Branleur mais jamais arrogant, hyper talentueux sans être génial, Biolay a fini par devenir une des cibles préférés des réseaux sociaux. Le voilà de retour avec "Hypertranquille", un clip à mater en mangeant des Springles.

Malgré quelques faits d’armes indiscutables, Biolay serait donc devenu l’homme à abattre. Lui qui a fait découvrir à Karl Bartos de Kraftwerk le rayon disques du palais de Tokyo. Lui encore qui a sorti des chefs-d’oeuvre domestiques comme « Négatif » ou « Trash yéyé ». Lui qui… (ok, on arrête). Inutile de s’égosiller. Avec 735 pouces levés et 386 pouces baissés, le nouveau clip du lyonnais sur sa chaîne officielle peine de toute façon à retourner les foules.

48H après sa sortie, il recueille donc seulement 65,57 % des voix Youtube mais le dépouillement (de Biolay, pas des voix) ne fait que commencer. Massacré sur Twitter, assassiné par des trolls surexcités ici ou là, Benji poursuit sa route. Avec sa définition de la classe et de l’élégance. Qui en vaut bien d’autres. Alors pourquoi ce bashing récurrent qui semble avoir atteint un pic avec cet Hypertranquille en forme de doigt d’honneur qui ne se dit pas ? Pour certains, le lyonnais fricoterait d’un peu trop près avec les codes de PNL, pour d’autres un manque évident de street credibility lui ôterait tout droit d’user de son flow sur des nappes vaporeuses. Pourtant, le rap le passionne et cela ne date pas d’hier. On en est là. Des années que ce statut de victime récurrente dure. Alors Biolay dégage tout le monde en mode kamikaze lounge dans ce clip aux faux airs de balade à la plage. Tentative de décryptage d’un objet segmentant.

0’01 » : Les mots Hyper et Tranquille sont dessinés dans le sable. Le message est clair : Benji se la coule douce et vous emmerde. Serein face à l’adversité.

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0’02 » : Voilà notre homme dans le soleil couchant. Sa tête est baignée dans la lumière, on la distingue à peine. Le roi soleil est donc de retour. Plage, bidonville ? On ne sait pas encore mais on piaffe déjà d’impatience.

0’04 » : Plan de coupe sur quelques plantes au milieu des dunes. Derrière, la marée semble basse. Message caché ? Métaphore ? Je ne crois pas, je décide donc de continuer comme si de rien n’était.

0’07 » : Rien à voir avec le matricule de James Bond mais voilà qu’un plan aérien montre que la maison de disques a mis un peu d’oseille sur la table pour faire le clip. Il fait beau. A flanc de falaise, devant une mer bleue comme du canard WC périmé, on devine une vieille ville. Pas de plage devant, mais des cailloux. Bigre, l’affaire se complique.

0’08 » : Pour marquer l’arrivée du chanteur dans le clip, deux beats retentissent. Le voilà en forme, plus en forme que jamais, vêtu d’un blouson de cuir bien coupé, d’une paire de lunettes de soleil assez classe (pas des Wayfarer ou des Clubmaster, quoi) et surtout, doté d’une coupe de cheveux rockabilly le rajeunissant d’au moins 10 ans. Le retour des bébés rockeurs ? Non. Musicalement, on en est à deux 8 secondes de nappes et deux beats, et ça commence à sentir le PNL. Continuons le combat.

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0’11 » : Le mystère s’épaissit. Pour vérifier les compétences de son stagiaire sur photoshop, le réalisateur du clip lui a demandé d’incruster dans la silhouette de Biolay les images de la vieille ville. Bien joué Callaghan, ça sent la préparation paiement à venir dans la suite du clip, ou je ne m’y connais pas.

0’14 » : Après deux plans de coupe (une ombre, un palmier) qui devaient être intégrés au cahier des charges pour que le clip fasse la bonne longueur au final, je comprends que la plage est située en bas de la ville. France urbaine contre France plagiste, encore une fois, deux France s’opposent. Benji, debout et seul sur cette plage miteuse sur laquelle je ne poserais personnellement pas une tong, va enfin pouvoir se lancer.

