Tout avait commencé par une simple petite question : « Qui veut interviewer le bassiste de Blur? L'interview doit avoir lieu demain après-midi ». Qui? Pas grand monde apparemment, si j'en juge par les réactions polies des éminents confrères en conférence de rédaction.

Merde, les mecs…On cause quand même de Blur là, un groupe qui en un peu moins de 25 ans a révolutionné les codes de la pop. Du concret? Bien avant Liam Gallagher de feu Oasis, Damon Albarn chantait les mains dans le dos et la bedaine légèrement en avant, l’air poseur et sûr de lui. Et ça, c’est révolutionnaire. Il suffit de mater le clip du premier single du groupe, She’s so high, pour s’en assurer. Alors, convaincu?

Si tu n’étais pas là à une époque pas si lointaine où Damon se pensait plus malin que les Kinks et les Who réunis pendant que Liam Gallagher écrivait un tube par jour, un petit rappel s’impose. Une période finalement assez brève (Yves Coppens la situerait entre l’an 1994 et 1998 de notre ère, mais des prélèvements resteraient encore à l’étude), pendant laquelle la perfide albion déversait chaque semaine sur nos côtes encore flétries des excès de la semaine précédente de nouveaux groupes plus excitants les uns que les autres. C’était l’heure de la britpop. Au menu : de l’attitude, des grandes déclarations du type « le meilleur groupe de rock du monde, c’est nous. Et accessoirement, on encule tous les autres » et qu’on le veuille ou non, pas mal de très bons morceaux pop. A ce moment là, disons poliment que la pop et le rock ne faisaient qu’un. Les méchants rockeurs et les gentils poppeux fusionnaient peu à peu dans un puissant maelström avant tout synonyme de joyeux foutoir.

Au début des années 90, Blur était (avec Suède, Supergrass, Oasis et à moindre échelle The Auteurs de Luke Haines) une des figures de proue de cette britpop, mouvement dont il est de bon ton de se moquer aujourd’hui. Normal. Avec ses baggys et t-shirts difformes, ses coupes de cheveux dignes des Claudettes, ses morceaux grandiloquents souvent à la limite de la sortie de route (si les fans de Shed Seven ou de Gene se sentent visés, qu’ils se rassurent, ils ont raison) ou ses déclarations à l’emporte-pièce par des gamins tous plus prétentieux les uns que les autres, la britpop était borderline à mort. On peut évidemment se gausser de son côté faussement inoffensif, mais elle reste le dernier mouvement musical a avoir eu un tel impact sur une génération entière de teenagers.

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Blur étaient un des cinq doigts de la britpop, le majeur étant évidemment réservé aux grandes gueules d’Oasis. Blur, c’est quatre garçons dans le vent qui vont vendre des palettes de disques à la planète entière et qui portaient la Converse ravagée bien avant les Strokes. Des visionnaires alors? Hum…N »exagérons pas, même si Albarn montrera par la suite qu’il en avait bien plus sous le pied que les « small faces » d’Oasis. Pas visionnaire donc, mais un des seuls groupes qui saura s’échapper du carcan britpop pour devenir autre chose et créer un style immédiatement reconnaissable : le sien.

La britpop se situe alors à parfaite équidistance d’un underground que le grand méchant Internet n’a pas encore avalé d’un seul clic, et d’un mainstream pas encore accepté par les branchés (oui, ceux-là même qui se laisseront pousser vingt ans plus tard la barbe en portant le slim à mi-mollets, et qui me donnent chaque jour un peu plus foi en l’urgente réhabilitation de la chasse à cour). Aujourd’hui, le moindre groupe de Palavas-les-Flots est un control freak de première bourre niveau com’. Même s’il n’a pas encore joué la moindre note.

Mais revenons en 1994.

Pendant que les américains soufflent sur les cendres du grunge après la mort de Kurt « qui vous savez » Cobain, les british décident sans même s’en rendre compte de réinventer une certaine idée de la pop 70’s/80’s. Et si les disques ne seront pas tous, loin de là, au niveau de ceux de leurs illustres aînés, le casting reste alléchant.

Dans le rôle de David Bowie ou de Morrissey (Choisis ton camp, camarade), on trouve par exemple le jeune éphèbe Brett Anderson, leader androgyne de Suède qui trouvera rapidement le moyen de s’embrouiller avec son Johnny Marr de guitariste à lui, Bernard Butler. Son rapport avec Blur? La bassiste du groupe, Justine Frischmann, se barre, monte un groupe (Elastica, peut-être le meilleur groupe de ce mouvement) et se tape Damon Albarn. Alors qu’elle sortait avec Brett et vivait encore avec lui. De là à dire que les fortes vibrations d’une basse donnent méchamment envie de forniquer, il y a un monde. Monde dans lequel Alex James, le beau bassiste de Blur, devrait facilement nous faire entrer. Mais pour le britsex, on verra plus tard.

