Citoyen du joli patelin de Nashville, Ron Gallo revient avec une nouvelle fournée : "Really Nice Guys", sorti le 18 janvier dernier sur New West Records. Mais là où "Heavy Meta" - sorti quant à lui en 2017 - crachait gaiement à la face des moeurs sociales américaines sur fond de rock’n roll énervé ; lui est un EP concept sur la jungle débile mais néanmoins passionnante qu’est l’industrie musicale. Jusqu’ici on peut sourire, mais c’est sûrement parce que vous n’avez pas encore effleuré le bouton Play.

Paru il y a quasiment un an, l’excellent « Heavy Meta » et la tournée qui s’en est suivie était une vraie mandale défonçant complètement les étiquettes de genre, avec un tracklisting nerveux qui empruntait quelques inspirations country, americana, punk et beaucoup au garage rock psychédélique des 60’s. « Really Nice Guys’ » reste dans la droite lignée du précédent album, avec d’évidents morceaux à texte, la musique en moins.

Rough Mix, le morceau d’ouverture frappe sournoisement en dessous de la ceinture et pas comme l’on aime (si tant est que vous aimiez ça). Cela se danse comme suit : trois mixages en moins de trois minutes, une prise iphone, une live au studio et une surproduite : c’est à dire la prise Kaaris sous crème whitening, dégueulant d’autotune.

Les breaks ont dû être re-enregistrés plusieurs fois car Dylan, le batteur, en bon professionnel, jouait trop bien.

Passons sur ce premier trait d’humour, Really Nice Guys, qui donne son titre à l’album, est selon les mots de l’artiste ‘’une chanson dédicacée à tous ces groupes qui sont meilleurs à être humains qu’à jouer de la musique’’, et relate donc, de fait, l’hypocrisie des auditeurs qui, affectés par leurs relations sentimentales vis à vis des artistes, n’arrivent plus à critiquer ouvertement un groupe vraiment mauvais (et il y a malheureusement beaucoup d’exemples en liberté). Afin d’imager leurs propos, la troupe ‘saccage’ intentionnellement l’écoute, tentant d’exorciser une piste passable en clamant qu’ils sont de ‘gentils garçons’. Les breaks ont dû être re-enregistrés plusieurs fois car Dylan, le batteur, en bon professionnel, jouait trop bien.

Quand on parle un minima anglais, l’EP, bourré de vannes (et de parenthèses vocales interminables) peut avoir un intérêt mais avec notre niveau A2 national, j’émets un doute sur le fait qu’il explose le Top 50. Même si a priori, et au regard de l’album, ce n’était pas le but. The East Nashville Kroger Conversation en est l’exemple, trois minutes de conversation qui résume une ‘private joke’ entre braves gens du sud des Etats-Unis, laissant le reste du monde, ces cons, hors course.

Le reste est un savant medley. De pistes en pistes, on exhume Minor Treat ou Simon & Garfunkel sans complexe, ni compassion pour l’auditeur. A l’image de Related Artists, charge punk de 56 secondes, parodiant l’angoisse (et la haine) de tout bon artiste en manque de reconnaissance.

L’ambiance s’adoucie immédiatement avec le morceau suivant, I’m On The Guestlist, qui se voit habillé d’une piste de tabla coulante version ‘Garage Band’, complètement assumée. Bien qu’elle soit un véritable pamphlet contre ces putains de casses couilles qui veulent rentrer gratis en concert, elle n’en reste pas moins une chanson merdique. Emotional Impact For Sale clôt le karaoké, et, est pour le coup un bon morceau. Tout y est, la mélodie, l’esprit, l’émotion, le message, bref c’est simple on croirait entendre les Beatles, ce qui est déjà un exploit en soi.

Youtubular sauve la mise et c’est le premier vrai et bon morceau où il n’y a, à priori pas de blagues particulières ni de bordel linguistique incompréhensible. Juste un bon jam inspiré de surf music qui rappelle certains grands moments du béni ‘Heavy Meta’. Il paraît qu’il y a quand même quatorze mélodies facilement reconnaissables, cachées tout au long du titre.

On l’aura compris tout ça n’était qu’une vaste blague sur tout ces connards, qu’il soient auditeurs, amateurs, sourds, journalistes, professionnels de l’industrie, poivrots, artistes etc etc. Néanmoins, n’arrêtez pas de croire en lui pour autant : Ron Gallo vient d’être programmé au prochain Levitation d’Austin, et ses lives ont toujours tendance à émasculer les groupes qui se prennent un peu trop au sérieux. Au moins une chose qu’on ne lui reprochera pas.

Ron Gallo // Really Nice Guys // New West Records
https://rongallo.bandcamp.com/album/really-nice-guys

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