété. Romantique bling-bling, colombe torturée, une bonne cuvée française sur une radio de quadra-quinqua sans goût. Indochine en diable.

Maintenant il est temps d’en arriver au nœud du problème. En parcourant le web j’ai remarqué que Mylène faisait l’unanimité chez les homos, comme ils disent. On m’avait déjà dit qu’elle cartonnait dans le monde de la gay pride. Mais là c’est quasi un emblème ; Roger de Bordeaux, Kevin de Paris, Christophe Wallart de Lille, drapeau arc-en-ciel en emblème : z’achetent le CD, le CD collector, le vinyle, font le pied de grue pour les prochains concerts et s’ils pouvaient commander la cassette VHS de son making-off : ils le feraient. Ca schlingue le PEL torturé ou le prêt Cofidis pour satisfaire à tous les vices de la Castafiore FM. Ca se chamaille sur celui qui aura l’album avant l’autre, ça chicane sur l’intégrité de l’artiste, ça se cosplay la coupe tout feu tout flamme des NRJ music Award de 2012 (j’ai un cliché de Bernard de Nice en situation XXL prit lors du séminaire « Farmer et moi » qui va me faire ma soirée), ça l’appelle « Mylène » comme toi tu appelles ta sœur au téléphone.

Alors bordel : qu’est ce que vous foutez les hétéros ? Non mais vous avez pas de conscience ? Faut que je vous réveille ? Mylène, elle est à nous aussi. On laisse la bonne copine à nos bons copains ? Certes elle a 57 ans, on pourrait l’appeler maman mais on pourrait aussi l’appeler par plein d’autres noms cochons. Y a peut être eu ravalement de façade mais les fondations sont solidement sexy. Okay, elle n’a pas de voix. Mais on ne lui demande pas de chanter. Si c’est elle le repos du guerrier, alors je m’engage directement comme grognard. La garde se meure mais ne se rend pas. Regardez la photo ci dessous, si vous voulez pas vous mettre à la musique, y’a de quoi se pendre.

Et qu’on me dise pas que je suis un gros dégueulasse. On a besoin d’amour aussi. A force de nous allumer ma petite Farmer, t’as gagné. Fait pas ta vierge effarouchée sur le plateau de TF1. Comme si t’étais pas prête. Et ça se pavane en jarretière, et ça fait la belle en sparadrap sur la peau, ça prend des poses qu’on pensait impossible et comble du vice, ça n’a même pas un cheveu gris sur le caillou. Alors fallait bien t’attendre qu’on finisse par ne plus en pouvoir, que ça craque. Trente ans qu’on te supporte, trente ans qu’on fait comme si t’étais pas bonnasse comme une cuite de 31 décembre, trente ans qu’on ferme la braguette et qu’on bande mou quand on t’entend dire « je suis libertine, je suis une catin ».

Je vais faire un deal avec mes copains situés de l’autre coté de la rive  : on vous laisse Céline Dion et vous nous laissez la flamboyante rouquemoute. Céline, c’est cadeau de la maison car on ne pourrait rien en faire, Mylène pour vous c’est gâché. Et croyez-moi, nous on saura être inventif. Pis ça fait longtemps qu’elle rêve trop fort en chantant des histoires de fesses. Faut lui faire remonter la pente. Dans deux ans, on vous la rend. Elle aura galopé à la gauloise brune, sera fan de foot et prendra part aux débats sur la capacité du nouvel ethylotest à la sortie de son album rock garage.

Quand tu feras ton âge ma belle Mylène, je te promets qu’on ira promener le chien ensemble. Et s’il te plait, assied toi correctement sur cette chaise on pourrait se méprendre sur tes intentions.