Alors que je n’étais qu’un gamin, j’avais droit chaque année à un T-Shirt du FIB. Des fringues ramenées par mes frères pour me faire baver les longs jours d’été, j’ai pu en accumuler une douzaine jusqu’à mes dix-huit ans. . Du coup, à tout juste sept piges, lorsqu’un mioche me demandait la marque de mon T-shirt avec une tête de cosmonaute, je ne pouvais m’empêcher d’exprimer mes premiers gros mots à son égard, puis penser que ce nain n’était qu’un pauvre con qui ne comprendrait jamais rien. Au même âge, mes fantasmes les plus fous se déroulaient sur le sable fin des plages de Benicassim ou perdu, en plein Désert de Palmes, priant le soleil de me brûler en une seule fois. Après une première expérience renouvelée en tant que Fiber, mon rêve s’était enfin transformé: je voulais maintenant devenir journaliste et couvrir la marche.

Je pars la veille. Une fois la frontière passée dans un de ces bons vieux Talgo, le ton monte dans le train et quelques jeunes festivaliers décapsulent les premières bières tout en faisant siffler leurs narines dans les toilettes d’un wagon. Coup d’œil sur la programmation médiocre et vérification de mon accréditation. Les rails couinent, les vitres sont chaudes, le paysage est sec et les montagnes sont rouges.

C’est avec vingt copieux kilos de matos sur le dos que j’attaque mes premières foulées de l’année sur le pavé de Benicassim. Les cigales gueulent, les herbes craquent et au loin, CampFib – ou l’hôtel du Fiber par excellence- se laisse apercevoir non-loin du grand pont. Comme d’habitude depuis mon deuxième festival en ces terres, je peine à trouver un emplacement pour ma tente et me résigne à la planter en plein cagnard, telle une invitation à la mort. Après ce travail de forçat, la bière d’un litre reste une étape obligatoire de même que l’escale sous l’ombre de la tente commune. Au retour, la stupéfaction : j’ai monté ma piaule sur une fourmilière mutante, construite autour d’une flopée de merdes lagomorphes. On verra ça plus tard.

Vers 23h, alors que les balances pour demain se terminent à peine, je fonce causer à une bénévole de CampFib le cul vissé sur une chaise à l’entrée du camping. Son nom, je l’ai oublié. Je me rappelle qu’elle vient de Perpignan et que tout comme moi, ce sont ses sœurs qui lui ont transmis l’amour du FIB. Sa ville natale, elle l’a quitté il y a maintenant douze ans pour s’installer à Benicassim. Un choix radical auquel j’ai déjà songé afin d’éviter de douloureuses heures bloqué dans les services de la Renfe. Soit. Un peu canné pour parler, je pars me pieuter pour m’économiser. J’écris juste ces mots, bercé par des centaines de radios diffusant toutes une variété espagnole de mauvais goût. Pourtant, ici, ces sonorités ibérico-comerciales se laissent ouïr. Du moins un peu plus que les cigales flippées et désynchronisées à proximité de ma tente.

Jeudi matin, alors qu’un anglais dort sur ma tente…

… Je me réveille, puis entame le départ vers la ville à travers les champs de terre rouge que l’on imagine s’enflammer sous les cris des cigales damnées. Il est 9h30 au Logos, le bistrot mitoyen du Tropical Surf Bar au milieu de l’avenida Castellò Sant Tomas, artère principale du vieux Beni’. J’en suis à mon troisième café et m’apprête à partir en direction du théâtre municipal, derrière l’église, pour assister à la deuxième journée du FibCortos, le festival de court-métrage. Un voile « bleu Fib » recouvre la place de la Constituciòn pour offrir un peu d’ombre aux festivaliers que le soleil a déjà rendu fous. La sélection du jour est potable, avec notamment les films Parking et Turn me on, dead man, possédant respectivement une esthétique violette et psychotique, puis une ambiance 60’s recréée à la perfection. Suite à ça, arrive le moment le plus attendu de la journée : la commande d’un ramequin de patatas bravas épicées.

