Cher Christophe. J’avais jusque-là décidé d’ignorer ta présence, un peu à la manière des Indiens qui vendent des roses en soirée et qu’on rembarre par habitude. Et puis cette semaine, par hasard je suis tombé sur un de tes « billets durs » consacré à Cyril Hanouna, énième victime pilonnée sous ta plume d’open space ; comme si on avait besoin de toi pour savoir de quelle couleur était la merde et s’il fallait prendre des pincettes pour l’envoyer au laboratoire.

Ce billet sur l’autre estropié cathodique, finalement pas plus médiocre que tous ceux que tu as torché sur un coin de table Ikéa et certainement pas moins populiste, aura au moins eu ce mérite de m’énerver suffisamment pour que moi aussi je perde vingt minutes à m’exciter les poignets sur une cible en carton.
Jusque là, encore, j’avais fait preuve d’indulgence. Je me disais comme beaucoup qu’entre tes diatribes people et un licenciement à l’amiable, t’avais certainement préféré ce placard à chiottes doré qui te permettait de profiter des maigres émoluments tombés du portefeuille de Matthieu Pigasse pour te défouler à l’œil ; après tout les métiers où l’on est payé pour écrire des conneries insipides se faisant rares, quelque part c’était touchant de t’imaginer dans ton petit fauteuil acheté chez Office Dépôt avec un poster de Daho dans le dos et toi en train de taper sur ton clavier sans fil à la façon d’un Kerouac égaré en Corrèze new wave. Ca rendait presque la situation romanesque et passé deux verres de vin blanc j’aurais presque vu en toi la réincarnation gauchiste de Michel Droit, voire d’Eric Naulleau – pour les plus jeunes – avec qui tu partages certainement le goût des lettres. Euh, d’insultes.

Parce que c’était la fin de l’été et comme la crise de la dette européenne n’était pas prête de se résoudre, je me suis finalement laissé aller à cliquer sur tout tes « billets durs » en attendant qu’un fourgon de la Brink’s percute l’immeuble en bas de chez moi et me rende riche comme ton patron. Bon, faut dire que le temps m’a paru long. Mais après vingt minutes à dépecer toutes tes victimes – de Christian Estrosi à La Fouine en passant par Goldman, ta danseuse pop doit avoir de sacrées courbatures – j’en suis arrivé à la conclusion que dans la France molle de François Hollande, tes billets durs ont surtout pris un coup de vieux. Non pas que je sois pas d’accord avec toi, note, mais plutôt parce qu’utiliser des mots si compliqués pour scalper des gens sans cervelle, ça m’a semblé relever d’une authentique malhonnêteté. Et je m’explique.

bookTes papiers, souvent bien écrits il faut bien le dire, m’ont fait penser à du Stéphane Guillon mais en beaucoup moins riche – on parle de déclaration fiscale bien entendu, bien obligé que tu es de compenser les effets du temps qui passe par un goût du verbe acide qui te permettrait, le temps d’une pirouette, de retrouver tes vingt ans grâce au 150 retweets de ton papier Kleenex.
Comme on se doute bien que défendre la veuve et l’orphelin c’est pas ton truc – et ça se comprend – et que sauver un gamin irakien en le fourguant dans ton sac de sport ça ferait désordre à la maison, le rôle du Robin des bois taille un peu petit sur toi. Passe encore que tu aies passé plus d’un quinquennat à t’exciter sur Sarko comme un chauffard repassant trois fois sur sa victime, mais à force ta rime riche colle un peu au palais et je me dis qu’à force de te repaitre de tous ces commentaires de lecteurs offusqués t’invitant à la démission, tu trouves enfin une raison d’exister. En fait tes « billets durs », c’est comme ce sorte de cycle infernal qui incite la pervenche à verbaliser ceux qui la traitent de salope. T’as peut-être aussi le goût du trottoir, va savoir.

Je vais te dire Chris – je peux t’appeler Chris ? – tes procédés sont dégueulasses. A force de taper toujours du même côté de la barrière sur des gens moins intelligents que toi ou simplement trop médiocres pour que tes flèches fassent vraiment mal, moi j’en conclus que tu souhaites te refaire une santé sur le dos de cibles ambulantes qui savent même pas compter jusqu’à trois. Tu trouves ça malin de t’attaquer à Zazie, à Claude Guéant ou Christine Boutin, t’as pas envie de trouver des cibles a ta taille ? A moins que ce soit déjà le cas ? Nan vraiment Cricri, au bout du compte, sans cette chair à canons qui te fournit tous les jours ton supplément de bile couleur un peu dégueulasse, ça ferait déjà longtemps qu’on t’aurait déjà oublié. D’ailleurs t’as oublié de glisser un billet sur ton ex-voisine de bureau Audrey Pulvar, sans parler des copains de ton boss, Pierre Bergé et Xavier Niel. Un simple oubli je présume. Crois pas que je sois de ceux qui pensent que tu tires uniquement sur les déclassés du système.