0’17 » : Le plan psychanalytique du clip ? Une vague efface les mots hyper et tranquille dans le sable. Le message se corse : ça va chier.

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0’21 » : Les 20 secondes sont dépassées et Benji ne semble pas décidé à parler. Les nappes se poursuivent. Et si c’était un inédit d’Orbital ou un nouveau tour de passe-passe d’un PNL pour sortir une face B ?

0’22 » : Tout de colère froide, il lance d’emblée un cinglant « Alors ouais je prends mon temps je le sais, mais j’ai vu la mort de trop près ». De son côté, le stagiaire remet ça avec son incrustation Falaise/Biolay. Un hommage déguisé au fils de Nick Cave ou une mauvaise manip, le mystère reste entier à ce stade. Pour les ellipses en tout cas, va falloir s’adresser à un autre guichet. Mais Benji a déjà posé les bases : Ken le survivant, c’est pas lui puisqu’il est assis pépère devant un arbre pour nous annoncer tout ça.

0’34 » : Biolay secoue la tête, remet ses lunettes en place, dodeline tranquillement mais une chose frappe : il fait la grève. Le playback ne passera pas par lui. Hors de question de se prêter à ce simulacre et de bouger la moindre lèvre dans ce clip.

0’39 » : Pour que tout le monde comprenne bien que Benjamin est centriste, le réalisateur lui demande de tourner la tête à gauche, puis à droite. Benjamin, easy, chante « Ni gauche, ni droite » au même moment. Le message est limpide. Sauf pour le stagiaire qui continue ses incrustations à la con. Ca sent la pause café qui a mal tourné ou la renégociation compliquée de convention de stage.

0’40 » : Dans la série « va falloir rentabiliser la location de l’hélicoptère, chef », voici le deuxième plan aérien sur la vieille ville. Inutile, mais suffisamment long et large pour se rendre compte que cette ville n’est pas Bry-sur-Marne. Damned, j’avais pourtant cru que…

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0’41 » : Comme pour se foutre de ma gueule, Benji m’annonce qu’il est « hypertranquille, dans la super grande ville ». Qu’il se calme, cette ville est un village par rapport à mon arrondissement.

0’45 » : La température baisse. Benji pourrait remonter la fermeture-éclair de sa petite veste en cuir cintrée mais le style n’y serait plus. Alors il croise les bras et remonte légèrement son col. L’école Burberry ?

0’47 » : Biolay me confirme qu’il est « hyperactif sur les plages textiles ». Non, le nudisme ne passera pas par lui, arrêtons de l’embêter avec ces conneries. Musicalement, le morceau est à mi-chemin entre du Day One et du PNL. C’est pas mal du tout mais le mystère demeure. Autant d’assurance de sa part risque d’énerver ses plus fidèles détracteurs. Je reprends un Springles.

0’48 » : Ca y est, on a la tête au fond du seau de champagne. En balançant nonchalamment un « Ca t’énerve, ça te met à cran », Benji balance l’air de rien un poing dans la gueule de ceux qui critiquent le moindre de ses faits et gestes. Bien fait pour vous, bande de mécréants.

0’56 » : En pleine plage, levant le doigt, Benjamin exhorte la foule absente.

1’05 » : Gros plan sur ses sneakers. Ô surprise, il ne s’agit ni de Stan Smith, ni de Superstar ou de Converse. Le gros fuck au système établi et aux moutons que nous sommes continue plus que jamais.

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1’07 » : Un épi dans les cheveux. Ca peut arriver. Mais avec un tel budget coiffure, c’est quand même dommage.

1’11 » : Benjamin écarte largement les bras. Mais ne bat pas des ailes. La faute à une leather jacket trop slimmée.

1’17 »: L’heure de l’hommage au king of pop a sonné. Le lyonnais se lance dans une tentative de moonwalk aussitôt avortée. La faute au sable et à ses sneakers de seconde zone. Décidémént quand ça veut pas…

1’19 » : Le stagiaire trouve que son incrustation de falaise fonctionne bien. Aveuglé par son enthousiasme, il double la mise et met deux Biolay à l’image.

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1’23 » : Je renonce à compter le nombre de fois où Benjamin baisse la tête, prenant un air triste pour regarder ses pieds. Il doit répéter pour le rôle d’Atlas.

