Dans la vie, Tarek Wegner, Dan ‘Lee’ Blackwell et James Traeger aiment deux choses : les fantômes et les explosions. Obnubilés par les images fantasmées de nuages psychédéliques envahissant le ciel et courbant la perception du temps, les trois apprentis chamanes déchristianisent le rock nord américain à grands renforts de reverb, de delays, de Fuzz, de disto et de Wah Wah. Et le nom de ce délire opiacé se nomme « Sonic Bloom ».

Il n’y a rien de plus barbant que de devoir pondre un truc sur un disque lorsque la musique du susdit appelle à tout sauf à la rigueur. Pour être honnête avec vous, je n’écoute plus vraiment de rock depuis quelques années : déçue par la binaire monotonie d’une musique devenue trop consensuelle pour rester honnêtement subversive, je dédie aujourd’hui mes amours à des choses plus électroniques. Ce qui n’empêche pas que je sais reconnaître un bon album de rock quand j’en entends un. Et ce « Sonic Bloom » messieurs dames, à l’heure où les Black Keys se complaisent dans une mnémonique dégoulinante d’autosuffisance (voir leur dernier morceau, Fever), est un putain de bon album de rock. C’est le deuxième essaie de leur carrière, et les Night Beats assènent une claque à tous les présomptueux.

Soulignons que depuis leur premier « H Bomb EP » en 2010, les pirates de Seattle ne lâchent pas leurs pédales du vaisseau garage d’outre-Atlantique. Forts du succès de leur premier album éponyme et de quelques EPs dont le démoniaque « Split » avec leurs potes de The UFO Club, ils persistent dans le voodoo trip avec « Sonic Bloom », sorti sur le label de l’Austin Psych Festival. Après quatre ans passés sur la route et dans les salles obscures peuplées de zinzins dopés au psychotropes, les enfants sauvages ont pris un peu de plomb dans la cervelle. Coup de boule dans les valseuses.

night beats cover
Surfant sans cesse sur la reverb de leur Fender Mustang avec une facilité désarmante, ces disciples des Black Angels savent ancrer leur musique dans les profondes racines du Midwest ; ils empruntent aujourd’hui plus volontiers au jazz et au blues qu’au noise bâtard des débuts. Et la participation de Mike Ni au sax’ sur At The Gates fait immédiatement penser aux performances de Steve Mackay sur le tonitruant Fun House de l’Iguane. Toutes proportions gardées bien sûr, il ne s’agit pas d’élever des sales gosses au rang de maître à penser. Non. Cette affaire, c’est plutôt un truc intemporel, un objet sonore fabriqué avec les tripes et jeté à la face de quidams en mal de sensations fortes. On regrettera quand même la mauvaise influence des Black Lips, avec qui Night Beats a eu l’occasion de faire moult conneries – le chanteur et guitariste Dan ‘Lee’ Blackwell a monté le groupe Night Sun avec Cole Alexander et Joe Bradley il y a deux ou trois ans. Ça et là, les impudents aux lèvres noires ont distillé dans le crâne de Night Beats des intentions pop qui rendent le trip d’Alice au Pays du Désert un poil trop sucré (Real Change, Playing Dead). Qu’à cela ne tienne, ces Américains charrient tout de même autant de talent qu’un Anton Newcombe et un Frank Zappa en goguette. Ca n’invente rien mais ça fait du bruit, c’est ce qu’on appelle un boom sonique.

Night Beats // Sonic Bloom // The Reverberation Appreciation Society
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