Parce que démonter le présent reste un sacré pari sur l'avenir. A l'heure du droit d'inventaire, en marge des bilans d'une décennie qu'on n'a pas bien compris, plutôt que de s'épancher sur des l

Parce que démonter le présent reste un sacré pari sur l’avenir. A l’heure du droit d’inventaire, en marge des bilans d’une décennie qu’on n’a pas bien compris, plutôt que de s’épancher sur des listes aussi grosses que Jackie Sardou et Carlos, Gonzaï s’arrête l’espace de quelques instants sur le pire des 2000’s. Objets stupides, groupes éphémères, modes improbables et croyances absurdes, Gonzaï brule dix ans de vide rétro-futurisme, toutes les semaines et jusqu’au premier janvier 2010. Cette semaine, Yoan Bazin démonte… Gonzaï. Subtile mise en abyme.

J’ai entendu dire que pour passer à la radio, un morceau devait avoir un refrain dans les 40 premières secondes et ne pas durer plus de 3 minutes.

De même, un article Gonzaï semble impérativement devoir commencer par un « je » et se terminer par un point d’exclamation (parfois précédé d’une insulte pour marquer la provocation de la subjectivité de l’auteur). Si le style ne suit pas, alors la différence entre le gonzo et le blog devient de moins en mois claire et à l’heure où Gonzaï prétend à un bilan des années 2000, il faudrait peut-être commencer par faire état de sa propre évolution. Pour rentrer dans les normes stylistiques, je vais maintenant les insulter et leur dire qu’il serait temps de réveiller au risque n’être qu’un bande de branleurs !

« Madame Bovary, c’est moi. » Par cette phrase, Flaubert voulait nous rappeler que dans toute œuvre, l’auteur est omniprésent. Cette idée connaîtra sa plus belle réalisation avec la Recherche du temps perdu où la frontière entre le Narrateur et l’Auteur devient plus que floue. Suivant cette tendance littéraire (dépassant évidemment les seuls Flaubert et Proust), on va voir peu à peu s’immiscer l’artiste dans sa propre œuvre. Ainsi, la Beat Generation va produire une flamboyante littérature en prenant la vie de l’auteur comme point de départ, et l’acte d’écriture va alors en développer l’histoire, l’étirer, l’abréger, la fantasmer et l’exprimer. En réaction, le Nouveau Roman français va faire disparaître, non seulement l’auteur, mais aussi les personnages et ainsi profondément revoir la structure narrative des romans.
Mais le mal est fait et la subjectivité colonise d’autres champs de l’écriture et bientôt, le journalisme va s’y mettre. Émerge alors un journalisme littéraire qui revendique son parti pris ; il ne s’agit plus de retranscrire l’événement tel qu’il a eu lieu mais tel qu’il a été vécu. Dans une société saturée d’informations, le lecteur pourra, par la multiplicité des points de vue, construire le sien. Le journalisme devient alors littéraire et ses artisans les plus talentueux, Thompson en tête, vont produire de véritables œuvres d’art témoignant d’une époque, d’un lieu, d’une ambiance. Du côté du roman avec un grand R, la « mission » politique de l’auteur engagé dans la société (comme l’étaient les prises de position de Kerouac suivant l’héritage de Zola) est peu à peu abandonnée et permet de libérer la parole et l’écrit. C’est Bukowski qui pourrait incarner le mieux cette tendance de l’auteur, tiraillé entre le détachement nihiliste de l’artiste et son lien fondamentalement humaniste à son époque. Dorénavant, la subjectivité est présente et revendiquée, l’auteur vous donne son avis et sa vision du monde sans assumer de position particulière, sans revendiquer quoi que ce soit. Il faudra attendre 1985 pour que la littérature américaine se renouvelle ; tout en gardant cette idée car l’auteur reste central. Bret Easton Ellis va alors initier un courant -dont Beigbeder est le direct héritier- où l’auteur et les personnages fusionnent. On en retire, pour les plus talentueux, un témoignage d’une époque tant du point de vue social que personnel. En France, c’est sous la forme de l’autofiction que l’on va se saisir de cette idée. L’auteur, sous un pseudo ne cachant plus grand chose (la palme revenant au dernier Prix Goncourt… ? ou à Catherine M), raconte sa vie sans vraiment le dire. La tendance est un peu plus narcissique car souvent exhibitionniste et on a fini par tourner en rond à la fin des années 2000. L’idée est là, l’auteur parle de lui en tant qu’homme – ou femme – mais sous couvert de son statut d’auteur, de producteur d’œuvre, à demi caché. Tout cela participe d’une espèce d’interprétation bancale des idées post modernes…

Tous les points de vue sa valent, il n’existe ni vérité ni bonheur !

