Le son le plus à la mode en ce moment? Le psyché, et chaque ville veut son festival. Paris inaugure le sien cet été avec The Soft Moon en tête d'affiche... Un festival qui a germé dans la tête de deux ambitieux qui voient tout en triple.

Le psyché, c’est subjectif

L’affiche a vraiment de la gueule : The Soft Moon, The KVB, Zombie Zombie, Wall Of Death… L’usage voudrait que l’on s’arrête sur ces groupes qui portent le futur festival parisien de psyché, plutôt que de s’attarder sur ceux qui sont responsables de leur venue. Emmerdons ces tropismes de rubricards. Tom et Michael, 23 et 24 ans, ont mis leur projet à exécution avec l’inconscience et le culot propres à leur âge. Parce que des festivals psyché, il en existe déjà, et de plus en plus : le mythique psych fest d’Austin, celui de Liverpool, de Berlin, le « Levitation » d’Angers… Le nom donné au parisien laisse imaginer l’ambition qui anime les deux cerveaux de la très sérieuse opération « Ramener Paris Sur La Carte Du Psyché ». Un an que ces deux jeunes biberonnés au Brian Jonestown Massacre organisent des soirées éléctro avec leur collectif Refraktion. Un an, et aujourd’hui, ils sont à la tête de la logistique d’un des festivals les plus excitants de l’été, le PIFPM. Are you experienced?

Une rumeur traîne en ce moment. Elle dit qu’un groupe qui joue à Angers n’a pas le droit de jouer à Paris, et vice versa…C’est la guerre entre vous ?

Michael : Déjà, notre festival a lieu en juillet et celui d’Angers en septembre. Donc les gros groupes qui viennent à l’un ne peuvent pas forcément revenir pour l’autre, ça me paraît normal. Ce n’est pas une question de concurrence. On est bien sûr hyper fans de ce que font les gens d’Austin, ils ont été les premiers.

Tom : Je pense qu’ils ont créé un truc énorme et se sont fait un peu dépasser. Tout le monde veut prendre l’appellation de ville psych fest. Je crois que ces rumeurs sont dues au fait qu’on n’est pas de l’équipe d’Austin et d’Angers, donc peut-être qu’ils trouvent qu’on manque de légitimité. Sauf qu’on a eu l’initiative.

De plus en plus de festivals de psyché se montent en Europe. Vous n’avez pas peur que ça disperse les foules au lieu de créer un rendez-vous où convergent des milliers de personnes?

Michael : Non, parce qu’il y a aussi beaucoup de groupes de psyché qui se forment en ce moment et de plus en plus de fans de cette musique. La demande est partout.

Tom : Ça donne à chaque ville sa propre place sur la carte du psyché, une culture qui n’était pas mise en avant ici.

PIFPM mich et tom

Qu’est ce qui vous distingue des autres ?

Michael : The Soft Moon, notre tête d’affiche. C’est un groupe qui ne fait aucun psych fest cette année. Et puis, on y met notre touche ; on essaie de mettre une esthétique parisienne dans tout ça.

Tom : On n’est pas « revival » ou Austin Psych Fest à La Machine. Il y aura aussi de la musique électro ou techno expérimentale, spatiale, lente… On a essayé d’assembler plein de genres.

Qu’est-ce que vous entendez par « une esthétique parisienne » ?

Tom : On donne carte blanche au label parisien IN PARADISUM pendant une nuit, on fait jouer le groupe français Wall Of Death, l’ensemble des collectifs et des webzines qui ont fait cette culture et qui sont pour la plupart à Paris (dont vous) viendront mixer dans un espace qui leur sera dédié (« Le Bar à Bulle »)… Mais le rapport à Paris, c’est surtout la salle mythique que représente La Machine.

Comment vous avez convaincu les gros groupes étrangers de venir chez vous, alors qu’Angers existe déjà (avec la caution d’Austin) et que vous, personne ne vous connait ?

Michael : Ça s’est passé facilement. Les premiers qu’on a booké, c’était Soft Moon. Ils n’avaient pas joué depuis un an à Paris. On leur a fait une offre financière qui ne se refuse pas. Du genre ? Du genre des chiffres qui ne se disent pas. Et bref, une fois qu’on les a eu, tout a été plus simple !

Tom : On est d’abord partis chercher tous les gros, pour voir ce qui nous resterait après dans le budget.

On n’est pas « Rock en Seine », on a cinq bénévoles par jour !

