Les génies se reconnaissent au fait qu'ils ont préempté vos rétines. Ainsi, les Beatles ont entièrement gobé le marché de la pomme verte. Indépassable dans votre tête. Reste à définir si le mot « Fenêtre » vous évoque Bill Gates ou Mike Brant ? Pour Eric Sintès, aucun doute n'est permis : dans chaque vitre se reflète l'éclat de Donny Hathaway.

Tordons le cou aux injustices. 9 fois sur 10, Donny c’est The Ghetto. Tube qui n’en est pas un tant personne ne pense à lui en premier. Hé oui, Elvis 68 lui rafle le prix sur le podium. Ensuite viennent les dizaines de bijoux qu’il a arrangé pour d’autres et qui ont servi de partoches copiées-collées pour pas mal de formations de blues rock. Disons le, Hathaway c’est une croisière sur une mer de tapissé de cuivres vrombissant mais jamais criards, de violons cabrés ou bondissants à la crinière merveilleusement lissée. Sa reprise de What’s going on est à Marvin Gaye ce que le polish est au chiffon, tandis que son Jealous Guy enfonce (1 an seulement après l’originale) l’anglitude de Lennon d’un coup de bassin hoochie coochie. Marrant finalement de constater qu’Hathaway est rangé dans les bacs « soul » alors qu’il a touché autant au funk (Come little children) qu’au smooth jazz, avec des pas de côté honky tonk… N’empêche que c’est comme ça. Aussi trompeur que cette casquette de nègre cireur de pompes, Donny sera toujours estampillé « crooner de soul » et jamais « pianiste électrique de génie ». Alors que ce qu’il reste de lui après chaque écoute, c’est la cadence de son Wurlitzer, virtuose discret, berger divin.

Extension of a Man

Vestiges. Trois albums et deux lives en tout se dressent comme une ruine dans le paysage discographique. Sorte de colonnade grecque, rappelant qu’un temps un temple voire un colosse se tint ici sans qu’on réussisse tout à fait à imaginer tout ce qu’il pouvait soutenir. Cinq pierres fermement enracinés pourtant et bien difficiles à déloger. La liste des emprunts et samples sans cesse grandissante ne fait qu’allonger l’ombre qui persiste bien après le départ du boy. Évidemment, il y a la néo soul horripilante d’Alicia Keys, Lauryn Hill et même Amy Winehouse. Mais toute une clique de rappeurs le chialent. Le Wu-Tang loin devant les autres va partiellement se reformer exprès pour lui payer le tribute en 2001. Avant ça, Big Daddy Kane, Nate Dogg, NTM (sous les bombes) ou les Beastie Boys dont il squatte la (Paul’s) boutique avec son Magnificent Sanctuary Band dès 1989 ! Si Elton John n’avait pas si mauvaise presse, ce serait une plus juste comparaison de carrière (la fin de l’un valant bien celle de l’autre…). Touchant. Surprenant. La tendresse et la profondeur. Cinq empreintes plus noires que le bitume, marquent en définitive ce qu’il convient d’appeler l’extension d’un homme.

DONNY 1 OKDONNY 2 OKDONNY 3 OKDONNY 4 OKDONNY 5  OKDONNY 6 OK!!!!!!!!!

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