Un soir, on m’a raconté que faire de la musique, c’était comme fabriquer des sushis. Tout le monde essaie chez soi, mais peu se démarquent dans l’art de rouler du riz comme dans celui de coucher une ligne de basse. Certains sont plus rapides, d’autres plus talentueux, et seule une minorité maîtrise ces deux qualités avec assez de confiance en soi pour répéter le même geste et parfaire le résultat, quoiqu’on en dise.

Lorsqu’il s’agit d’appliquer une “recette”, d’optimiser la même technique, rares sont les groupes qui visent l’excellence. Automat en fait partie et « OstWest », sorti il y a quelques jours chez Bureau B, clôt une trilogie impeccable, plus géniale que dilettante. Depuis le premier album du groupe berlinois en 2014, c’est peu dire que les ingrédients sont restés les mêmes : rythme, économie, pulsation continue et ambiance oppressante. »OstWest », comme toutes les sorties du groupe, n’est pas une apparition, un disque sorti de nulle part dont on peinerait à expliquer la force. La vérité, c’est que les membres d’Automat cumulent à eux 3 presque un siècle d’expérience. C’est tout.

Achin, Jochen et Georg, vous l’aurez compris, n’ont rien du nouveau groupe venu présenter son album au monde comme s’il s’agissait d’une apparition céleste. Ils ont joué avec Einstürzende Neubauten ou Die Haut, puis ont invité sur leur premier album Genesis P-Orridge – avec qui ils viennent de donner un coup de fouet au Just Drifting de Psychic TV pour la sortie du film Desire Will Set You Free, Lydia Lunch ou Blixa Bargeld, leurs amis. Ca a le mérite de poser le décor, non ? En tout cas assez pour aller écouter ce disque, comme les autres Automat ou PlusMinus. Le groupe n’a jamais réussi à sortir un disque moins bien que les précédents, et si vous êtes un minimum sensible à tout ce qu’a pu toucher Adrian Sherwood, au dub, à la techno du label Basic Channel et puis tout ce qui se rapproche de près ou de loin à de la musique répétitive, bizarre et oppressante, Automat peut vite devenir votre came.

Le plus important, au-delà de la musique chez Automat, c’est l’impression qu’ils donnent de gérer leur affaire avec fermeté. Achtung ! J’ai à l’écoute de leur musique l’impression de voir avancer au-dessus de ma tête (attention, c’est le moment Sound and Vision de la chronique), un nuage radioactif passant du noir au violet en soufflant tout sur son passage. Et quel que soit le titre, quel que soit l’album, c’est une sensation qui a toujours la même force, le même impact.

C’est donc peu dire que ’ »OstWest » devrait cartonner. Pas au sens commercial du terme, encore moins dans le sens d’être à la mode. Mais dans l’idée que j’ai de ce disque, droit dans le mille avec autorité et conviction. Les râleurs pourront dire que c’est toujours la même chose, ce ne serait qu’une façon de cacher qu’il y a surtout beaucoup moins bien.

Automat // OstWest // Bureau B
http://www.bureau-b.com/automat.php

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