Il y a 6 ans, Olivier, Aude et Bertrand arrivent vainqueurs d'un grand marathon de 3 jours de concerts parisiens. À l’issue de cette course folle du décibel rock, les trois compères constatent que beaucoup de ces groupes ne sont pas signés et décident de monter leur label. Conscients qu’il n’y a pas vraiment de bifteck à se faire, ils foncent quand même et entament l’aventure des Disques Steak. Quelle cuisson ? Saignant, évidemment.

Les Disques Steak ont cette particularité de signer des groupes confidentiels dont les membres ont des side project archi connus, pour qui goûte un peu de rock garage ces dernières années. Des groupes comme The Meatards (décidément, les végétariens peuvent circuler) dont le leader n’est autre qu’Arthur des Jc Satàn, ou encore le duo Shake Shake Bolino, dont le guitariste/chanteur est membre du groupe Cheveu; tous font partie de la famille Steak. Histoire et mode d’emploi d’un label fondé avec trois sous en poche, des oreilles à l’affût et de bons copains.

Depuis quand existe les Disques Steak ?

On a créé le label au printemps 2008 et le 1er 7’’ est sorti en septembre 2008, c’était le Bosom Divine, des amis rigolos depuis des années.

À quel moment avez-vous décidé de créer votre label et quel a été l’élément déclencheur?

Alors c’est drôle, mais tout ça vient d’une anecdote, comme vous le verrez on aime beaucoup les anecdotes et ça nous aide beaucoup dans la vie de tous les jours. On a décidé ça lors d’un des évènements musico-sportif majeurs des dernières années sur Paris, enfin de notre point de vue. C’était le Maorathon en juin 2008. Un groupe de potes nommé « MAO » (pour l’accès au marché chinois selon eux), a organisé une semaine de concerts dans les bars du quartier Belleville, un chaque soir et apothéose finale le lundi soir à la Mécanique Ondulatoire avec entrée gratuite de remise des médailles pour ceux qui se seraient tapés les 6 concerts précédents. On a été les seuls à supporter et on a donc gagné. Ça a été une semaine très drôle et très fatigante avec plein de groupes anecdotiques (ou pas) qui se sont agrégés pour des premières parties etc. On s’est dit qu’on devrait créer un label pour sortir un 7 du groupe MAO, voilà comment ça a été décidé. Ça a été l’occasion du premier concert de l’ensemble Shake Shake Bolino (dont le guitariste/chanteur est un des membres de Cheveu, ndlr), un groupe phare du label. Ce qui est drôle c’est que le 7 de MAO n’est jamais sorti car ils n’ont jamais été contents du résultat, c’est pourquoi la ref STEAK2 n’existe pas au catalogue, si ça intéresse quelqu’un… Bon, au-delà de l’anecdote, il y avait aussi la fréquentation de gens sympas, des labels comme Royal Records, SDZ ou Killed by an axe qui nous ont bien aiguillés et nous ont expliqué plein de trucs, notamment la vitesse des disques. Là, on s’est dit qu’on devait pouvoir y arriver et que ça nous rendrait plus crédibles et cools dans la vie en général.

Pourquoi avoir choisi ce nom, « Disques Steak », une anecdote ?

Ben on a un ami dont le surnom est Steak et qui sait se servir de Photoshop, comme il est sympa, on a pris son nom. Une sorte d’hommage. Sa copine s’appelle Flow, du coup, y a un label Les Disques Flow qui existe. C’est notamment eux qui ont sorti de l’anonymat l’excellent groupe Pierre et Bastien.

Comment fonctionnez-vous : les groupes vous sollicitent ou vous allez les chercher?

Alors rien d’original, on est sollicités par pas mal de groupes, en majorité qu’on ne connait pas et qu’on a jamais vu. La même chose que pour beaucoup de labels j’imagine. On a quand même une préférence pour des groupes qu’on connaît et qu’on apprécie humainement et musicalement depuis des années comme les orchestres d’amis, les Bosom Divine ou Shake Shake Bobino. Du coup, c’est vrai qu’on est plus à solliciter des groupes et aller les chercher. C’est comme ça qu’on a contacté Al Foul qui vit dans son saloon du désert de l’Arizona avec son jukebox et ses flingues. C’est la personne la plus adorable et admirable de tous les groupes qu’on a pu sortir. Il n’avait jamais sorti de 7, nous on l’avait découvert 4 ans auparavant par hasard à Paris pour un superbe concert, ou bien Kelley Stoltz et André Ethier (ancien chanteur du meilleur groupe du monde les Deadly Snakes) qui n’étaient pas trop connu en France et qu’on appréciait bien. Pareil pour le groupe Tyvek, qu’on avait rencontré aux USA et qui sont des bons potes de nos amis du groupe Cheveu. Ceci dit, on écoute tout ce qu’on nous envoie. On bosse aussi en étroite collaboration avec SDZ Records dont on partage l’état d’esprit, on a d’ailleurs sorti le LP des Bellas ensemble.

