Marre de bouffer des scoops rassis à la pause dej’ ? Ras le bol des états d’âme en 160 caractères par le premier clampin venu sur le clip de Bowie ou la perte de poids de Loana ? Si toi aussi tu est gavé comme une oie par les copiés-collés qui ont transformé le web en hypermarché de l’info consensuelle, Bilboquet Magazine est le site à prescrire d’urgence. Portés par une envie de désinformation salutaire, eux préconisent la détox par l’intox. Et ça fait un bien, complètement fou.

Think different. Si le slogan n’est pas de ces trois bordelais ayant voilà quelques mois décidé de prendre à contre-pied l’ensemble des médias d’actualité, on peut tout de même leur reconnaître une débilité géniale qui tutoie les sommets.
Conçu comme le plus classique des news médias ayant vocation à monopoliser votre temps de cerveau disponible, Bilboquet se démarque de la concurrence par un énorme foutage de gueule quotidien où, si les infos se suivent, aucune ne ressemble à ce qu’on lit péniblement ailleurs. Le principe de Bilboquet, que dis-je, la promesse éditoriale de ces zouaves lettrés ? « Perdre leur temps pour mieux occuper le votre ». Ah ça, trois clics suffisent à comprendre qu’ils ne sont pas foutus de notre gueule. Des exemples ? « Il tente de se suicider et tue son frère jumeau par erreur », « Le mannequin du pouce « J’aime » gagne son procès contre Facebook », « Un enfant perdu dans un magasin IKEA retrouve sa mère au bout de 10 ans », « Le chanteur Renaud devient « Ferrari » ou encore « Etienne Daho devient définitivement inaudible » ; chaque manchette est une jubilation, chaque information bidonnée un petit cadeau du quotidien qui, cerise sur le gâteau, s’avère être un écho subtil à l’actualité qu’on vomit tous, par boulimie.

« Dans le monde réellement inversé, le vrai est un moment du faux »

Comme au royaume des aveugles et des journalistes d’open space les borgnes sont souvent rois, ces drôles de types ont tout compris à la Société du spectacle de Guy Debord : trop d’infos tue l’info. Et au détour de chaque page, ces détournements qui ne prennent personne en otage s’avèrent mille fois plus jouissifs que ces traits d’esprits comme on en trouve aujourd’hui dix à la seconde sur Facebook. Comme le 2.0 sent le gaz et qu’en plus d’être accrocheuses toutes les news farfelues sont ici développées avec un sérieux parfaitement intraitable, il a bien fallu aller questionner les fondateurs de Bilboquet sur leur envie d’autre chose.

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Comment est née l’aventure du Bilboquet ?

L’aventure Bilboquet est née par césarienne quelque part entre le terrain de pétanque du quartier Quinzambougou de Bamako, le stade Chaban-Delmas de Bordeaux et le cinéma Nerwaya de Ouagadougou. L’envie de ne rien faire, mais de le faire bien, et une véritable complicité entre amis particulièrement doués en la matière ont fait le reste. Commencée à deux, l’aventure à rapidement pris une envergure sans pareille, puisque nous sommes désormais trois, avec une correspondante aux Etats-Unis. 

Bilboquet a, dans mon souvenir, existé en version papier. Est-ce une hallucination ? Où en êtes-vous ? [Complètement conne cette question, j’ai confondu avec un autre média belge portant le même nom]

Dans un univers parallèle, le Bilboquet Magazine a effectivement existé en version papier. Fondé en 1880 par Anselme Parnasse, il prend la relève du Bilboquet Libéré, le pamphlet anti-royaliste lancé par les Girondins en 1790. Ce n’est pas le cas en revanche dans l’univers tel que nous le connaissons, mais si vous souhaitez qu’il en soit ainsi, rien ne vous empêche d’imprimer l’intégralité du site sur du papier. Sauf peut être le manque de temps, le manque de papier ou bien une conscience citoyenne qui vous empêche de faire du mal à la planète.

La baseline (« Nous perdons notre temps pour mieux occuper le vôtre« ) dit tout de votre intention et on comprend bien qu’il s’agit là d’un énorme doigt à l’info telle qu’elle est subie aujourd’hui. Mais au delà de ça, quelle motivation vous habite pour publier tous les jours autant de conneries ?

Ces motivations sont au nombre de trois : le challenge, le dépassement de soi, la beauté du geste et un goût immodéré pour l’absurde et l’inutile.

Le Bilboquet, est-ce une activité à temps plein ?

C’est une très bonne question et nous vous remercions de nous l’avoir posée. Le Bilboquet, en tant que sport de haut niveau, est effectivement une activité à temps plein. Certains athlètes des pays de l’Est arrivent même à le pratiquer plus de 24h par jour.

