Un autiste, une rock star, un musicien au profil grec, des abeilles électrocutées sur un clavier, trois gardes du corps déguisés en batterie qui redresseraient ta colonne vertébrale 

Un autiste, une rock star, un musicien au profil grec, des abeilles électrocutées sur un clavier, trois gardes du corps déguisés en batterie qui redresseraient ta colonne vertébrale : Voilà Beak, premier album de Geoff Barrow, fondateur de Portishead. Pour ceux qui auraient raté l’actualité des quinze dernières années, Portishead a crée le trip-hop et accessoirement accompagné le développement pré-pubaire d’une génération d’adolescents mal dans leurs peaux et accros aux boums déprimantes avec du Fanta pas frais sur les tréteaux.

En 2009, Barrow revient avec Beak, un projet qui coupe court (sic) à toute tentation de post-rock déprimant. Garanti sans acides, mais terriblement dansant (pour les mauvais danseurs), Geoff cloture la décennie en fanfare et trompettes teutonnes ; une façon élégante d’écrire que ce premier side-album valait bien une relecture de l’histoire. « Ne faudrait-il pas éviter les sempiternels revers de queue de scorpion à propos de la concurrence nullarde ? » questionne à juste titre un lecteur de la chronique, « Beak it’s just a huge super band with big muscles » ironise le groupe. On voit toujours le présent par le trou de sa lorgnette.

La façon d’enregistrer ce disque ne semble plus très conventionnel, presque onze jours cloisonné dans un studio, tous les trois, et au final, tadadam, un album monstrueux, avec quelques retouches ça et là. Ca s’est vraiment passé comme ça ?

En fait c’était plutôt… relax. Et naturel. C’était simplement jouer de la musique, être cool, sans aucune préconception de comment le disque sonnerait au final. Nous avons commencé à enregistrer après seulement quelques jams, du fait que nous travaillons tous les trois sur le label Invada, nous nous connaissions déjà. Tout a été enregistré à la suite et hop nous avions le tracklisting dans l’ordre, rien à rajouter. Aujourd’hui encore, je n’arrive pas à savoir comment le disque sonne, nous avions plus de 25 chansons enregistrées et…

... et la bio parle de re-recordings, de bandes coupées et remontées.. Tout cela fait drôlement penser à Tago Mago de Can, les masters coupés au cutter, la batterie au centre, l’ambiance fantôme teuton…

Can est une grosse influence, on ne va pas s’en cacher. Donc bien évidemment, nous avons fait des édits, réassembler des chansons, on a bricolé, un peu. Pour rebondir sur le krautrock, l’influence, je ne saurai pas trop quoi en dire… C’est tout simplement de la bonne musique. Lorsque vous jouez dans un groupe de rock, tu peux te retrouver proche de la « bluesy thing », ce que Julian Cope appelle la musique avec une note bleue, c’est ça le krautrock, cela parle de ta capacité à être au niveau ou pas.

Le terme krautrock ne résume-t-il pas simplement le sens du rythme ?

Oui, clairement. Yeah. (silence) Le son de Beak est un peu.. weedy.. comment dire, nous ne sommes pas uber-masculin dans la musique que nous jouons sur ce disque. Rythmiquement, et parce que cela n’a pas été enregistré sur Protools, ca ne sonne pas comme Limp Bizkit, Beak, c’est juste de l’espace. Je ne pense pas que nous conquerrons les charts US avec ce premier album (Sourire), mais si nous nous donnons le temps, Beak continuera d’exister dans le futur.

(L’autiste prononce la seule phrase audible de toute l’interview, c’est techniquement incompréhensible)

Kling Klang, qui a ouvert pour Portishead sur la dernière tournée, a-t-il été un gros coup de pied aux fesses pour Beak ?

Surement, j’adore ce groupe, ils sont constamment bourrés ; ils ont récemment changé leur nom à cause de Kraftwerk (leur studio d’enregistrement se nomme ainsi, NDR), qui voulait leur faire un procès pour utilisation du nom.

