Souvent relégués au fond de top 10 d’artistes à suivre parrainés par des marques de téléphone, ils luttent contre 60 ans d’histoire pour se faire une place dans le cœur d’auditeurs qui croient avoir tout entendu. Aujourd’hui, un groupe liégeois qui pousse le bouchon vers le Doom du Moyen-Orient. Om meets George Bush Jr.

Il y a toujours quelque chose de désagréable à écrire sur la musique instrumentale ; c’est un peu comme bruiter à la bouche un film muet, on tente tant bien que mal d’interpréter des formes dans des nuages ou de donner un nom à des cailloux ; c’est d’ailleurs tellement emmerdant d’intellectualiser cette musique généralement primaire qu’il est souvent difficile d’imaginer qu’on pourrait s’adresser à des lecteurs qui ne seraient pas munis de Hoodies noirs avec un corbeau mort dans le dos qu’on a presque envie de vous planter là, au milieu de ce paragraphe sans fin, pour que vous vous démerdiez tout seul pour trouver la chute de cette histoire qui n’en est pas une, puisque les tracklistings de Wyatt E. n’excèdent jamais plus de deux morceaux et que franchement, avec ça, démerde toi pour trouver un début de pitch qui donne envie à madame Toulemonde de bruler ses CD de Guns N’Roses pour filer chez le marchand de proximité du coin pour s’acheter une platine vinyle qu’elle ferait tourner pour invoquer l’esprit de Satan en écoutant « Exile to Beyn Neharot ».

D’ailleurs le Diable, sur ce deuxième album en presque 3 ans d’existence, il n’en est pas question. Wyatt E., composé de trois musiciens belges issus de The K, Leaf House et Deuil (RIP) ne fait pas vraiment dans le préliminaire (2 morceaux de 20 minutes chacun, soit environ deux mi-temps d’un match de handball) ni dans le cliché. A d’autres les batteries mal sonorisées et le chant beuglard qui font que le Doom est souvent réservé aux violeurs de poupées gonflables. Wyatt E., pour sa part, regarde vers Israël pour donner un nouveau souffle à un genre ghetto et son souffle à lui, c’est celui du désert ; c’est à peine si l’on ne s’attend pas à entendre le bruit d’un hélicoptère américain surgir de derrière un riff pour entamer un refrain militaire canardé dans la gencive des méchants de Daesh, bref, on s’égare (on est dans le désert), et cet objet signé chez Shalosh Cult, un label germano-israëlien (un peu de concentration, pas de blague), s’avère au moins deux fois plus intéressant que le premier essai « Mont Sinai/Aswan ».

Alors oui, forcément, comme les groupes de Doom médiéval à peine plus rapide qu’une course de fauteuils roulants ne courent (sic) pas les rues, difficile de ne pas tenter une comparaison avec Om et son « Advaitic Songs ». Ce qu’on sait, c’est que la treizième minute de Nebuchadnezzar II est purement jouissive pour son riff transporté à Islamabad, et qu’à 9’20 sur Ode to Ishtar on a presque l’impression d’être embarqué dans un épisode de Game of Thrones oriental où Stephen O’Malley aurait remplacé Jean Neige. Tout cela pour dire quoi, en fait ? Que « Exile to Beyn Neharot » est vivement recommandé par les médecins en cas de paranoïa compulsive, et qu’il s’agit certainement de la meilleure des drogues lentes en cas de dilatation de vos pupilles.

Certains prennent les fusils. D’autres, les guitares. Et pas sûr que ce Wyatt là soit américain.

Wyatt E. // Exile to Beyn Neharot // Shalosh Cult
https://wyattdoom.bandcamp.com/album/exile-to-beyn-neharot

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