Un matin, Joey Starr est sorti comme un diablotin de mon radio-réveil pour me parler de sa Benz. En arrivant au collège ce jour-là, je n’avais pas du tout envie de winer comme le suggérait sa chanson mais plutôt d’aller casser des dents.

Depuis, j’ai su pardonner à Joey, mais surtout, j’ai appris ma leçon : ne plus laisser n’importe qui me sortir du sommeil. En ce moment, je réserve cet honneur aux Californiens The Morning Benders, retenant en otage leur majestueux album Big Echo dans ma chaîne hi-fi depuis le mois de mai. C’est leur premier disque sur le label Rough Trade, ils avaient déjà sorti Talking Through Tin Cans en 2008 mais on ne pouvait pas encore imaginer qu’un jour, ils écriraient en toute innocence des titres comme Excuses, Promises ou Sitches, capables de nous faire pleurer en même temps qu’afficher le même sourire niais que Hello Sunshine des Beatles.
En les découvrant, vous aussi chercherez ensuite pendant des heures sur le web un vol aller sans retour pour San Francisco. d’où ils sont originaires. A moins que vous n’ayez plutôt envie de secouer ces étudiants de Berkeley qui persistent à mettre la mer sur une pochette de disque. Pourtant, passer à côté de Big Echo serait comme refuser de manger du melon sous prétexte que tous les étés, il en arrive par caisses entières. Certes, parmi les groupes indés qui s’émeuvent encore des vagues, beaucoup sentent la marée. Mais cette année encore, il y a eu une belle récolte (Surfer Blood, Best Coast, Washed Out, Wavves). Dans le cas de The Morning Benders, ils apportent leur grain de sel à une pop californienne qui ne devrait jamais cesser de rendre hommage aux harmonies vocales des immortels Beach Boys. Le chanteur Christopher Chu nous offre de vraies vacances en bannissant l’autotune qui a fait trop d’heures sup cette année, mais aussi tous les effets qui emmitouflent chaque filet de voix sur les titres de chill wave. Produit en partie par Chris Taylor de Grizzly Bear, Big Echo voit ses mélodies sublimées par des arrangements instrumentaux exigeants pour satisfaire leur obsession pour la pop des 60s. Cela faisait longtemps qu’on n’avait pas entendu autant de cordes grandiloquentes sans avoir envie de s’y pendre. Les Morning Benders en formule réduite et acoustique, c’est aussi très convainquant : la preuve sur le web avec une compilation de reprises intitulée The Bedroom Covers où Roy Orbison, Fleetwood Mac, Randy Newman et les Cardigans sont repris avec humilité, d’une voix fragile mais que les fausses notes ne viennent jamais narguer. L’envie d’arroser d’essence les plaids en mohair autour de leur feu camp ne devrait même pas vous traverser l’esprit.

Lors de leur concert au Nouveau Casino début juillet, The Morning Benders ont donc joué tous ces titres en formes de montagnes russes émotionnelles qui m’accompagnent depuis tous les matins, quand je me réveille dans mon appartement loin du bord de mer. Cette confrontation directe m’a révélé leur personnalité de bisounours, ils n’ont pas cessé de répéter à quel point le public était beau et demandé de faire l’écho de leurs hou hou. C’était juste, émouvant, pas du tout rock’n’roll. Et d’un coup j’ai eu la dérangeante impression d’être surprise en pyjama au milieu d’une salle comble.

http://www.myspace.com/themorningbenders

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