Dans les années 90, à la remorque de la Dame de fer, la France interdisait à son tour les rave parties, ces rassemblements de jeunes délurés, collés aux murs d’enceintes, dansant jusqu’au petit matin. Devenus clandestins par la force des choses, quelques raveurs français s’inspiraient des collectifs britanniques comme Spiral Tribe et tentaient d’organiser la fête idéale, imprévue, gratuite, totalement libre. Les Free parties étaient nées et l’Etat, déjà inquiet des dérives des raves, voyait débouler cette contre-culture d’un œil ahuri. Traque systématique des fêtards, infiltration des teufs pour stopper tout ce joyeux monde, une « tribu » fait de la résistance en région parisienne, elle marquera l’époque : Heretik System. Un docu historique lui rend aujourd’hui ses hommages.

Heretik System, c’est avant tout une bande de potes qui veulent s’éclater. A moins de dix, ils mettent au point des soirées clandestines de quelques centaines de participants, dans des lieux désaffectés loin, très loin de la capitale (usines, hangars militaires, champs…). Souvent détectés par les RG, ils rusent et multiplient les coups d’éclat pour que les parties aient lieu. Comme ce jour où des flics s’amènent au point de rendez-vous, obligeant à la débottée les organisateurs et les centaines de bagnoles de teufeurs déjà sur place, à se relocaliser. S’ensuit un rodéo de plusieurs dizaines de kilomètres, les flics aux basques, pour enfin trouver un squat, poser le matos vite fait et lancer les festivités.

Forts de ces expériences, les Heretiks se font rapidement un nom parmi la clique des Free, mais les fiestas underground, au milieu de nulle part, ne leur suffisent plus. Dotés d’une minutie d’organisation hors du commun (malgré ou grâce aux kilos de dope qui circulent dans le groupe), ils décident de « cramer Paris », invitent les Free là où on les attend le moins, dans la capitale, au nez et à la barbe des policiers totalement dépassés. Premier coup, la gare de fret sous Bercy. Trois mille personnes battent le rappel. Succès absolu, mais pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? Leur coup de maître aura lieu en avril 2001. Pendant deux mois, ils préparent le terrain, font du repérage et le soir du 14, foutent littéralement le feu au XVIe arrondissement dans un lieu classé monument historique et abandonné, la piscine Molitor. 45000 watts, six mille personnes jusqu’à 11h du mat, pas d’incident, pas de dégradation, la free party idéale a enfin eu lieu !

Sorti début novembre, le DVD We had a dream réalisé par Damien Raclot-Dauliac, se propose de revisiter cette réussite à la française. Dix ans d’archives perso des Heretiks mêlées aux interviews des membres piliers et du flic des RG en charge du dossier à l’époque, éclairent cette utopie en marche : rendre la fête libre et gratuite. Dans un monde aujourd’hui totalement marchand, autant dire que cette période semble un âge d’or de la contestation pacifiste mais hautement politique.

Le documentaire se termine sur l’ultime fait de gloire des Heretiks, une soirée à l’Olympia. Les fameuses lettres rouges honorent pour une nuit les anciens parias. Fête fastueuse (danseuses, projections vidéo, performeurs…) et payante, cette dernière marche vers la reconnaissance résonne comme le chant du cygne d’une subversion assagie, laissant un léger goût amer… tout en mettant en relief une décennie bien morne, sorte de charnière entre la fin des idéaux (les années 80 et leurs promesses non tenues) et l’avènement du tout-spectacle (les années 2000). We had a dream nous rappelle simplement que c’était possible, que les utopies se réalisent quand on y croit. Comme une bouffée d’air frais dans le marasme ambiant et sans échappatoire, nous dit-on.

Heretik System // We had a dream // DVD + Compilation digitale
Realisation par Damien Raclot-Dauillac, sortie le 25 octobre 2010 partout et sur heretik.net

5 commentaires

  1. Ouais ouais…j’ai vu le doc, touchant, prenant, poignant voire palpitant (comiques interventions du RG) mais oui au final un peu nihiliste, genre le systeme les a niqués/ absorbés. Ou n’est-ce que du réalisme? Esperons que ceci inspire les kids (pas sûr d’y croire…°

  2. moi je dis bon doc sur se putain de sound system !!!!
    mais je te compren pas kapone quand tu dis genre le system les a niker bien sur ils ont etait victime de leur succes apres 2001 faire des teuf comme eux le faissait c’est devenu tres cho !!!! faire une teuf a 4000 ou 6000 pers comme eux sans otorisation c’est cho pour ne pas se faire sesir !!!!

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