Demander à un artiste de se définir en 8 morceaux et de tapoter dans la foulée une représentation de soi sur un clavier à touches sans vie est un exercice de style pour le moins difficile. Pour

Demander à un artiste de se définir en 8 morceaux et de tapoter dans la foulée une représentation de soi sur un clavier à touches sans vie est un exercice de style pour le moins difficile. Pour ne pas dire une mission impossible. Aujourd’hui Mina May, un quatuor un peu déjanté originaire du sud-est de la France (France). Tongs polaires, Rock’n’roll  & mélodies expérimentales au programme de ce nouveau self-portrait. Autoportrait « Chu r’parti, sur Québec Air, Transworld, Nord-East, Eastern, Western puis Pan-American, etc… » par Antoni, El Pulpo, Krisss & Flashing Teeth, les 4 Montréalais d’adoption du groupe Mina May.

L’autoportrait du groupe prend ici la forme du cadavre exquis, autre exercice de style, unique solution pour nous afin d’élaborer une écriture collective et démocratique à bulletin secret et résultat improbable, sans garantie de lisibilité, ou d’intérêt… mais qui s’en soucie ?

« Pendant quelques années, il a semblé que nous aimions bien le 5, comme chiffre ésotérique. Pourtant rien de mystérieux : à l’origine il y avait 5 membres jusqu’au départ pour le Canada. Certes cette combinaison de mécanismes se veut acrobate mais bien ancrée dans le sol en même temps, comme une danse qui n’est pas forcément dansable. Disons que le côté « fonctionnel » est vite fatigant et peut-être même dangereux ? On peut aussi danser le « croisement de cerveaux » ou la « moulinette du diable ». Et au milieu de toute cette électricité qui crépite et de ces outils de bricolage – avec lesquels on… bricolerait ! – il y a le beat : la mise en œuvre, la mise en route, en avion ou éventuellement en cargo,  maritime. C’est la même distance, le temps, lui, est différent : une lenteur qui nous convient éventuellement, en tant que sparadrap – temporaire. Il y a aussi au milieu pas mal de choses en fin de compte –

Par exemple ?  John John Lenon Lenon (le frère caché de John, qui contrairement à son frère, ne faisait jamais sécher son linge) ; l’Éternel recommencement, les mêmes gestes, mouvements, rires et râles peu cartésiens ; les Jambons de nuit.

Et on aime bien s’échanger les instruments : des mélanges qui ne sont pas conseillés par les notices pharmaceutiques, mais qui forcément viennent à l’esprit avant tout et donnent des envies en spirales, avec probablement des huîtres rouges dans les cheveux. »

LA PLAYLIST MINA MAY

Le choix d’Antoni

Cello Suite #1, Op. 72 – 1. Canto Primo de Brittten/ Rostropovitch (Sostenuto E Largamente): J’avais racheté ce disque à un ami qui vendait une bonne partie de sa discothèque pour essayer de renflouer son compte – une acquisition quasi malhonnête ! – Mais, malgré la culpabilité (le copain est toujours dans la galère…) à chaque écoute, depuis une dizaine d’année, c’est le même frisson : les mêmes poils qui se dressent exactement dans les mêmes pores dès les premières notes !




Temptation of Egg d’Howe Gelb (giant sand): On est loin des chansons qui changent la vie ( Bone Machine des Pixies qui tout à coup te fait réaliser que les disques achetés jusque-là sont bons à foutre à la poubelle… Tomorrow never Knows des 4 garçons dans le van, ou encore Venus in Furs du Velvet) mais pas si loin que ça du choc esthétique : la fragilité et l’imperfection revendiquées, assumées, et le doux souffle du 4-pistes… 2 minutes vingt-sept qui résistent aux chimères de perfection des productions trop bien léchées…




Le choix d’El Pulpo

Superfly par Curtis Mayfield: Réponse à la question : « C’est quoi le groove? »