Au casting britpop, Damon joue le rôle du Paul Weller, et porte haut les couleurs nationales. Blur se dispute alors le leadership du mouvement avec les prolos mancuniens d’Oasis, et collectionne les disques d’or. C’est le moment que choisissent les deux groupes pour sortir le même jour leur titre le plus faiblard en single. Country House bat de quelques milliers d’exemplaires Roll with it d’Oasis. Et devient numéro 1. Radiohead n’a pas encore explosé, et Blur domine la pop mondiale.

Vingt ans plus tard, que reste-t-il? Une bande de « plus si potes que ça » qui, après une séparation de 5 ans au milieu des années 2000 et pas mal de concerts depuis 2009, a trouvé le moyen de délivrer ce lundi 27 avril 2015 « The Magic Whip », huitième album mondialement attendu et complètement inattendu. Etait-ce une bonne idée d’en parler avec Alex James, le Simon Gallup du groupe, bassiste de son état?

Quoi? Ils ont interviewé le bassiste? Oui, et si ça ne te plaît pas, c’est pareil. Alex est, toute proportion gardée, le Ron Wood du groupe puisqu’il est le dernier à l’avoir rejoint à 20 ans, en 1988. Dans deux ans, Blur sortira « Leisure », un premier album axé shoegaze qui se vendra correctement sans écraser les charts. Puis enchaînera rapidement avec un « Modern Life is rubbish » qui installera tranquillement le groupe sur la rampe de lancement britpop. Alex, de son côté, va surtout enchaîner les conquêtes d’un soir et les lignes (pas toujours) de basse.

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Alex JAMES
: Voulez-vous du jus de fraise? Il est fantastique. C’est un hôtel incroyable ici. Le genre d’endroit où tout ce que tu trouves est parfait.

GONZAÏ : C’est le genre d’endroit où je me vois assez facilement vivre.

J’ai essayé de vivre en France depuis mon enfance. Je me demande même si je ne suis pas dans Blur uniquement parce que j’aime la France, vous savez, car j’ai quitté Bournemouth pour Londres avant tout pour étudier le Français.

Oui, d’ailleurs je me disais qu’on pourrait peut-être faire cet interview en Français, non?

Euh… Je crois que ce sera probablement plus sophistiqué si je parle en Anglais, parce que mon Français est vraiment pourri maintenant.

Comment te sens-tu à quelques jours de la sortie de ce nouvel LP?

En fait, je suis assez soulagé. Tu sais, au 21ème siècle, c’est vraiment difficile de garder le truc secret depuis l’enregistrement jusqu’à la sortie du disque. Et en étant dedans, j’ai vraiment eu l’impression depuis quelques semaines que tout ça devenait de plus en plus important et que ça finirait par fuiter. Donc oui, je crois que je me sens avant tout soulagé. Et satisfait. Nous n’avions pas fait de disque de Blur avec la formation originale depuis plus de 16 ans… Je crois que le groupe, ce qu’il représente, était devenu trop gros pour nous. C’est un peu comme si tu arrêtais de faire des machines à laver chez toi et que tu laissais ton linge sale s’accumuler. A un moment, tu fermes la portes et tu pars en courant dans la cuisine. C’est un concours de circonstances qui nous a permis de nous retrouver avec cinq jours devant nous à Hong-Kong, sans avoir rien à faire de spécial. On est allés dans un studio, et voilà…

Bien avant cette escapade à Hong-Kong, Blur avait sorti en 1996 un « Live at the Budokan ». Et aujourd’hui la maison de disques fait écouter « The Magic Whip » aux journalistes sous le nom crypté de Mao Project. Vous avez un rapport particulier avec l’Asie ou c’est le fruit du hasard?

Tu sais, l’Asie est un continent aussi varié que l’Europe. Hong-Kong a autant à voir avec l’Indonésie que Lisbonne avec Düsseldorf. Mais je crois qu’on a toujours eu un rapport particulier avec le Japon. Ils sont complètement dingues de la culture pop « de l’ouest ». Le fait que ces 5 jours off arrivent en Asie a certainement eu une forte influence sur ce nouveau disque, c’est évident. On a récemment tourné dans des endroits où nous n’étions jamais allés auparavant. On a rencontré des kids qui étaient à peine nés au moment de « The Great Escape ». Tout s’est passé très simplement, c’était parfait. Si on avait réservé un gros studio des mois à l’avance, avec les problèmes d’agenda des uns et des autres, je crois que ça n’aurait pas marché. Là, c’était à nouveau frais. On n’a pas eu le temps de se mettre la pression avec le disque du come-back ou le gros hit qui doit aller avec. Ca aurait été trop flippant. Etre à Hong-Kong, partager du bon temps avec les autres, c’était très simple et ça a suffit. Dans le studio, c’était complètement inconscient. Jouons, et voyons ce qui se passe. Aucune pression.

