Oreilles en choux fleurs, palpitant des tympans à deux cents, sourire « Joker » des instants de folie renversante : Chromb! sonne comme si le crazy squirrel de Tex Avery soufflait dans un saxo par-dessus un rouleau compresseur dessiné sur partitions. Derrière ce rumble in the jungle, quatre fantastiques venus de Lyon, et « II », second album tout neuf. Moins dark que RIEN, plus puissant que le métal effrayant de Hint et moins chiant que Magma un dimanche au parc de la Villette : viens danser sur leur volcan, leurs instrus sont en (jazz) fusion.

avatars-000079572748-xsv7r2-t500x500Chromb! Quatre hussards de la partoche à rajouter à mon armée de cintrés des amplis aux noms pas possible : RIEN, Cheveu, Câlin, PoiL (on en cause rapido), NLF3, La Colonie de vacances… Tous français, monsieur. Tous aussi invisibles aux oreilles lambda. Parce que trop fou, trop compliqué, trop bruyant, trop vite, trop loin, trop pas assez accessible. Pays de sourds. Range tes accusations de snobisme, on n’est pas là pour faire des manières : j’ai découvert un bâton de dynamite, tu peux toujours laisser tes allumettes dans ta poche. Ou demander où est la mèche. Alors ?

Alors on aurait pu continuer à feuilleter les empilements d’univers, de pop mâtinée de rock, d’arrangements ciselés et d’électro pop couchée sur le papier glacé des magazines spécialisés ; scroller sans fin au pays des notes à virgule lâchées en ligne par des barbus smartphonisés sur des disques qu’on aura oubliés dans six mois, s’abîmer les yeux en s’empiffrant d’adjectifs empilés pour faire oublier qu’on a écouté que les deux premiers titres du disque ; crever d’ennui par les oreilles avec le sourire de celui qui connaît toutes les dernières tendances mais qui est incapable de se souvenir de son dernier orgasme auditif.

Ternaire en boule

Après la deux cent cinquante-sixième écoute de « II », le second LP des quatre cinglés à réaction de Chromb!, les métaphores cartoonesques se bousculent. Plutôt Tex Avery que Disney, plus Tarzan la honte de la jungle que Le Roi lion ; Akira qui ferait du free jazz, tu vois. Le muppet show sous acide, ça marche aussi. D’où la joie folle de se faire rétamer les tympans par des gars jouant à trois cent à l’heure avec la finesse du bâtisseur de château de cartes. On rigole et on hurle, quoi. On aimerait aussi fredonner avec eux sur Le Colis et son ternaire à se faire des nœuds aux genoux, mais on risquerait l’étranglement : allez jacter tous les trois temps des « J’ai mangé un colis qui t’était destiné » et « Je me suis déguisé en madame pour aller chercher le colis avec ta carte d’identité », c’est le crachat de valda assuré. Et une bonne dose de ridicule à assumer, aussi. Rien de tel pour faire diversion qu’Il dansait la chance. Six minutes de gigue en gig à se tortiller sur le bouton ignition : pas le temps de voir la lumière, à cheval sur la comète. Alors ?

Alors encore, on aurait pu rendre les armes dans un sourire béat, le pantalon sur les chevilles à attendre que ça passe ; prétextant qu’« àquoibon » et « qu’estcequeçachange ». On aurait pu se faire une place dans le rang, se disant que ça allait passer. Se persuader qu’on était Happy.

Chromb! Un déluge de notes dans le silence d’une France indifférente aux séismes. Du métal au jazz club, du TNT bouloté à la petite cuillère, le pied au plancher dans les virages, des coups de trique en triples croches, des crash toutes les cinq minutes, le plancher des vaches qui craque et ton cœur qui s’accroche. Pas rassasié, j’ai acheté leur premier disque. J’ai fait comme le train sur la pochette : j’ai déraillé. Quelle joie.

Chromb! // II // autoproduction
http://chromb.bandcamp.com

PS : Sur leur site, on peut mater des autographes de Michel Sardou : si c’est pas la classe, ça…

8 commentaires

  1. Pour les fans, je conseille une poignée d’autres groupes français qui flirtent sans doute plus vers l’avant-prog RIO mais avec une maîtrise et une inspiration qui donne envie d’assister à un festival de Rock in Opposition mad in France : Q, Métal-O-Phone, Kinski Elevator, Les Yeux de la tête et Caravaggio.
    Dans un autre genre (une bonne dizaine en fait), je recommande plus que tout chevo légé (Râteau Perspective), la découverte 2013. http://chevolege.bandcamp.com/album/r-teau-perspective

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