Pas question de vendre ses miches pour distribuer quelques galettes de plus. En mixant l’électro de Justice avec la pop des années 80, Carpenter Brut remplit les salles de concert presque dans l’anonymat des médias. Et s’il a beau avoir le succès discret, le Français n’a pas fini de bastonner tes tympans, avec un tout récent album live. Interview brut de pomme.

Pour un artiste qui cache au maximum sa tronche, la popularité de Carpenter Brut a de quoi impressionner sur l’Interweb. Ses clips cumulent plusieurs millions de vues sur YouTube, comme le génial Turbo Killerbientôt adapté en film. Et ses vinyles s’arrachent comme des gros pains dans la face : les 1000 exemplaires de « Trilogy« , l’album qui compile ses trois premiers EP, se sont retrouvés sold out en moins de 40 minutes pour son troisième pressage.

Plus gros prédicateur de la scène synthwave, le Français compose depuis cinq ans un son à la croisée de la musique électronique, du metal et des thèmes 8-bit de jeux-vidéo. Un univers à la fois pop et bourrin, entre l’imagerie sataniste et les années 80, proche des producteurs Perturbator, GosT ou Dan Terminus.

Mais le succès grossit aussi en concert. D’abord jugé « trop électro pour la scène metal, trop metal pour la scène électro », Carpenter Brut a enchaîné ces deux dernières années une flopée de dates et de festivals (Dour, Download, ou encore SXSW). Après avoir fait pogoter les quatre coins de la France, le producteur a beaucoup tourné en Europe, au Royaume-Uni et même aux Etats-Unis début 2017.

Et quand tu lui demandes de commenter une affiche de son futur « Leather patrol tour » où aboient trois cerbères avec des lunettes noires sur la truffe, le mec te fait comprendre qu’il aime bien se marrer mais aussi distribuer des patates. Surtout après une série de questions à la con : « On devrait tous avoir un chien avec des lunettes de soleil, ça nous rappellerait régulièrement qu’il y a plus cool que nous et qu’on ferait mieux de redescendre sur terre. » En interview comme derrière ses synthés, mieux vaut pas trop se foutre de la gueule de Carpenter Brut.

Dans les médias, tu donnes rarement ton nom. Comment ça se passe sur scène, tu joues masqué ? Tu restes seul ou tu te ramènes avec un orchestre ?

Il n’y a qu’un guitariste, et un batteur. Ça aide à rendre la musique plus vivante, et mes pains aux claviers parachèvent le tout. On ne joue pas masqués, c’est même le seul endroit où les gens peuvent voir nos gueules. Si on avait des gueules de boys bands, on nous verrait peut-être un peu plus et on serait dans OK Podium, mais on n’en est pas là. On préfère la jouer mystérieuse, ça fait peur aux mamans.

Carpenter Brut, c’est du rock mais aussi de l’électro. Tu conseilles aux fans de Steve Aoki ou Calvin Harris de venir s’ambiancer dans tes concerts ? Plus sérieusement, à quoi ressemble ton public ?

Je conseille aux fans de Steve Aoki de continuer d’écouter Steve Aoki. Mais d’après ce que j’ai pu voir aux concerts, c’est assez varié. Du metalleux au geek, en passant par le fan de Justice par exemple… On n’est pas loin de faire mieux que Benetton, niveau mélange culturel.

Dans Maniac, génialement clipé à partir d’images live, il y a une demoiselle qui montre ses seins sur scène. C’est un hologramme, ou il y a VRAIMENT des filles boobs à l’air dans tes concerts ?

Il y a vraiment des filles qui montrent leurs seins en vrai sur scène. C’est ma plus grande fierté.

« On a rarement des gens qui croisent les bras en regardant le show, comme aux concerts HxC à Paris »

Tu projettes des clips en concert, qui mixent des extraits gores, des croix renversées et des scènes d’orgies. Qui s’occupe de dénicher ces satanés films ? Avec ton univers, tu cherches à trancher avec l’imagerie impersonnelle parfois associée à la synthwave (néons eighties, typos chromées et vieilles DeLorean) ?