Dans un restaurant de la vielle ville, alors que je m’assieds dans un coin proche d’un distributeur de clopes, un homme âgé rentre, puis s’accoude au zinc. Il plante un climat surprenant et refroidit les Fibers multicolores et anglophones qui s’apprêtent à en griller une entre les quatre murs d’un lieu public. Le vieil homme a la peau cramée et quémande un café solo dans un castillan rauque et fatigué. Ce natif semble dépité d’accueillir une telle faune dans sa ciudad. Il voit se dessiner  l’ancien visage de la ville au début du XX° siècle, lorsque les familles bourgeoises construisaient d’immenses villas pour leur retraite. Aussi, les journées de pêche sur la Playa Torre San Vincente avant que des festivaliers ivres morts ne remplacent les poissons à la chair goûteuse. Alors, au lieu de préserver l’identité historique de la ville, municipalité et commerces s’adaptent à ce qui leur fait passer l’hiver sans se branler la rame : le Festival International de Benicassim. Un acquis devenu cercle vicieux quand on voit les « Fibers-menus » scandaleux placardés sur les murs le long des routes et donnant l’impression que la ville n’est que la zone commerciale de CampFib.

Putain il est 16h, c’est parti. En pénétrant l’enceinte du festival les frissons reviennent et malgré la programmation incluant certaines daubes comme Dizzie Rascal, je sais d’avance que chaque jour à vivre ici sera d’une puissance inédite.

Vautré par terre, je rencontre Gabriele, un photographe italien d’une rare coolitude avec qui je pars à la découverte de la zone VIP : un jardin luxueux jonché de transats immaculés contrastant avec une pelouse verte « Heineken » qui s’étend du salon central jusqu’à la piscine. Même si ce brin de douceur dans ce festival si éprouvant invite à se laisser fondre sous un brumisateur, le glas sonne et le marathon commence avec Puggy sur la Escenario Fiberfib et Chin Yi du côté du Eastpak FIB Club. Deux lives pas vraiment convaincants et mous du gland qui disparaîtront de ma mémoire à la fin de ce papier et laisseront place aux Paris Riots, ex-vainqueur du tremplin « Road to Benicassim » l’an dernier. (Show agréablement rock où une demi cannette de bière se retrouve étalée sur la gueule du chanteur roulant monstrueusement du cul, ndlr). Ca y est, toutes les scènes sont inaugurées, il ne manquait plus que la Escenario Verde qu’un malt plus ou moins frais s’est chargé de baptiser.

Suivent les chiures Cohete, une bière, le très old-glam Southern Arts Society, une bière, le modeste El Hijo, une bière, la moins minable que je ne le pensais Charlotte Gainsbourg, une bière, la pop énergique de Brendan Benson, une bière, les intéressants espagnols de Love of Lesbian, une bière, puis le sacre. Le mythe de la soirée : Ray Davies, le Kinks qui,  de passage,  se charge de rappeler qu’il n’était pas un songwriter foireux avant de se lancer dans une carrière solo. Les Gloria, Lola, et autres Sunny Afternoon sont de la partie avec certes, des orchestrations actuelles parfois trop péchues, mais des enchaînements d’accords qui cloueront, demain encore, des poignées de croupes sur le bitume.
À l’autre extrémité du site, la Pista Jack Daniels servira de « zone de transit » aux Fibers bourrés qui n’assumeraient pas le math-rock épileptique des Dirty-Projectors. Un band qui claque nettement mieux en live que sur compact. Kasabian et Broken Bells clôturent la Escenario Verde du jour et en relisant mes fiches, je contemple un vide spatio-temporel inexplicable: je quitte le site vers 5h d’après mon Note Book, mais 2h avant selon ma mémoire. Contactez Grabriele pour plus d’explications. Direction la fourmilière.