Comment ça se passe, pour la rédaction de vos news ? S’agit-il d’un brainstorming à trois, d’une lecture de la presse quotidienne, de substances illicites qui vous permettent d’accoucher de news aussi débiles que cette incroyable découverte d’une nouvelle espèce de poisson pané ?

Richard Jean-Luc, le fils de l’inventeur du café sans caféine, arrive tous les jours au travail à 7h30 mais ça n’a pas de rapport particulier avec notre processus rédactionnel. Nous travaillons à partir de l’outil Internet et de logiciels de traitement de texte interactifs sur lesquels nous couchons chacun les idées folles auxquelles nous pensons en permanence dans notre douche, au bureau, ou tout simplement en train de piloter un avion. La Rédaction, bien que symboliquement basée à Bordeaux, est très mondialisée.

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A quel point avez-vous été inspiré par Le Gorafi et plus anciennement par le titre mythique Infos du monde ?

Lorsque nous avons créé le Bilboquet Magazine, notre manque flagrant de culture fait que nous n’avions aucune idée de l’existence du Gorafi et d’Infos du monde. Nous les respectons en tant que grand média institutionnels et nécessaires mais nous nous sentons davantage influencés par l’humour anglo-saxon (forcément, les Monty Python par exemple), et avec une approche de divertissement plutôt que d’information.  D’où le fait que le “magazine” The Onion ait bien entendu également été une source d’inspiration.

Sortir des infos fausses au quotidien alors que le premier trou du cul muni d’un clavier cherche à bluffer son entourage avec des news souvent traduites de sites étrangers, est-ce aussi un dégout de votre part pour ce qu’est en train de devenir le web ?

Comme l’a dit jadis un philosophe de la table ronde, “c’est pas faux”. Bien que nous soyons moins dégoûtés par le web que par ce que nous mangeons le midi à la cantine. Le Bilboquet Magazine n’est en tout cas pas dans une posture militante, nous essayons simplement de faire perdre leur temps aux gens autrement qu’en regardant des vidéos de Lol Cats.

A lire tous les jours : http://www.bilboquet-magazine.fr

5 commentaires

  1. Merci Gonzaï pour cette superbe découverte. C’est fin et super drôle. Certains humoristes français devraient en prendre de la graine.

  2. Le nom et la base line, ressemblent quand même étrangement à ceux d’un magazine d’art et littérature qui a démarré son aventure dans les années 90. Bil Bo K Magazine « de toute façon quelqu’un travaille pour vous ». Magazine qui fait d’ailleurs référence au projet de revue « Bilboquet », de Clément Pansaers.
    un article ici: http://www.boumbang.com/bil-bo-k-international/
    En effet il faut rendre à Cesar ce qui est à Cesar…

    1. Bonjour Gilles ! Si votre préoccupation est compréhensible, et nous a déjà été relayée, nous sommes d’accord qu’il faut rendre à César ce qui est à César. En feuilletant notre site, vous vous rendrez sans doute compte que notre plaisir est avant tout de développer tout un imaginaire absurde et qui essaye d’être drôle. Nous n’avons aucun intérêt, ni personnel, ni « professionnel » (évidemment nous sommes amateurs) à copier le nom d’une revue relativement intimiste que nous ne connaissions pas et dont le contenu est bien différent du nôtre. Nous n’allons pas ici nous justifier du choix de notre nom et de notre devise, mais il s’est fait entre deux amis qui aiment le jeu du bilboquet et faire perdre leur temps aux gens, vous pouvez d’ailleurs lire notre édito de création qui pose déjà les bases de cette idée (http://www.bilboquet-magazine.fr/naissance-de-bilboquet-magazine/). La devise était d’ailleurs à la base « le meilleur magazine pour perdre son temps », et a évolué logiquement en « nous perdons notre temps pour mieux occuper le vôtre ». N’hésitez pas à nous contacter si vous n’êtes toujours pas convaincus, nous tenons à ce que ce doute absurde soit dissipé.

  3. C’est drôle de voir un rapport là où il n’y en a pas : parce que ça ne fait quand même aucun doute que le Bil bo k et le Bilboquet Magazine n’ont strictement aucun rapport. Leur slogan non plus d’ailleurs, y’a pas un mot en commun alors de là à y voir du plagiat, faut s’accrocher 🙂

    Merci beaucoup de ce bel article, je me suis régalée à découvrir tout ça. Hâte de découvrir ce qu’ils feront ensuite parce qu’on devine que ce n’est qu’un début. Ca défrise à coup de génie, de quoi perdre une après-midi de boulot à tout éplucher sans se lasser.

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