Justement, parlons gros sous. Ça coûte combien de monter un festival de ce type ?

Michael : On a un deal de coproduction et coréalisation avec La Machine. Eux amènent la salle et l’équipe, nous, le plateau artistique. Le budget artistique tourne autour de 20 000 euros.

Tom : C’est conséquent mais pas non plus mirobolant. On est un festival à petite échelle. On attend 5000 personnes sur les trois jours. On n’est pas « Rock en Seine », on a cinq bénévoles par jour !

Est-ce qu’on va retrouver les traditionnelles esthétiques et scénographies qui remontent aux sixties, avec un écran en fond de scène projetant des images de drogues qui circulent dans les veines etc… ?

Michael : C’est exactement ce qui va se passer ! On a deux artistes qui nous ont eux-mêmes contactés, et qui étaient là dans les seventies. Ils feront des projections artistiques pendant le festival. Ils ont vraiment des trucs d’époques et je crois que ce sont les deux seules personnes en France à faire ça.

Ça fait un peu reconstitution, je croyais que vous vouliez apporter un nouveau souffle ?

Michael : On mixe l’ancien et le nouveau. Aujourd’hui, c’est plus la même culture du tout. Avant, les gens qui écoutaient ça c’était pour beaucoup des hippies, aujourd’hui ça s’est ouvert à un public bien plus grand.

Parlez-nous du OFF, il y a beaucoup d’événements en parallèle des concerts programmés.

Michael : On voulait vraiment donner une place aussi centrale à l’art qu’à la musique. Le OFF prend ça en charge. Une exposition sur l’art psychédélique aura lieu à la Bellevilloise, avec un accrochage de peintures, des projections, des performances…on essaie de réunir tous les médias artistiques autour de l’art psyché. Des artistes contemporains d’un peu partout y participent. C’est une approche très importante. Dans notre conception de cette culture, c’est évident que l’art a toujours été d’importance égale à la musique.

On rêve tous de créer son affiche idéale, comment on passe à la réalité ?

Michael : On est allés voir les gens de La Machine, en leur parlant de ce projet qu’on avait depuis longtemps (Michael a intégré l’équipe de programmation de la salle depuis quelques mois, NDLR). On leur a dit qu’on savait comment le mettre en place et ils ont été partants tout de suite. Ils nous aidé à rencontrer les bonnes personnes et depuis, on a pris notre envol. Quand t’as notre âge et notre courte expérience, trouver des gens qui te font confiance pour te laisser les clés de leur endroit sur trois jours, c’est pas rien !

Tom : D’autant plus que si tu regardes bien, TOUS les groupes de psyché passent à Paris en ce moment donc c’était pas gagné. Ça a commencé avec la tournée du Brian Jonestown et ça finit avec les Oh Sees qui font la fermeture de Rock en Seine. T’as TY Segall à la Villette Sonique, les Black Lips au Nouveau Casino…

Les Black Lips ? C’est pas vraiment de la musique psyché ça…

Michael : Mais si ! C’est hyper subjectif. Ils ont joué à un psych fest il y a deux ans environ…C’est hyper intéressant, les frontières sont tellement floues sur ce genre que tu peux jouer avec.

Ok, donc si chacun a sa définition du psyché, quelle est la vôtre ?

Tom : Pour moi, c’est une musique à la démarche expérimentale et qui génère une sorte d’introspection de la part du public. C’est quelque chose de très physique.

Michael : C’est vraiment large et du coup, quand tu fais une programmation sur la base d’un tel spectre, c’est passionnant.

Et la question qui fâche : puisque vous êtes peu expérimentés, ça ne vous angoisse pas un peu d’avoir à gérer tous ces groupes ?

Tom : Les Soft Moon seront peut-être chauds à gérer mais bon… Au moins, ils vont pas se retrouver à Saint Cloud ou à la Courneuve dans des préfabriqués à se dire « putain qu’est-ce qu’on se fait chier ». On a déjà organisé des événements à La Machine et l’équipe est vraiment chaleureuse, l’artiste est hyper bien reçu et passe toujours un bon moment. On va au resto à côté, et c’est vraiment la carte postale, pas une tente avec des couverts en plastique. Tu fais aussi la réputation d’un festival à travers ça. On mise beaucoup sur le fait qu’ils dorment bien, qu’ils mangent bien, qu’ils commencent à l’heure, bref, qu’ils veuillent revenir et fassent passer le message aux autres groupes.