C’est Silver Strain, qui avait réalisé le montage des clips d’Obituary et du Perv, qui s’occupe également des vidéos live. En ce qui concerne l’imagerie de la synthwave, je ne sais pas si on peut la traiter comme tu le fais, je sais juste que moi j’ai jamais vraiment eu l’impression d’en faire, du moins dans tous ses clichés, à la fois musicaux et visuels. J’ai juste utilisé des visuels qui me faisaient marrer, peu importe la catégorie dans laquelle ça me fait rentrer.

Si tu avais un fantasme ultime à réaliser en live, ça serait quoi : jouer dans une véritable église ? Accueillir l’Antéchrist en guest sur scène ?

Faire mon Fréquenstar avec Laurent Boyer.

Tu as pas mal tourné à l’étranger ces dernières années. Qui sont les fans les plus tarés ?

Les Russes sont plutôt pas mal dans le genre. Au contraire, les Allemands ou les Suisses sont plus calmes. Mais en général c’est un peu partout pareil, on a rarement des gens qui croisent les bras en regardant le show, comme aux concerts HxC à Paris par exemple, héhé.

Tu as déjà eu des emmerdes aux frontières ? Pour trouver des salles, les bookers sont plus faciles à convaincre aujourd’hui avec la fame ?

Les frontières c’est toujours un savoureux moment à passer. On a un putain de carnet ATA à faire signer hors Europe, qui certifie tout le matos qu’on trimballe avec nous. Et du coup on se retrouve souvent emmerdé avec ça, surtout en Russie. On commence à faire des dates intéressantes maintenant. Mais je me méfie beaucoup de cet engouement qui va forcément retomber aussi vite.

Fin juin, tu as lancé CARPENTERBRUTLIVE. C’est quoi l’ambition derrière cet album live ? Sinon, déjà prêt à retrouver des salopards spéculer sur Discogs, en vendant tes disques à 300 boules ?

Les gars pourront spéculer autant qu’ils veulent, j’invite toujours les gens à ne jamais acheter les albums à des prix débiles ou indécents. J’ai signé un deal de distribution avec Caroline International qui nous permet d’avoir toujours du stock. Par rapport au live, c’était une façon de garder un enregistrement de la première tournée qui s’achève fin aout, et de permettre aux gens qui ne nous ont pas vu live d’avoir une idée de ce que ça peut donner, et de trouver ça génial.

LIVE_CARPENTERBRUT

Tu joues bientôt en concert à l’Olympia, début 2018. Ça va, pas trop flippé de ne pas remplir la salle ? Pourquoi une salle aussi connue à Paname : pour le blé ou pour te faire repérer par un major et ENFIN devenir célèbre, être invité chez Hanouna et – qui sait – tomber dans la coke et les putes?

On ne s’est jamais vraiment tapé de bide, je ne sais pas par quel miracle. Mais ça peut arriver n’importe quand, personne n’est à l’abri. Il faut rester humble devant le bide. Si la salle n’est pas remplie, ça voudra dire qu’on ne fait pas plus à Paris et qu’on peut donc oublier tout le star business et le showbiz qui va avec. Ce qui serait un réel échec de carrière, tu en conviendras. Et puis si je voulais de la coke et des putes, j’aurais fait de la politique ou du journalisme [NDLR Le journaleux derrière cette question est en bonne santé. Après quelques semaines dans le coma, il peut à nouveau marcher sans problème et même manger des aliments solides].

Avec les tournées, tu as le temps de composer ? Pour ton prochain album, le son partirait sur quelque chose de plus pop, ou plus dark/doom/blackmetal ?

J’ai repris la compo entre les dates. Le prochain album sera plus pop, moins sombre, histoire de proposer autre chose et éviter ainsi de tomber dans la surenchère de la violence qui aurait pu rendre l’album parodique. Par contre l’album d’après sera à nouveau plus violent et evil parce qu’il faudra bien refaire un retour aux sources, celui réclamé par les fans.

Question con pour finir : qui est le meilleur en live, John Carpenter ou Carpenter Brut ?

John Carpenter Brut, évidemment.

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