Viscéral et cérébral : la transe krautrock d’Electric Electric ne laisse pas indemne. Avant d’écouter "III", leur nouvel album, vérifiez que vous avez bien enfilé votre casque.

On est déjà un paquet à l’avoir écrit et ce, depuis un moment : année après année, disque après disque (pas tous, évidemment), la France des studios d’enregistrement a de moins en moins à rougir de ce qui en sort, quel que soit le genre popularisé à l’origine par des gars causant en anglais. Mon préféré ? Celui du boucan. Plein d’angles droits et de fureur. Sur mon podium, le choc La Colonie de vacances, reçu un soir de novembre, voilà trois ans presque jour pour jour, quelque part au fin fond de Roubaix. Parmi les quatre groupes nous encerclant, il y avait Electric Electric. Sueur et déraison, tête qui tourne et collier d’acouphènes, émeute et watts sous la peau… Depuis, je n’avais pas pris de nouvelles. Et puis voilà que « III » est tombé dans la boîte mail.

Passée la joie de retrouver une partie des zigotos à l’origine de cette inoubliable nuit, la peur de la déception a tenté une incursion. C’est humain. C’était surtout stupide. Ce disque est formidable. Âpre et coupant, difficile d’accès, radical, brûlant parfois, cérébral et viscéral : un clou dans les oreilles et trois types avec un marteau.

Metal machine music. Pardonnez l’antienne, mais franchement, quand j’ai commencé à vraiment m’intéresser à la musique, il y a vingt ans, jamais je n’aurais cru possible de louer autant de trucs made in France, surtout chez les artisans du boucan. Avec leur troisième disque, les Strasbourgeois d’Electric Electric ont mis la barre très haut. Mais pas façon hardcore et six cordes en première ligne ; Bästard, les Thugs, Prohibition & Co avaient montré la voie dans les années quatre-vingt-dix, première pierre à l’édifice d’un rock français aux antipodes de Noir Désir. En 2016, il s’agit d’aller plus loin. Nos trois zouaves l’ont bien compris. Ici, tout est bon pour faire tourner la tête et refiler la nausée par les oreilles, apercevoir la lumière au bout d’un tunnel de boucles et recracher ses dents sous tant de morsures.

La minute description. Des machines, des claviers, une batterie, une guitare. Des textes, même, parfois. Du noir et blanc très dense. Des répétitions qui enflent. Des climats climax, des poussées de fièvre dans les algorithmes, la disto branchée dans les cheveux, l’air qui vient à manquer, la guerre toutes les quatre mesures, un concert de warnings, l’aiguille dans le rouge aussi longtemps qu’il le faudra, l’insupportable à ta porte, qui tape et tape encore, qui cherche à entrer, qui finira par y arriver, inédite catharsis et metal machine music à tous les étages.

Après l’écoute au casque, Electric Electric vient d’inventer l’écoute avec un casque.

Electric Electric // III // Murailles Music
http://www.muraillesmusic.com/disques/mm017/

En concert le 26 novembre au festival BB Mix et le 10 novembre à l’Autre Canal (Nancy) dans le cadre du festival Musiques Volantes

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