Niobe par Caribou: Niobe est un trip psychédélique de près de 9 minutes qui t’emmène loin, très loin. De temps en temps, tu tombes sur un morceau et tu te dis: « waow! J’aimerais faire çà ! » Ça a été ma réaction à la première écoute. Les couleurs se succèdent, se chevauchent entre elles, la tension est permanente, le beat y est juste suggéré mais néanmoins présent. On le ressent très fort et pourtant on ne l’entend pas vraiment. La batterie qui n’intervient que par breaks semble suspendue dans les airs, le mix est sans compromis, quand un nouvel élément mélodique ou rythmique arrive, il passe au premier plan pour ensuite se fondre dans le magma ambiant, lui-même composé d’une multitude de sons qui fait surgir chez l’auditeur de fortes images musicales débarquées d’une autre époque. Merci et chapeau bas, Mr Daniel V. Snaith.




Le choix de Krisss « Voici mon 2 majeur »

I Wish I Knew How It Feel To Be Free par Nina Simone: Que dire de cette Grande Dame, interprète de génie, pianiste et chanteuse hors pair, femme « trompée » mais jamais résignée… Juste écouter et se laisser transporter.. Choisir un morceau n’a pas été facile. Mon choix s’est porté  sur celui-ci parce qu’il est important de bien commencer une journée…




Back In Judy’s Jungle par Brian Eno/ Talking Tiger Mountain: … et y ajouter un peu de « folie ». Brian Eno est l’une de mes principales influences musicales. Son travail sur l’expérimentation et le traitement sonores, ses nombreuses collaborations (Bowie, R. Fripp,…) nous embarquent dans des univers où les limites peuvent (et doivent?!) être dépassées…




Le choix de Flashing Teeth

My World Is Empty Without You de The Supremes: Mon côté midinette. J’aurais pu choisir You Can’t Hurry Love ou When the Lovelight Starts Shining Through His Eyes et son beat à la Bo Diddley, mais ce morceau présente un mélange que l’on n’entend pas souvent en pop music. Le beat est irrésistible, typique de Motown, mais le thème musical et les paroles sont totalement sombres. Ce qui donne à l’arrivée un morceau dansant sur lequel on ne peut pas vraiment danser, et un des plus grands morceaux des Supremes. Je conseille à tout le monde de trouver le DVD Standing in the Shadows of Motown. Ca calme, comme on dit.



Sweet Caroline (‘Innocence & Despair’ – The Langley School’s Music Project): Un ami m’a donné un jour un CD gravé d’un chœur d’enfants qui reprenait des standards des années 70 (Beach Boys, Wings, Fleetwood Mac, etc.) sous la direction de leur prof de musique. Il m’a dit : « Tu vas rigoler, ils reprennent Space Oddity de Bowie, ils chantent complètement faux, c’est affreux ». Résultat, j’ai écouté le disque pendant plusieurs jours sans pouvoir décrocher, avec à chaque fois la même émotion, et ça reste un de mes disques de chevet. D’ailleurs les chansons les plus réussies selon moi sont les plus affreuses à la base, comme Mandy de Barry Manilow (sorte de Michel Sardou américain), ou ce Sweet Caroline, normalement chantée par un Neil Diamond bronzé et en col pelle à tarte, ici transformé en hymne. A éviter toutefois si vous cultivez le second ou troisième degré. Et encore… Innocence & Despair ça évoque aussi Daniel Johnston et ce qu’on appelle parfois ‘outsider music’, de la musique faite par des gens aux compétences techniques limitées, parfois pas très bien dans leur tête aussi, et enregistrée avec un son généralement pourri, en marge de l’industrie musicale. Daniel Johnston, donc, ou The Legendary Stardust Cowboy, ou encore les inimitables Shaggs. Ca fait du bien. Il existe sur youtube un court reportage sur cette étrange aventure, et la réunion des enfants 20 ans après. A écouter aussi : The Legendary Stardust Cowboy : Paralyzed, Daniel Johnston : Walking the Cow, The Shaggs: Philosophy of the World.




Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*
*

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

partages