Michael : Pour le public aussi, on voit qu’il y a pas mal d’étrangers qui achètent des billets et pareil, on veut qu’ils reviennent.

PIFPM // 4,5,6 juillet 2014 // La Machine du Moulin Rouge
Event Facebook 
: https://www.facebook.com/events/265614306938153/?fref=ts

Préventes Digitick : http://www.digitick.com/paris-international-festival-of-psychedelic-music-concert-la-machine-du-moulin-rouge-du-04-au-06-juillet-2014-css4-digitick-pg101-ri2206114.html

PIFPM AFFICHE LOGO

 

 

 

 

 

11 commentaires

  1. L’affiche n’est pas à la hauteur du « PARIS INTERNATIONAL FESTIVAL », c’est limite arrogant – j’en attendais pas moins d’un festival parisien….Mais bref, mélanger de la techno, musique expérimentale etc, tout ça va finir par n’avoir plus aucun sens. Quand tt ces hipsters auront pris tout ce qu’il y avait à prendre, la culture psychédélique finira totalement galvaudé par trop d’amalgame, de mélange, et la techno viendra encore finir le boulot. Alors oui, le Psych Fest d’Angers a une VRAI légitimité, pour plusieurs raisons – comme le jumelage d’Austin et Angers et de nombreux échanges culturels entre les deux villes – Faire un festival psyché deux mois avant celui d’une ville qui se trouve à 1h30 de train…..c’est presque….arriviste.

  2. Ils ont l’air plutôt sympa les organisateurs.
    En tout cas ils ont l’air assez doué pour trouver des sponsors.
    Bonne chance à eux pour leur festival.

  3. « une musique à la démarche expérimentale et qui génère une sorte d’introspection ». C’est une définition qui se défend, oui. Si on s’en tient strictement à l’étymologie, ça donne : « qui révèle l’âme ». Ne pas oublier que le terme psychédélique a d’abord désigné une certaine catégorie de psychoactifs. Il est né de la discussion entre Aldous Huxley et le psychiatre anglais Humphry Osmond, qui cherchaient un terme pour désigner ces drogues marrantes qui déployaient la conscience dans toutes les directions. C’était le milieu des années 50, le rock n’existait qu’à l’état d’embryon. De nos jours, une énorme partie des groupes et des artistes de musique de jeunes peut se prévaloir de cette culture, alors même que certains n’ont jamais testé ni champis, ni buvards. C’est juste qu’un nouveau langage musical est apparu et qu’il s’est propagé dans tout le spectre de la musique pop. Pour moi, la techno est une musique foncièrement psychédélique, et même un groupe comme The Cure doit énormément à l’héritage psyché, hendrix et pink floyd notamment. Sans parler de The Glove ! Donc Soft Moon, groupe à influences psychédéliques, oui certainement. Mais s’arrêter à cette constatation, c’est faire preuve d’un manque certain de recul et de réflexion, qui peut amener à dire des conneries du style « ouai les black lips c’est un groupe psyché la preuve ils ont fait le austin psych fest et de toute façon c’est hyper subjectif ». Les black lips, un groupe génial, j’en conviens. Mais un groupe qui adopte « une démarche expérimentale qui génère l’introspection »? Putain non. Non non et non. Sonic Boom, des Spacemen 3, a dit un jour en interview que le plus grand groupe psychédélique des années 60, celui qui avait le mieux compris l’essence de ce terme et de sa possible transposition en ondes sonores, c’était Red Krayola. The Parable of Arable Land, c’est l’album psyché ultime. A mon avis aujourd’hui c’est cette voie là qu’il faut explorer, le « free form freakout », une musique d’explorateur de l’inconscient qui t’arrache à ton environnement pour te projeter très loin dans l’espace. Une voie sans compromis donc, et non pas ce psychédélisme dillué qui imprègne 90% de la production pop actuelle, jusqu’à Alizée ou Mika !! Mais c’est clair que c’est pas d’une piste verte que je parle là, et ça risque de déboussoler un peu les ados. N’empêche. Toujours aller de l’avant ! Dans le genre le festival IAO au CAPC à Bordeaux était un peu plus convainquant ! Et c’est pas parce que j’y ai joué que je dis ça. Il y avait les skaters putain ! Et les Télescopes en version duo désertique lunaire. Et des projections qui en jetaient un max. Voila. Malgré tout, c’est cool de voir deux petits jeunes monter un projet et le mener à bien. Vraiment cool.

Répondre à Olivier Vilain via Facebook Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*
*

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

partages