Changeons de sujet. Portishead a beau être assez elliptique, 3 albums en 15 ans, vous, Geoff, faites pas mal l’actu depuis 2 ans. On vous doit notamment la production de Primary Colours de The Horrors.. Ne me dites pas que vous n’êtes pas pour rien dans le son de leur album…

Et pourtant, je peux te jurer qu’ils sont venus me présenter leur composition avec tout le matériau qu’on entend sur le disque. Je leur ai surtout conseillé de ne rien rajouter ; tout le monde les voit comme des branleurs de la mode mais, fuck me, ils sont diablement doués. Ma seule erreur aura peut être été de les produire juste après la tournée avec Portishead, j’étais épuisé !

Vous avez débuté votre carrière comme assistant sur le studio de Massive Attack, au début des 90′, et vingt ans plus tar on vous retrouve derrière les manettes avec The Horrors. Le rôle d’un producteur, dans le contexte musical actuel a-t-il encore un sens ?

Cela dépend. Cela peut être positif d’avoir quelqu’un avec qui vous pouvez confronter vos idées, mais franchement, le rôle d’un producteur a terriblement diminué. Tout cela est devenu du marketing, dire que X a produit l’album de machin, mettre cela dans la bio, etc… Bien évidemment, il reste des gens comme Nigel Godrich, mais sinon.. Et cela fut idem pour Beak, nous avons produit tout seuls.

(Le groupe débat sur l’importance d’une approche visuelle en musique, personne ne semble d’accord, surtout pas Geoff)

Le fait que vos chansons soient quasi-instrumentales, planantes, sans single, gonflées sur la dynamique… Avez-vous un lien quel qu’il soit avec le prog ?

Tu veux dire ? Est-ce qu’on kiffe Yes ? No ! Le frappez pas les mecs, il sait pas ce qu’il raconte ! (Rires). J’aurai bien aimé être Peter Gabriel, à la limite… je l’ai croisé une fois, pendant un mois de vraie merde, il avait une veste de barbier/. Bon, en fait nous on fait du regressive rock. Je vois le titre d’ici pour le NME : « A fake regressive rock band from Shoreditch », ca sonne parfait !

Avec Portishead, vous avez crée le Bristol Sound au début des 90′, d’abord grâce à Massive Attack et puis…

Tu veux dire quoi là, avec « Thanks to massive attack » ? Tu sors d’où toi ?

Non, euh, je voulais dire, grâce à leur studio, puisque Portishead a commencé à enregistrer là bas et..

Ah ok ! Calm down man, tu peux respirer. On est d’accord.

Donc, je voulais dire : Plus de vingt ans après vos débuts, le trip-hop et le grunge sembleraient presque être les derniers mouvements fédérateurs, en musique. On assiste bien à un retour du Bristol Sound, avec The XX, Fever Ray, mais quel est votre point de vue sur la dernière décennie ?

Si tu penses à la manière dont les médias travaillent, l’industrie va trop vite, et puisque tout semble devenu acceptable, plus rien ne s’impose. Tu connais Fuck Buttons ? C’est un gros succès en Angleterre, mais s’ils avaient du sortir dans les 1990’s, peut être auraient-ils sonné obscène, avant-gardiste, whatever… aujourd’hui Fuck Buttons est placé sur une publicité de British Telecom. Tu vois la différence ? La musique de Bristol, à l’époque, était surtout faite en réaction à la Jungle, la Drum & Bass. Aujourd’hui, j’ai l’impression qu’il n’y a plus à se battre, pour un groupe. Plus personne contre qui se battre. D’un coté, tu as Lady Gaga, et de l’autre…

Beak ?

Yeah, dans une certaine mesure, oui.

Dernière question : Vous souvenez-vous de votre premier contact avec la musique ?

(Hésitation…) C’est l’été 1974, je découvre la musique à la radio, à l’âge de trois ans. Et je comprends que la musique n’est pas palpable, qu’elle vibre dans l’air. C’était The Laughing policeman, une chanson populaire anglaise avec un rire horripilant en continu, pendant toute la chanson. Traumatisant hein ? (Rire) Puis il y a eu l’hiver 1979, où mes parents m’offrent un kit de batterie. Récemment, j’ai ressenti le même sentiment d’excitation face à la musique, c’était à la fin de l’enregistrement de Third, l’année dernière.

http://www.myspace.com/beak2009

En concert au Nouveau Casino le 10 décembre 2009!

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