Vendredi matin, presque noyé dans une tente devenue piscine de transpiration…

… Je me réveille et t’écris ces lettres brûlantes avec mon encre qui fuse, emprisonnée dans la sudation coulant sur mon bloc. Aujourd’hui, ça sera Tropical Surf Bar avant la fraîcheur de la salle de projection pour le FibCortos. Gabriele, grand moustachu bouffeur de lives et continuellement armé de ses deux kalashnikov Nikon, s’octroie la même pause que moi. Je lui ai vanté les charmes du rendez-vous. Aujourd’hui, quatre pépites à l’écran : D’abord The archive, un doc sur Paul Mawhinney, le plus grand collectionneur de disque au monde qui, ironie du sort, paraît sain. S’en suit Sonar, clip expérimental dans la branche des nouveaux arts numériques, Beethoven grandes éxitos, la touche mignonne et mélancolique de ce festival parallèle, puis Vivir del aire, un autre doc qui romance l’histoire du siffleur de Sergio Leone. Je pense déjà aux quelques bornes à s’enfler le long des routes pour revenir à la Mecque. Les batteries de l’appareil ne tiendront pas la nuit, je les laisse en charge sur la zone wi-fib de la press area et use du droit d’ouverture de la piscine. Deux ricains beaufs se joignent à moi pour taper causette. Mon front plissé leur exigera une trêve. Pas le temps de bronzer, Cola Jet Set entame ma nuit avec un set totalement beach’n’roll juste avant Fionn Regan. Encore un folkeux qui soigne le pli de sa chemise à carreaux avant de chiader ses accords alors que dans le style, Alondra Bentley calmera tout le monde et invitera chaque Fiber à poser son litron pour siroter plutôt quelques mélopées d’une rare rondeur, et une voix comme on n’en entend plus depuis Joan Baez. Passés quelques shows tout sauf indispensables, Julian Casablancas monte sur les planches de la scène Heineken sapé d’un immonde survet’ en velours rouge. Beaucoup de reprises des Strokes, forcément. Beaucoup de merde aussi, forcément. Entre mes allers-retours dans les différents pits (zone de passage pour photographes et bodyguards entre la scène et le public), le passage au bar devient une escale nécessaire. Un trajet se rapprochant volontairement de la mini « casa-verde » où l’on dit que le houblon y est spécial… Pas le temps de couler sur une chaise longue qu’il faut remettre de la cellophane protectrice sur mon objectif et voguer vers Hot Chip. Très peu de souvenirs dans ma tête et une poignée sur carte SD. Seule une trace bancale vomie sur mon bloc mentionne l’aspect « très pro » du live. C’est surprenant.  Pourtant, impossible d’oublier le moment où j’ai pris ce cliché de Yacht & the Straight Gaze directement entre les jambes de la chanteuse ou encore le concert à paillettes de Goldfrapp. Un projet qui a littéralement sombré dans les strass les plus vulgaires de chez Sephora. Dommage. Quelques enjambées titubantes suffisent pour me porter jusqu’au pit de la Escenario Verde où Vampire Weekend (en mode chemises à fleurs et chapeaux de paille) pond un set allègrement tropical, collant parfaitement à l’ambiance moite de la soirée où croiser un perroquet transsexuel dans les loges ne m’aurait pas étonné plus que ça.

La consécration arrive enfin avec Peter Hook, la basse bien en main et bien sanglée. Quatre-vingt dix minutes principalement consacrées au mythique album Unknown Pleasure. Le son de Hook en fait jouir plus d’un latté aux orviétans et chaque note de basse métallique bande les subs des amplis monolithe. Après une telle baffe, Boys Noize et Dj Shadow iront se taper les couilles avec une pelle à neige. Vide comme mon verre, j’erre dans les allées du festival passant entre plusieurs fibers déchirés qui soit, pioncent par terre soit, s’accordent un break sur le toit d’une pissotière chimique.
Le retour au saint lieu de CampFib se déroule au petit matin avec, sur le pont traversant la voie ferrée, d’étranges espagnols agressifs vendant des pavés de viande avariée cuits à même le dos de leurs clébards (je recopie mes notes). Je m’immerge dans ma tente en retrouvant, à l’entrée, deux quilles de Ballantines séchées. Je compte là dessus, je pars boire de l’eau.

Samedi matin, alors que les deux bouteilles de Ballantines sont reliées à une main dormante…

… Je me réveille sur les coups de 9h après une nouvelle nuit d’environ trois ou quatre heures tout au plus. Une fois que l’humain basé devant ma tente s’en est allé, mon fear & loathing in Benicassim continue sur la route du centre-ville direction le Tropical Surf Bar. Sur le chemin interminable qui attribue à ma peau un bronzage merveilleux, je repense à Marta, une photo-journaliste croisée dans des pits à droite, à gauche. Quand je lui ai demandé d’où elle venait, cette gonzesse, blonde, pas très grande et aux yeux globuleux a réfléchi avant de me répondre qu’elle venait de Mars. « Je voudrais changer de cerveau, je voudrais changer de vie » m’a confié Marta en fin de soirée. Un bout de femme un peu flippé qui diffère d’un autre type, la cinquantaine, rencontré près de la piscine et qui s’enchaîne le FIB depuis la toute première édition. Un arraché tout terrain qui semble en connaître un rayon sur les festivals paumés dans des zones hostiles à la vie puisque ce bonhomme ne sort jamais sans sa casquette du Monegros.

