Toutes les semaines, la Gaîté Lyrique et Gonzaï vous proposent le double G, soit l'association de deux lettres au service d'une même cause: la découverte des plaisirs enfouis, entre un accent circonflexe et le tréma. Cette semaine dans notre point G, un peu de culture arty et anale avec la maison d'édition Sam Sufy. De l'éloge de la masturbation à la réhabilitation du bien-caguer, voilà leur menu non exhaustif garanti sans sulfites ajoutés.

En 2009 Marie Schnebelen et Vincent Marco se lancent dans la construction de leur Cabanon d’éditions, entre Langon et Captieux, plus exactement à Lerm-et-Musset. Sous forme de bandes dessinées ou de nouvelles illustrées, ce collectif aborde des thèmes cruciaux dont journalistes et politiques parlent peu mais qui sont pourtant au cœur des questions de société. D’ailleurs les membres de Sam Sufy cultivent un goût certain pour un vocabulaire à la fois cru et allégorique, un peu comme si Bukowski avait copulé avec Duchamp. Conservateurs et cons-serviteurs du capitalisme misanthrope, sagouins de prairie, armées bigotes, despotes apocalyptiques, chiens microbicides, encéphales au trône tirelire, lobotomiseurs archaïques, la prose des spécimens de Sam Sufy n’a rien de prosaïque. Vous pouvez rebrousser chemin ; eux ne retourneront pas leur veste.

Trash test

Edité chez ces freaks français, Le Savoir Faire parle donc d’une chose essentielle : la défécation. Ô qu’il est bon de parler de caca entre deux discussions pseudo intellectualisantes et profondément stériles ! Non qu’il me soit délectable d’imaginer une fille sur le trône, je pense que causer fiente, anus et compagnie est tout ce qu’il y a de plus sain. Et pour les seins, ce sera plus tard. Ça, H.B.L l’a bien compris. Auteur parmi d’autres de Sam Sufy, son nom est un mystère. Anagramme d’un « philosophe » célèbre et délétère, il prétend s’appeler Henri Brandon Lanusse, être né en 1992 et habiter Montfort-en-Chalosse. J’émets un doute mais passons. Voici sa thèse: « Nous méprisons la position correcte de défécation. Nous sommes dans l’erreur; nous devons réapprendre le bien-caguer ». Conformisme rectal, toilettes privatives à siphon à eau raccordé à un système d’assainissement, insalubrité du cloaque idéologique, latrines VIP, étron de mauvaise foi flottant dans la cuvette du réel; grosso modo tout ce que j’aurais rêvé qu’un mec évoque dans une soirée ratée pour me faire moins… chier. HBL fait surement parti de ces mecs qui, lorsqu’il a envie d’y aller, l’exprime haut et fort même entouré d’une foule compacte. Le plus jouissif étant certainement, à ce moment précis, de scruter alentours quelques coincés, aux visages… constipés.
C’est un peu comme la masturbation, thème abordé par Patrice Caumon, autre hurluberlu de la bande, dans Nouvel élog de la masturbation. Combien d’hommes mentent à propos de leur fréquence masturbatoire ? Un sacré paquet, probablement. Certains ignorent que les femmes aussi le font. L’auteur parvient à redonner à la masturbation son caractère noble. « Plus puissant des rêves éveillés », elle est source d’apaisement n’entravant ni la vie de couple ni la procréation ni les liens sacrés du mariage. Elle est même « la chance des impuissants, l’école des pubères et un paradis pour les difformes ». Tout le monde y trouve son compte.

Les buvards célestes

Tous ceux qui savent lire entre les lignes assimileront illico la pensée sous-jacente de Sam Sufy, plus limpide que l’éther: Fustiger notre société capitaliste. Et du reste, le trône des chiottes dans le Savoir Faire de HBL ne symbolise-t-il pas le trône du pouvoir? Ceux qui gouvernent sont les « bien pensants », « les Malcagans ». Une manière de s’élever au dessus des vaincus. « Ces Malcagans qui pètent plus haut que leur cul et font chier le monde entier ». HBL revendique lui la PCD (position correcte de défécation), celle d’antan, accroupie, sans latrines en  céramique. Une position qu’immortalisa Rembrandt dans un de ses plus fameux dessins.
Quant à la masturbation, même topo, ne pas se laisser ébranler par certaines idées conservatrices. « Comme une mère intrusive ou une police secrète, la pensée morale peut violer votre conscience et la diriger en la parasitant de ses propres angoisses, avec ses monstres et ses hyènes. » Conclusion: la masturbation est amour, mes frères, il faut jouir de la vie, sans retenue. « N’éprouvez de honte devant personne. Faites comme les oiseaux, chantez posé sur l’épouvantail ». Quant aux autres, ils peuvent aller se faire foutre.

Savoir Faire par HBL, illustré par Vincent Marco.
Nouvel Eloge de la Masturbation par Patrice Caumon.

http://samsufy.com/

En partenariat avec La Gaité Lyrique, papier à lire aussi ici

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