En ne sachant pas quoi dire de Mamiedaragon, il s'est, semble-t-il, avéré qu'on en avait dit beaucoup. Le type vient de lancer son label et son fanzine. C'est important de faire le suivi, parce que si on est toujours dans le minuscule-mais-genial, la compilation qu'il sort mérite la plus grande attention.

0004823990_10Inutile de vous dire que je n’ai toujours pas décroché de cette foutue lubie qu’est Mamiedaragon. La production de ce garçon me fait toujours aussi chaud au cœur. Mais cette fois ci, l’artiste passe un cap dépassant son statut pour devenir curateur-metteur en son. Ou plus, sonorisateur du réel. Ne revenez pas à l’accueil, je vous explique.

De quoi parlons nous ? Du nano-label qu’il vient de lancer sous le nom de No Lagos Musique. Sa première sortie est une compilation cassette, versant sonore d’un Fanzine livré avec dont je vous propose quelques extraits de l’édito : « On est enfermé dans l’Etap Hotel en flamme sur une aire d’autoroute qui nous fait office de planète », « je voudrais qu’on me parle de toutes petites choses […] qui sont les plus violent(e)s puisque c’est avec (elles) qu’on tisse la trame des jours, de jours et de jours de haine rentrée et d’humiliation qui a la fin font une vie entière », tout ça pour conclure qu’il ressent « de plus en plus fortement le besoin de regarder et de faire des trucs »*. Dont acte avec la fondation de cette non-structure.

Il m’a envoyé un mail annonçant la mise en ligne de cette première compilation, découpée en tranche de plus de 10 minutes sur bandcamp, et je l’ai convoqué le soir même pour qu’il m’en livre une copie. J’ai évidemment passé ma journée à la jouer en boucle. Je commence donc à être en mesure de vous en parler.

Deux points clés pour l’aborder : il s’agit d’un objet créé sans autre prétention que de satisfaire quelques dérangés de mon acabit. Ensuite, celui d’envoyer bouler les codes de la production discographique pour poser sur bande une œuvre globale qui n’a plus grand chose à voir avec la « compilation ». Explorons.

Dans cette cassette – faite à la main, évidemment – on trouve, pêle-mêle, des enregistrements de « Camion convoi spécial », « Rue de Saint Ouen » et des bootlegs de concerts de groupes captés avec son enregistreur, généralement aux Instants Chavirés. Et même en l’ayant pratiqué, il est impossible de définir clairement la frontière entre un morceau de Terrine (musique) et ce qui est le rip de la vidéo « Apache Helicopter Shreds Snipers in Iraq ». Et c’est là tout l’intérêt de la pièce qu’il propose : il ne rassemble pas de la musique mais fixe sur bande sa vision du monde, de la joie des concerts à ces « toutes petites choses » qui composent une vie, d’une divagation sur Youtube aux bruits qu’il entend à longueur de journée.

Il nous plonge au cœur même de sa réalité à travers des fragments de vie. Il dépasse à nouveau le cadre musical mais cette fois-ci pour l’élargir. Car tout ceci forme un grand tout qui s’écoute avec un plaisir non contenu pour quiconque aime la musique bruitiste, industrielle et, ici plus que jamais, concrète. Ça file, c’est hypnotique, traumatisant et intime. Et ça rend très optimiste.

Ce collage sonore est passionnant car ça a la forme d’un héritage. C’est la mémoire audio d’une période courte dans la vie de ce type, explicite, frontale et passionnante dans la fluidité avec laquelle elle est amenée. Est proposé sur la pochette un tracklisting illisible et tant mieux . Une seule chose transparaît : l’âme du curateur. Les morceaux n’ont finalement que peu d’importance en eux-mêmes. Aujourd’hui, en avril 2015, c’est précisément ce que l’auditeur las que je suis a envie d’écouter.

*A noter : le fanzine, comme son versant audio, est un réjouissant récit de concerts, d’impressions et d’instantanés. Les citations ont été choisies ici pour leur sensationnalisme, m’évitant de devoir recourir à des punchlines ratées pour vous intéresser.

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