1’27 » : « Je prends mon temps, relax, pieds nus dans l’Air Max ». Cohérent jusqu’au bout, notre poète runner refuse de porter des Adidas et cite Nike. Séquence placement de produit réussie.

1’35 » : Nouvelle tentative de battement d’ailes, et nouvel échec.

1’44 » : A force de jouer du blouson de cuir slim, l’inévitable se produit. Pris d’une démangeaison dans le cou, Benjamin se gratte.

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1’47 » : Main sur le coeur. Coeur avec rien du tout.

1’52 » : La pédagogie par la répétition. A celles et ceux qui n’auraient pas compris, Biolay rappelle que « alors ouais je prends mon temps ».

1’59 » : 44ème ralenti en deux minutes. On se croirait chez Terence Malick.

2’01 » : Face à la mer, il tente un salut nazi-inversé pour dire non au FN. A moins que ce ne soit ma fièvre qui monte à cause du Springles parfum bacon qui passe mal.

2’16 »: Etirements des bras à plusieurs reprises. Probablement un hommage à Rocky Balboa tapant dans des côtelettes saignantes. Ou alors un message codé pour les fans de Yelle ?

2’21 » : Va falloir virer le stagiaire. Quelqu’un peut s’en charger ?

2’23 » : J’entends le mot cardigan. Cardigan, bordel. N’en déplaise aux haters de PNL et de Phildar, ce morceau de Biolay commence à me fasciner.

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2’25 » : « J’ai gardé la mixtape ». La menace sans déguisement. Pour appuyer son propos, le lyonnais roule des épaules à la Tyson.

2’26 » : Dominant mais gentleman, le Brando des petits bouchons précise qu’il a néanmoins « effacé la sextape ».

2’29 » : le stagiaire incrustation se déchaîne comme jamais et nous rajoute une montagne sur les deux Biolay. Un possible fonds d’écran pour les fans de mangas.

2’31 » : Echauffé par tous ces mouvements, Benjamin essaye d’enlever sa leather jacket. A moins que ce ne soit pour mieux nous faire comprendre qu’il est « léger, comme peut l’être l’air des vacances ».

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2’41 » : Limpide, il nous avoue n’en avoir rien à foutre de ce qu’on en pense. Re-bim dans notre gueule, mais cordialement.

2’48 » : Le moment clef du clip. Benjamin tombe la veste. Ah non, il s’agit de ses lunettes de soleil.

2’59 » : Aussitôt retrouvées sans contacter les objets trouvés. Musicalement, on reste sur une tendance PNL débonnaire et relax. Entre force tranquille et ridicule absolu, difficile de choisir.

3’00 » : Quelques choeurs vaguement soul rejoignent l’affaire.

3’13 » : à 22 secondes du coup de sifflet final, on sent bien que Benjamin va tout donner. Finalement non, on a juste droit à une succession de plans sur notre James Dean national. Déception pour le final de ce feu d’artifice.

3’19 » : Assis, tête baissée, Benjamin vérifie que les lacets de ses sneakers sont bien faits. Ou se demande s’il ne s’est pas engagé dans un suicide commercial.

3’28 » Une incrustation discrète nous apprend que la boîte responsable de ce clip est Beat Bounce, société de production ayant déjà clippé Jul, Risda ou Gradur. CQFD

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9 commentaires

  1. Voilà, il fallait vraiment qu’un petit chanteur françé s’y mette pour me faire dire : le rap est mort. Quelle horreur…

  2. Ce n’est ni de l’art (mais de la variété) ni du cochon (Gainsbourg, dont Biolay se réclame, était bien plus crédible de ce côté-là). Juste une énième tentative de Biolay pour toucher un nouveau public (son dernier album s’essayait déjà, aïe, aux musiques latines…) et tâcher de rester dans le coup après avoir tout dit en deux ou trois disques mineurs, performance d’autant plus remarquable que cet auteur surévalué depuis des lustres (la faute à son époque) ne possède ni voix (Daho c’est La Callas à côté) ni réel talent de composition (une simple compile suffirait à cerner le mec). Biolay en mode auto-thune ? Lol.

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