Bon en tout cas j’espère que tu te fais plaisir avec tes éditos à la Zola qui accusent souvent le coup. Moi j’en ai beaucoup pris en t’écrivant cette lettre. En léchant le timbre pour la deuxième fois, ça m’a fait penser à cette soirée où on avait parlé tous les deux à la sortie du Gibus – on faisait parti du jury d’un horrible « tremplin rock », tu te souviens ? Tu m’avais demandé pourquoi chez Gonzaï on s’en prenait autant aux Inrocks, et moi j’avais dû te répondre que c’était de bonne guerre que les jeunes tapent sur les vieux, que c’était dans l’ordre des choses. T’avais de la lamentation dans la voix, tu donnais l’impression de pas savoir quoi faire d’autre et ça m’avait touché ; j’avais pensé à mon père en priant fort pour pas finir comme vous deux. Lui partira bientôt en retraite, mais quant à toi, je sais pas trop. Avec l’espérance de vie qui n’en finit plus de reculer, je suis certain que tu seras encore là dans vingt ans.

En attendant je te dis pas au revoir car tu vas pas m’entendre, t’as sûrement les oreilles qui sifflent.

27 commentaires

  1. Christophe C. il devrait écrire sur ce qu’il aime, défendre Paddy McAloon par exemple, dans ce monde où BBiolay fait figure de Gil Evans pop (Ha!Ha!), être vraiment inrockuptible quoi! Pas défoncer de pauvres anim TV dont on se tape complètement. Mais il ne supporte pas qu’on lui dise ça.

  2. Ya plein de gens bien plus intéressants à défoncer pourtant : Pascale Clarke, Woodkid, Pulvar, Pigasse, Kechiche, Terrence Malick, Franz Ferdinand, Beigbeder, Valls, Biolay en effet…oh wait…

  3. Tant qu’on peut tapper sur Hanouna je ne me sens pas dérangé. J’ai quand même un de mes amis proches qui m’a dit que son émission était « vraiment pas mal »…

  4. Malgres ce style toujours aussi bon, permets moi de te dire cher Bester que c’est l’hopital qui suce des bites !!

    Taper sur des cibles faciles c’est ton domaine non ?!

  5. Le truc marrant serait quand même que ledit Conte réponde à ce billet d’humeur par un de ses billets durs. « Cher Bester Langs, BLABLABLABLABLABLA…[…] Je t’embrasse pas, etc ».

  6. Les billets durs au début c’était pas mal et puis ça a fini par lasser… Il est certain qu Audrey Pulvar aurait mérite le sien, si ça se trouve Conte l a écrit et fait rire ses copains de bureau avec…
    Mais si je trouve que ce « coup dur pour billets mous » est bien écrit et assez juste je me rappelle aussi que pendant longtemps les articles de Conte étaient une bonne raison de lire les inrocks. Field Music, XTC, Rollerskate Skinny etc, etc… Des sujets plus intéressants que Hanouna. Mais il y a bien longtemps que je ne lis plus les inrocks.

  7. Bien vu il a aussi eu de belles réponses concernant son billet sur Soan. Si le gars fait quelques envolées à la télé parce qu’il n’y passe pas souvent, c’est quand même un auteur compositeur interprète de talent ! Cyril Hanouna je n’aime pas donc je ne jugerai pas…

  8. j’suis tombé sur ce pavé condescendant par hasard, et y’a un truc qui choque, c’est quand un mec critique un autre mec en faisant exactement la même chose que lui

  9. Les billets mou,La diarrhée verbale de monsieur le comte des inrocks en pull jacquard bleu, à mettre dans le panier des ultras égocentriques de basterra et consort.C’est typiquement français d’avoir des bastringues pareil.Leur culture musicale est très surestimé

  10. Pfiouuuu
    C’est nul dis donc.
    Ca paie bien de se payer la tête de n’importe qui juste pour le fun ?
    Profitez-en parce que c’est en train de passer de mode.

    Je vous embrasse pas hein, avec toutes ces méchancetés gratuites, vous devez puer de la gueule grave.

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