Plus que jamais d'actualité, un essai publié récemment chez Inculte rassemble journaux intimes et lettres d’adieux de neufs mass killers, dont les deux jeunes de la tuerie de Columbine. Une immersion brutale dans leurs façons de penser pour tenter de comprendre ce qui les motive.

Dans la tête des tueurs de masse sort dans une période où les attaques de masses sont devenues récurrentes à travers le monde. Même si pour de nombreuses d’entre elles, la religion peut être utilisée comme principale raison, elles traduisent toutes un même mal-être au sein de la société. « Les meurtriers de masse font le mal pour exister au moins une fois dans leur vie. C’est le point commun entre tous ces hommes. » C’est avec ces mots dans la préface que l’éditeur nous plonge dans leur intimité, raconté brut et sans arficices, avec à la lecture une sensation mêlée d’effroi et de pitié. Quand certains comme Eric Harris, l’un des tueurs de Columbine, semblent dérangés (« Je suis sûr que la plupart d’entre vous ne sont même pas capable de réfléchir autant, c’est la raison pour laquelle vous devez tous mourir ») d’autres sont calmes et dépités par l’ennui profond de leur vie, comme George Sodini (« Travailler, rentrer à la maison, manger, faire un truc, aller au lit tout seul et recommencer le même programme le lendemain. C’est le syndrome d’Auschwitz. »).

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Ce qui change dans ce livre, par opposition à tous les reportages à sensation, c’est le sentiment d’être enfin confronté à l’être humain à l’origine des massacres, et de réaliser à quel point son quotidien est merdique. Et de se dire qu’en fait, tout le monde a déjà – et sans aller aussi loin – ressenti ce qu’il peut vivre.

George Sodini : « 24 décembre 2008: Noël encore. pas de copine depuis 1984. Le dernier Noël avec Pam c’était en 1983. On se demande pourquoi. Je ne suis pas moche ou particulièrement bizarre. Pas de sexe non plus depuis 1990 (j’avais 29 ans).« 

Valery Fabrikant

Pour certains de ces tueurs, c’est l’humiliation continue par rapport à leur physique qui les torture, pour d’autres c’est le principe de concurrence, surtout aux États-Unis où la culture du winner fait rage. De là à penser qu’on a raté sa vie et que ne reste plus qu’à passer à l’acte, il n’y a qu’un pas. Le journal de Valery Fabrikant (ancien professeur en génie mécanique à l’université de Concordia à Montréal, responsable du meurtre de quatre de ses collègues) est différent des autres puisqu’il a été écrit en prison après son acte. Il déclare en préambule : « Si vous voulez que cesse le massacre, lorsque vous êtes témoins d’un abus, élevez votre voix en signe de protestation. Quand un jour une personne victime d’abus pète un plomb, vous pourriez être celle qui se fait tuer. »

Quelques-uns vont décrire une envie de faire mal, de tuer, mais toujours en se justifiant par la façon dont ils ont été traités. Les traces écrites traduisent un réel besoin d’être compris et les différents raisonnements apportent une explication claire aux tueries de masse, même s’il n’est pas question de pardon. Ce livre présente un nouvel angle d’accroche sur le phénomène, et comme on dit : mieux vaut prévenir que guérir.

Dans la tête des tueurs de masse // collectif // Inculte
https://www.amazon.fr/Dans-tête-tueurs-masse-mass-killers/dp/B072MPK2Y4

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