Le principe de la pyramide inversée est l’une de règles essentielles du journalisme. Le principe : savoir aller droit au but puis dérouler le tapis sur les détails. Pour résumer : commencer par la fin de l’histoire, c’est souvent mieux. Appliquée au deuxième album des Anglais de Palma Violets, cette règle aboutirait donc à l'introduction suivante : « Danger in the club » est un disque fini à la bière régurgitée et l’avenir de ces working class zero se situe davantage derrière le comptoir d’un Pub que sur le devant de scène.

palma_violets_danger_in_the_clubVous allez me dire que cette sentence n’est pas très constructive et que l’argument est bien pauvre. Et que ce disque provenant de la « perfide Albion » – comme disent les derniers critiques rock à s’être fait dans leurs jean slim en découvrant la protubérance mongoloïde nommée Libertines au début des années 2000 – s’inscrit à la suite d’une longue série d’albums qu’on n’écoute plus que la plus grande indifférence. Interrogation surprise : que s’est-il passé en Angleterre au rayon rock ces dix dernières années, et qu’en retiendra-t-on dans les livres d’Histoire ? Vous avez dix minutes.

The Kooks, Kaiser Chiefs, The Rakes (que sont-ils devenus ?), Royal Blood ainsi que tous les pseudo groupes pâlichons de Carl Barat et son orchestre en Marcel ont tous en commun de relivrer un plat réchauffé au micro-onde, des mélodies mille fois entendues ainsi qu’un sous-genre musical devenu encore plus codifié que de ne l’est la variété française – un comble. Ce « Danger in the club » (il y a quand même de quoi se taper les mains sur les cuisses tant « Panique à la bibliothèque » semblerait plus adapté) confirme dès la première écoute l’aversion profonde pour ce qu’est devenue malgré elle l’Angleterre jadis décrite comme la terre promise. Chant d’hoo-hoo-hooligans perdus dans une réunion d’alcooliques anonymes, guitares grattouillées comme des ukulélés branchées sur la prise du fer à repasser, chansons qui n’en sont pas, refrains pour les groupies dépressives du genre à encore coller des posters à la Patafix dans leurs chambres à presque 25 ans, rien ne nous sera épargné. Hormis peut-être le fait de pouvoir se délecter des quelques perles enfilées par la presse sur ce groupe « flamboyant » qui peine surtout à cacher sa calvitie précoce avec des coupes de cheveux de quadra comptables.

Petit Pearl Harbor électrique où il est surtout question de rébellion adolescente teintée de vacuité banlieusarde (« maman me laissera-t-elle sortir samedi soir jusqu’ 23H00 ? », « la pinte est-elle moins chère avant 18h00 à Camden Town ? », tels sont les grands questionnements de ce groupe en croisade dixit les Inrocks), ce deuxième disque, comme le premier qu’on n’avait écouté qu’à travers la pochette, enfonce une porte ouverte par des rockeurs courant d’air (mais sans la chanson) à l’image d’une génération qui ne sait plus trop en qui croire. Faut-il réécouter les vieux Smiths au risque de devenir chiant comme votre voisin de bureau, ou se laisser tenter par des jeunes clones insipides pour qui la dernière grande révolution consiste à se taillader le bout des doigts avec une épingle à nourrice ? Et d’ailleurs, à qui s’adresse « Danger in the Club » ? Qui sont ces gens ? Quels sont leurs réseaux ? Mangent-ils cinq fruits et légumes par jour ? Sont-ce eux les crash test dummies trépanés qui remplissent les premiers rangs de ces concerts statiques où les seuls bras qui bougent mollement le font pour immortaliser ces rockeurs vitreux sur leurs smartphones dernier cri ? Est-ce donc CA le rock anglais contemporain ? Ne devrait-on finalement pas avoir plus de respect pour les low class qui prennent le sub’ à 5h du matin pour aller nettoyer du carrelage que pour ces sous-fifres bourgeois payés par la ménagère de moins de 30 ans pour polluer les ondes, les festivals et autres rubriques de magazines qui vous tombent des mains ?

Y’a des jours comme ça, on se dit que le prix du billet Eurostar est de toute façon trop cher pour tenter l’aventure au pays des endimanchés. En relisant ce papier, j’ai voulu donner une seconde chance à ce disque enregistré dans un sanibroyeur. En vain : « Vous avez atteint la limite de connexion avec cette adresse courriel ». Comme quoi des fois, pyramide inversée ou pas, l’histoire se quand même finit bien. Parce qu’il n’y en a pas.

Palma Violets // Danger in the club // Rough Trade
http://www.palmaviolets.co.uk/

2 commentaires

  1. Le chanteur des Rakes a tourné informaticien.
    Le net a détruit l’ignorance et l’adolescence propre au rock anglais et à son public,donc Donohoe est passé chez l’ennemi plutôt que d’être tué.

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