« Une nuit, un homme reçoit dans une cabine téléphonique l'appel désespéré d'un jeune militaire qui tente de joindre son père et qui lui apprend, affolé, que des missiles nucléaires vont s'abattre sur Los Angeles dans 1 heure et 10 minutes ». Tel est le pitch de ‘’Miracle Mile’’, faux nanar de 1989 avec une B.O. étonnamment signée par Tangerine Dream, et rééditée 30 ans plus tard par Fire Records.

Certaines choses ne changent pas ; l’histoire est un énorme sample qui se répète en boucle. Fin des années 80, le monde occidental vit à l’heure post-apocalyptique, marqué par la fin de la guerre froide et la tentative (ratée) de Gorbatchev d’ouvrir les frontières de la Russie. Plus au centre, en Europe, le mur de Berlin s’effrite violemment et les peuples, bras en l’air, assistent à la naissance du sentiment européen, coincé entre les bombes de l’Oncle Sam de Reagan (qui finit son règne) et celles de l’ère soviétique, jamais vraiment débranchées. Trente ans plus tard, cette tension géopolitique reste bien tendue : Donald Trump échange des cartes postales dignes d’une ado pré-pubère avec ses homologues nord-coréen et russe et les Twittos ne seraient finalement pas surpris d’apprendre qu’une guerre nucléaire vient d’éclater entre un Tweet d’Hanouna et une énième révélation d’harcèlement sexuel de Weinstein envers Marilyn Monroe. On est là. L’histoire se répète, sans fin.

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C’est peut-être la raison qui poussa les cinéphiles à accorder une seconde chance au long-métrage de Steve De Jarnatt, Miracle Mile (Appel d’urgence en français), initialement sorti en salles en 1989 et racontant un Los Angeles plongé dans la panique totale, loin des clichés du genre mais fidèle au film de genre, sans grosses ficelles mais avec une esthétique terriblement 80’s, trop esthète peut-être, pour cette décennie qui se termine. Le film a couté 4 millions de dollars, c’est un flop immédiatement balayé du box office par la sortie d’Indiana Jones et la Dernière Croisade. En 2015, quelques passionnés finissent tout de même par se mobiliser pour réhabiliter ce long-métrage wrong place, wrong time, et un Serge Fendrikoff, responsable des acquisitions chez le distributeur Splendor, craque 7000 dollars pour l’achat de la copie, rediffusée en 2017.

Pour le film, on vous laissera juger ; quant à la B.O., signée Tangerine Dream, elle suffit à elle seule à se replonger dans ces eighties fantasmées telles qu’on les entendait dans les génériques d’époque. C’est éminemment synthétique, et finalement plus mystérieux que planant (adjectif fréquemment accolé à Tangerine Dream comme une casserole). Composée par Edgar Froese et Paul Haslinger dans la « période Melrose » du projet à multiples incarnations, elle éloigne l’auditeur/spectateur des clichés sur Los Angeles, terre des rollers et des bimbos blondes bouffés par des aliens sur-bronzés, pour le transporter sur des terres étranges où un gros bouton rouge pourrait tout aussi bien allumer un synthé de Vangelis qu’une ogive nucléaire. Le reste appartient à l’histoire, mais toujours est-il que Miracle Mile, la B.O., annonce à sa manière les nappes flippantes de Twin Peaks, diffusé deux ans plus tard.

Tangerine Dream // Miracle Mile // Réédition chez Fire Records, sortie le 15 juin 2018
http://www.firerecords.com/product/tangerine-dream-miracle-mile/

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