Dans ce bordel vont émerger des pseudo journalistes qui, vu que tout se vaut, se proposent de balancer, et d’imposer, leurs proses sur des sujets divers et variés. Considérant que tout peut maintenant être dit, que toutes les subjectivités se valent, ils s’imaginent que leurs écrits valent bien n’importe quel autre. Pensant avoir compris la philosophie, ils en oublient la sociologie… Mais sans aller jusque là, pour se revendiquer de Thompson, encore faudrait-il en avoir le talent. Car cette subjectivité revendiquée ne tient la route que parce que Lester pouvait derrière produire une œuvre au moins autant artistique que journalistique. Il y a parfois, dans les propos des auteurs de Gonzaï, quelque chose que relève quand même plus du blog que du gonzo. Le gonzo est un véritable style littéraire qui ne peut être réduit à la simple expression d’un avis personnel… Et encore, je ne rentre pas dans le détail. Car, à revendiquer une approche post moderne, il faudrait alors nier derrière toute idée de vérité et de bon goût.
Or, il y a quand même dans l’ensemble des textes de ce site quelque chose qui fleure bon le sens de la « vraie musique » et « du bon groupe ». Gonzaï fini par réinstaurer une vérité après l’avoir niée ! Certes, les conférences de rédaction sont un joyeux bordel durant lequel aucun accord ne se fait pour apprécier tel groupe et pourrir telle musique. Il y a de la diversité et un certain respect des points de vue. Mais on ressent quand même des tabous autour de chose qu’il n’est pas possible d’apprécier (sic and sick). Si tous les points de vue se valent, pourquoi personne n’encense certains artistes sur ce site ?! Allez pour provoquer citons Vincent Delerm et Mika qui sont, au mieux, tout juste tolérés… Dans une véritable revendication de subjectivité, il n’existe pas de « bon goût » ! Je ne suis personnellement pas post moderne (j’essaye de faire augmenter mon quota de « je » dans le texte, statistique essentielle dans un article Gonzaï je vous le rappelle) mais la tendance des gonzo à revendiquer leur subjectivité tout en constituant une sorte d’élite définissant ce qui est bon (et ce qui ne l’est pas) derrière leur bière et leur écran ne sent pas bon à mon sens. Si Gonzaï veut revendiquer quelque chose, il est temps que ses participants se bougent le cul pour nous faire voir et écouter en live ce que leurs subjectivités apprécient…

Merde, j’ai oublié une insulte de conclusion… Secouez-vous bande de planqués !

11 commentaires

  1. sorry mais je ne suis pas d’accord avec toi Louielouis
    c’est aussi parce que c’est un joyeux bordel que l’on est ici
    cet article évite de se prendre au sérieux et incite juste à bouger les lignes.

  2. Non mais, qu’ils en soient conscients ou pas, la plupart des rédacteurs de Gonzaï sont descendants du Dandy Rock (le père « l’amoral » qui a dépoussiéré le froc du curé avec un cuir et des lunettes noires) que d’un type habillé d’une veste en patchwork qui a sorti -probablement avec le concours d’un flash d’acid- le mot Gonzo de son stetson quand on lui a demandé dans quelle petite case il se sentait le mieux. La meilleure transcription du terme qu’on ai dégoté, ça doit être « WTF?! »

    Bref. Y a sûrement plus de HST dans nombre de blogs anti-sarkozyste qu’ici, et alors ?

    Là il me faudrait retrouver la citation du doc, dans le Dernier Testament Gonzo, je crois me souvenir -comme quoi on est prophète où on l’est pas- qui rêvait tout haut d’un système de fil flashé (traduction poétique du télex) accessible de partout et tout le temps via lequel il aurait pu balancer à la face du monde ses articles sans relectures ni corrections … mais j’ai pas le temps. En tout cas, ce truc existe aujourd’hui ; et la réalité a même dépassé le fantasme avec la possibilité d’ajouter photos, vidéos, sons au texte.

    Mais les chartes, rédacteurs en chef et tout le tintouin survivent aussi.

    Y a plus qu’à se trouver le prophète du moment, il est sûrement en train de crier dans le vide chaotique du cyberespace depuis sa minable capsule-blog ; tout en jetant un coup d’œil amusé sur le Dogme issu de la fulgurance Gonzo, si on veut.

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