 

Vous êtes à Paris et à Bordeaux. Ça vous permet de vous partager les deux scènes pour découvrir des groupes?

C’est vrai qu’on a pas mal sorti de groupes de Bordeaux (Meatards, Hello Sunshine, Destination Lonely ou KissKiss karaté passion) ou parisiens (Bosom Divine, Pupils, Shake Shake Bolino, Bobpopkiller etc), mais pas forcément après une étude poussée des « scènes » locales. D’ailleurs je ne sais pas trop ce que ça signifie le concept de scène. Sauf qu’à Bordeaux, ils sont un peu tous side project les uns des autres, ce qui peut donner des résultats intéressants. On a aussi pas mal de sorties US ou Canada.

Quelle est la ligne directrice du label?

Comme on a une vision très modeste du label, on ne se lance pas dans plein de projets en même temps, ni des plans impossibles. Mais on n’est pas forcément à la recherche du scoop ou du méga plan qui fera qu’on parlera de nous et qu’on nous sollicitera pour des compils. On aime bien les groupes qui n’ont pas grand-chose à prouver, sans opportunisme. Les groupes pour qui sortir un disque est une expérience sympa et partagée, pas de vie ou de mort. C’est donc souvent des disques de gens qu’on suit depuis longtemps, qu’on a toujours bien aimés. Comme pour Kelley Stoltz par exemple, qui est un champion de San Francisco et que personne ne connaissait en France où tout le monde ne parlait que des Oh Sees et de tous leurs side projects. Sa démarche à lui correspond bien à celle du label. C’est aussi le cas avec KissKiss Karaté passion, notre dernière sortie en 2013, un bon esprit, sans se mettre la pression.

« On a aussi un projet de piratage du service twitter pour le faire s’autodétruire. »

Quelles sont vos références majeures ?

En terme de démarche musicale de label, on suit de près et on aime beaucoup tout ce que fait « Moi j’connais records », ce sont les suisses de Mama Rosin. C’est très varié, toujours de bon goût, exigeant… ils ont de beaux produits, de beaux disques, de belles découvertes. Dans un très bon esprit. Y a les italiens de Wild Honey aussi qui font des trucs sympas.

Niveau musique, on a une base commune d’intérêt pour le rock dit garage ou des vieux trucs, que ça soit en blues, country ou world music. On aime bien le podcast reverberationradio par exemple, y a des gens très bien qui choisissent à notre place et c’est toujours agréable à écouter.

kisskiss

Vous êtes musiciens vous aussi?

Non, mais on a tous les trois tenté des trucs qui ne se sont pas révélées très intéressants. Comme on est très lucides, on a donc décidé d’arrêter le massacre. D’autres le feront très bien (ou pas) à notre place.

Quel est le prochain groupe que vous voudriez signer sur Les Disques Steak ?

On aime beaucoup les suisses de Mama Rosin, même s’ils font moins de cajun/zydeco ces derniers temps. Du coup on a un projet de disque avec eux depuis pas mal de temps, on va essayer de concrétiser ça cette année. Y a aussi d’autres projets très secrets. D’autres très ambitieux, comme l’organisation d’un évènement dit « la quadrature du carré », avec 4 groupes stars de Paris. L’affiche n’est pas évidente à monter pour des questions d’agenda des uns et des autres (comme ce sont des orchestres stars), du coup, ça traine. Mais on a l’obligation d’y arriver, et à quatre groupes. La quadrature du triangle, ça marche moins bien comme nom. Un disque promo très collector devrait sortir à cette occasion. On a aussi un projet de piratage du service twitter pour le faire s’autodétruire, avec SDZ records. Mais on est pas encore au point.

Vous vivez de cette activité ou vous faites autre chose en parallèle?

On a chacun des activités professionnelles très variées qui nous laisse le temps et l’esprit suffisamment disponible et ouvert pour se lancer dans des projets comme les Disques Steak.

Quels sont les éléments essentiels pour produire un disque réussi?

Ça dépend si on paie la TVA ou pas, mais je dirais environ 1000€ en poche + une adresse mail + un transpalette + savoir décrire le disque en plaçant les termes « side project », « circa », « think XXX meets YYY ». JB Wizzz de Born Bad m’a un jour donné la recette secrète du succès, alors qu’on buvait un jus d’orange frais face à la mer à Jaffa. Ça semblait limpide à cette époque, mais on a oublié depuis.

http://lesdisquessteak.bandcamp.com/

3 commentaires

  1. Voilà une expérience qui montre bien qu’avec un peu de curiosité on arrive à monter des projet sympas. Je n’ai personnellement pas compris pourquoi ils « ne sont pas musiciens » mais qu’ils ont gagné le marathon.

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