Une fois mon café avalé, je profite du temps restant avant la nouvelle session du FibCortos à 13h pour aller piquer une tête sur la Playa San Vincente. Sur le chemin du retour, alors que mes cheveux sèchent collés à mes joues, je repense également à quel point j’ai été scandaleux avec certains gars de la sécurité, retrouvant une vingtaine de clichés où l’on me mire fatigué en leur compagnie. Ahuri par la chaleur, je ne ferai pas de transition entre ces songes éveillés et le moment où les lumières du théâtre se sont éteintes pour annoncer la dernière journée du festival de court-métrages. Aujourd’hui, deux films sont présentés : le gagnant de la sélection, Cheveu du Français Julien Hallard, puis le long métrage Splice de Vincenzo Natali diffusé en partenariat avec le festival du film de Sitges. Je ne sais pas si, en ce quatrième jour, je suis vraiment apte à chroniquer ces deux oeuvres ; ce pourquoi, dès que les lumières se rallument, je terre mon bloc au fond du sac pour éviter tout dérapage, me permettre de profiter pleinement du buffet de clôture.

L’heure tourne et ce soir sera la Saturday Night Fiber. Problème, il faut d’abord recharger ce foutu matos. Au passage si mon putain de red-chef voulais bien me payer un groupe électrogène portatif, j’aurais été tiré d’affaire plus d’une fois, nom de Dieu. Et ça repart. Je m’envoie tout ce qui bouge dès 18h. The Ruskins, Ryan Sheridan, Gentle Music Men, Aaron Wright and the Aprils, Ash… Pour certains, des lives énervés pas vraiment terribles, facilement rock et pauvrement novateurs. Je pense aux Cribs. Pour d’autres, un peu plus de spiritualité se fondant sacrément bien sous le feu des derniers rayons de soleils. Je pense à Cuchillo.
Jonston suit avec un set agréable, mais n’ayant probablement pas bouleversé l’ombre d’un Fiber. Stop bière et direction le pit de la Escenario Verde pour aller lever des bras devant The Specials. Show à l’américaine décevant, mais les bonnes gueules des anciens attirent ma sympathie. Blasé en humant les odeurs d’herbe se dégageant de la fosse, Terry Hall, pendu à son micro, se contente d’une modeste cigarette tirée en deux lattes. Il passe le reste du concert comme la plupart du temps, en tirant la gueule.

Sur le trajet à s’enfler jusqu’à la scène Fiberfib, quelques festivaliers me supplient de les prendre en photo, ce que je ne ferai pas toujours. Or, perdu dans un coin derrière un arbre, un jeune fiber qui n’a rien demandé semble littéralement déboité, ce qui attire mes lentilles. Au claquement du miroir, un rire explose dans mon oreille gauche : le mec de la Croix Rouge qui se baffre en pensant à la photo d’ivrogne que je viens de réaliser. La conception du secours en festival est vraiment extraordinaire… Direction Sunday Drivers, The Clientelle et Ian Brown, la fiante de la nuit. Débarqué dans le pit de la Verde à l’arrache avec un hot-dog aux oignons fris entre les dents, je tombe des nues face à la prestation de l’ex Stone Roses. Complètement détendu de la verge scéniquement et si flasque musicalement. Alors que certaines mélodies pourraient s’envelopper dans des ambiances violacées, aucune tension ou génie n’est décelable tant nos yeux sont figés sur l’index de Ian pénétrant la formation pouce-index de son autre main.

Too much, je me casse lécher la scène de Public Image Limited qui attaque avec This Is Not A Love Song. Une tuerie qui se mélange sans entracte aux autres titres de Pil et emmerde considérablement les responsables presse qui nous autorisent seulement 3 chansons pour faire nos shoots. On reste plus d’une demi-heure et Grabriele, au tempérament pourtant très calme, devient possédé par ce son catatonique de vieux sorciers. Ça chante derrière les barricades et nous, on danse avec la crainte de se prendre une dent branlante de Johnny Rotten dans le coin de la gueule.

P.I.L.

Fumé par le live, je pars en compagnie de l’italien à la rencontre d’un barman qui commence à me lâcher du malt à l’œil, le bon plan. Amorphes, on attend quatre dernières têtes avant de fuguer vers CampFib : Cut Copy, Four Tet, the Klaxons et Prodigy. Aucun ne saura retransmettre la fougue sentimentale qui m’avait retourné durant la « Pil » session. Keith Flint et sa bande resteront cantonnés dans du boom-boom de dernière zone et ces punkeuses de Prodigy tenteront de soigner leur image en interdisant l’entrée au pit pour 90% des journalistes. En draguant comme un bucheron la petite espagnole gérant l’accès à la scène, j’arrive à me retrouver sur les planches dans un coin de la Escenario Verde et parviens à claquer une dizaine de « photos interdites ». (Des tirages que je vends – contactez le bureau Gonzaï pour plus d’informations).  Black out.

