Avoir de bonnes chansons c'est bien. Avoir en plus l'identité de groupe c'est mieux. C'est ce qui a toujours manqué au quintet pop Bellegarde. Mais le 15 janvier, en concert à l'OPA sous le nouveau nom imprononçable de Temporary January, les parisiens ont montré qu'ils avaient trouvé la solution : revenir en format guitare-basse-batterie avec à bord une femme fatale au nom tout aussi imprononçable.

Il n’y a parfois rien mieux qu’un trio guitare-basse-batterie. J’en refaisais récemment l’expérience. Un ami me faisait découvrir ce groupe, Little Barrie. Quelle joie ce groupe ! Juste guitare-basse-batterie donc, chant et chœur, mais quel pouvoir ! Quand les bons ingrédients se rencontrent, quelques gouttes suffisent. Ils ont le son, la voix, les accroches mélodiques, tout roots, sixties, garage. Le trio, voilà, indémodable, les fondamentaux. D’ailleurs en 2008 quels CD ont particulièrement trusté ma platine et continueront en 2009 ? Le premier The Subways, le premier BRMC (et Rhesus aussi, Talia aussi, si, j’insiste), inexorablement. Rien de révolutionnaire, mais deux trio guitare-basse-batterie qui vont droit au but. Mais bon l’alchimie de groupe ne se trouve pas dans les paquets Bonux (N’en déplaise à Kool & the Gang). Longtemps, pour cette raison, je n’ai jamais su trop quoi dire de Bellegarde. J’aurais aimé : leurs chansons étaient classes, leur leader un ami. Mais ça ne sortait pas. Et je ne compte pas la maigre chronique de leur premier EP que j’avais réussi à placer en 2007 dans le magazine Longueur d’Ondes. Cette histoire de « Cure avec un stetson sur le crâne », hum, pas fameux. Je n’avais pas de déclic de plume parce qu’il leur manquait ce truc clé : l’identité de groupe. « Ses ailes de géant l’empêchent de marcher » dit Baudelaire dans L’albatros. Bellegarde c’était ça. Trop de monde à bord pour l’envol. Depuis des têtes sont tombées et ça leur va bien.

C’est ce que je me dis ce 15 janvier en m’avançant vers la scène bière à 5 euros en main (vive l’OPA). Leur nouveau nom sonne mal (Temporary January, essayez de prononcer ça pour voir) mais sur scène, devenu trio, les ex-Bellegarde font désormais corps. C’est bien simple, de tout le set, je n’ai pas pu détourner mon regard de la scène. Je n’arrêtais pas de taper du pied et de trépigner de la tête. Entre les morceaux j’hasardais un regard vers des amis, genre pincez-moi je rêve ! Elise : « Ils jouent comme s’ils réinventaient la pop ! » Greg : « On dirait un mélange de Pixies et de Steely Dan ! » Mathieu : « Ce « Last morceau » est très Daft Punk ! ». Je ne rêvais pas. Jérôme « Scott Of The Antartic » Pichon, jeu de gratte et voix de velours nickel, a été égal à lui-même: tout en tension intérieure indie rock / no-wave. Trop en retrait ? C’est tout lui : il a beau être le chanteur-guitariste, le songwriter majeur, l’instigateur du projet, il n’assume pas à fond le leadership, comme s’il avait peur de faire l’Artiste. C’est le genre à vous annoncer une cover de Crystla Skulls, superbe, comme s’il annonçait le décès de son chien. Mais maintenant ce n’est plus un vrai problème pour nous car dans un trio ces charges-là sont mieux réparties et question soutien, il est soutenu. Limite joyful derrière ses fûts, ce soir Stéphane « Ricky Hollywood » Bellity c’était Ricky ou la belle vie : le liant, le chef d’orchestre, la touche de lait pop. Et puis last but not least, il y a eu Sylvia Hanschneckenbühl. Ah, cette Sylvia Hanschneckenbühl : basse véloce, œillade Albator derrière cheveux noirs de geai et chant dominateur aux accents germaniques, clairement this is the girl. Transfuge de La Féline, son sex appeal mi D’Arcy mi Kim Deal cartonne dans Temporay January.

« I Can’t Breathe », « Celebration Time »… Leurs compos sont sculptées, magnifiées par le parti pris guitare-basse-batterie. Et avec cette bassiste, Sylvia, c’est con à dire, mais elles vont d’autant plus me rester dans le crâne. Son interprétation charnelle, tellurique et distanciée de « God Sent Me Back », ça ne s’oublie pas comme ça. Elle a fait monter le mercure. Après la demie heure de set, devinez sur quoi portait le premier commentaire de mes potes ?
Pour ceux que ça botte, la miss sort un album en mars, Sylvia Does Not Sing Christmas. Un titre est en écoute sur son Myspace. Ça parle de boules, mais pas toujours de Noël. Cette bassiste au nom maléfique (on s’étrangle à tenter de le prononcer) n’écrit pas que d' »ultra violent love songs ». Elle est aussi « vaguement photographe ». Peu fan de portraits (vous avez dit misanthrope ?), elle prend plutôt des bâtiments industriels lorrains laissés à l’abandon. Bâtiments dans lesquels elle voit des sortes d’églises. Bref, tout ça pour vous dire que ce groupe a beau venir de mon entourage (et cette proximité, question rêve, c’est plus un inconvénient qu’un avantage), il me procure une étincelle de rêve. J’ai envie de tenir son album dans mes mains, de voir ce qu’ils vont raconter sur 12 titres, les pépites enchaînées, l’univers développé. Je prie le trio de rester dans cette voie. Soudé. Temporay January donc. (Ex-Bellegarde). Mais ne retenez pas ce nom, ils vont bientôt en changer.

http://www.myspace.com/temporaryjanuary

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