Dimanche matin, alors que quatre putains de junks encerclent ma tente et ronflent comme des fils de bâtards…

C’en est trop. Je me suis foutu dans un sacré pétrin en plantant mes sardines ici, à moi de m’en sortir avec les armes du bord. Un brumisateur format 50 cL. Toutes mes affaires sont rassemblées. Je sors dégainant sans pitié et pointant la face de ces enfants de salauds ayant osé me balancer du Shakira à fond vers 8h de mat’ sur un mauvais ghetto-blaster. Par tous les saints, si ça moufte, ça va péter. J’ai pas de temps à offrir ce matin, je pars en mission, assister à la conférence de presse du FIB qui se déroule à l’hôtel Bonaire, un quatre étoiles basé sur Gimeno Tòmas, au sud de Benicassim.. John Vincent Power, le nouveau directeur anglais du Festival est de la partie. Forcément, nous l’emmerdons plus ou moins tous sur la programmation de saintes merdes telles que Rascal et compagnie, mais aussi à propos de l’aspect anglais du festival. J’ai oublié de noter les réponses, mais je me souviens d’un passage sur le succès du « Wi-fib » dans la press-area. Tu vois le genre de la maison.

A bout et repu après un repas de luxe offert au Unter Bonaire, je quitte les lieux en direction, une dernière fois, des portes du pénitencier. I Blame Coco et Standstill me laissent un souvenir périssable alors qu’Efterklang, puis Marcus Doo & the Secret Family développent des moments plus délectables et enivrants. The Courteeners, Parade, Ellie Goulding et Two Door Cinema Club passent comme amuse-gueules de la soirée avant l’essai que transforme Foals. No comment, c’est puissant à tel point que deux Fibeuses en chaleur n’ont pu s’empêcher de monter sur un arbre en plein milieu de la fosse pour faire pendre leurs mamelles. Une offrande accordée à Yannis Philippakis, gratteux psychotronique du band qui ressemble foutrement à Prince en cette douce nuit d’été éclairant des milliers de cerveaux carbonisés.

Il est minuit, l’heure du killing moon avec Echo & The Bunnymen qu’il fait du bien de recevoir en pleine feuille. Ils ont grandi et leur musique aussi. Des arrangements plus porteurs sont la surprise de ce live où les guitares sonnent comme des nappes de blues sur un Mississipi glacé et frappé d’aurore boréales.
Pas le temps de siffler une blonde coulante sur le chemin, le pit de Gorillaz est bondé d’un ester fécal résultant de la presse people espagnole avec ses journalistes à vomir cinq fois. Une poignée de concerts plus tard, la gorge commence à se nouer. Gabriele est canné, Marta s’est déjà barré et le vieux photographe des déserts semble satisfait. Pas une bagarre, pas un ivrogne de basse caste pour te pourrir un concert, des gens heureux et qui t’aiment, parfois trop. C’est autour d’une dernière bière que j’envisage de me barrer jusqu’à l’année prochaine. Je me suis enfilé 62 concerts sur 100 en quatre putains de jours, rêvant déjà d’un FIB à l’année quelque soit le degré de paillettes qui recouvriraient le faciès des artistes. Aujourd’hui, on ne va plus au FIB pour la qualité du cartel. On y va pour l’ambiance euphorique qui en découle, elle, a traversé les présidences, les générations et la pop à deux bucks.

Ce lundi matin, autour d’un dernier café, je repense à la France, aux connards de deux mètres de haut qui te poussent pour se foutre pile devant ta gueule pendant le concert de ta vie dont ils n’ont strictement rien à carrer.

Après une main en l’air finale pour saluer mon ami Gabriele de l’autre côté du quai de la gare, les sifflements du train qui couine au démarrage traversent mes tympans meurtris. Une telle aventure ne se conclue pas car j’y reviendrai. En tant que journaliste peut-être, mais comme Fiber avant tout.

Mathis Up Bloater // photos : Mathis Up Bloater.
http://fiberfib.com/

5 commentaires

  1. Passionné du FIB depuis de nombreuses années – malgré la prog devenue dégueu -, merci pour et pour l’article bien dégoulinant et pour les photos super.

  2. Je n’y suis allée qu’en 2010 mais j’en suis tombée amoureuse. Peu de festivals peuvent se vanter d’avoir une foule d’adepte aussi passionnée que les fibers. D’ailleurs tous les gens que j’ai croisé qui sont allés au Beni ont gardé leur bracelet (osuvenir souvenir)
    Je tente maintenant de convaincre tous mes amis de rejoindre la cause.

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