Franchement, à chaque fois que j’entends le mot britpop, je me sens mourir un peu plus.

C’est quoi, ton morceau préféré sur ce disque?

MagicWhip190215Ca change un peu tout le temps…New World Towers peut-être.. Pendant l’enregistrement, et même après. Tu sais, en une semaine, on a enregistré 26 morceaux. C’était monstrueux, on avait plus de 40 heures d’enregistrement. Et puis, les mois ont passé et rien ne se produisait. 6 mois, puis encore 6 mois. A tel point que je ne me souvenais plus trop de ce qu’on avait enregistré là-bas. Et tout d’un coup je me suis souvenu que l’ingénieur du son avait placé une caméra dans le studio pendant l’enregistrement. J’ai récupéré le film, et j’ai transféré le tout sur mon ordinateur. Tout était là. Je pouvais l’entendre, même au travers du micro pourri d’une mini caméra. Les morceaux, les vibrations, les mélodies, tout était là. C’était un vendredi soir, alors je me suis servi un autre verre de vin.
Le lundi suivant, j’apprends que Graham rentre avec Stephen Street dans un studio pour écouter tout ça et voir s’il y avait de quoi faire un album là-dedans. Je m’apprête à lui téléphoner pour lui dire, « vas-y fonce », et puis non, je me dis « fuck, laisse le faire ». Deux semaines plus tard, Graham m’appelle et me dit qu’il y a quelques pains dans les lignes de basse et me demande de les rejouer. Je me suis donc pointé au studio. Là, il y avait Ben Hillier dans la pièce d’à côté. Ben, le mec qui avait produit « Think Tank », le dernier album du groupe. Il a été très surpris de me voir là, et m’a demandé ce que je venais y faire. Je lui ai répondu que je venais pour jouer de la basse sur le prochain disque de Graham! Parfois, tu dois mentir, même à tes amis. Aller dans ce studio, écouter cette musique, c’était franchement ébouriffant. Spécialement Ong Ong, l’avant-dernier morceau de l’album. On a enregistré ce titre en 15 minutes, de manière hyper simple, en fin de journée, un mardi où il faisait très très chaud. Après tous ces mois, j’en avais un souvenir très diffus. Et là, dans ce studio, je l’écoutais de manière très objective. Pour New Word Towers, c’est différent. Je trouve que ce morceau a une mélodie vocale vraiment incroyable. On a passé beaucoup de temps dessus, même si les parties de basse et de guitare étaient réalisées assez rapidement. Ce qui est assez étonnant, c’est qu’on a enregistré cet album aussi simplement que si c’était le premier.

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Tu sembles être quelqu’un de très occupé. Tu es producteur de fromages, tu écris des critiques culinaires pour le Sun. Blur te manquait quand même un peu ou c’était définitivement de l’histoire ancienne ?

Euh…Je n’attendais pas du tout qu’on se reforme. Mais quand c’est arrivé, je me suis dit « Fuck off, ce truc est brillant ». Le fait que nous ayons chacun depuis quelques années trouvé des choses à faire qui nous absorbent complètement est probablement une des raisons pour lesquelles on peut à nouveau être ensemble tous les quatre. C’est très bon pour notre créativité, on a tous bossé avec d’autres musiciens, fait de la musique différemment,…Mais pour moi, il y a vraiment quelque chose de spécial avec Blur, une alchimie qui est là depuis notre premier enregistrement, She’s so high.

A ce moment-là, vous vous appeliez encore Seymour, non?

Non, on avait déjà changé de nom pour Blur, mais on avait écrit She’s so high en tant que Seymour. Mais c’était déjà la même histoire : « Viens, on a besoin d’un joueur de basse ». Je me souviens qu’un jour, Graham est venu avec un enregistrement sur cassette de She’s so high. On l ‘a d’ailleurs mis dans la boxset qu’on avait sorti en 2012. Tu sais, on a joué ensemble pendant des semaines, des mois, des années. C’est très précieux. Je n’ai jamais éprouvé la même sensibilité musicale en jouant dans d’autres groupes. Et puis être capable de produire un disque en si peu de temps, en quelques jours, c’est assez incroyable. Si on avait essayé de faire un album dans des conditions normales, je crois que la montagne aurait été trop haute à escalader pour nous.

Qu’est ce que tu préfères : le fromage ou les drogues?

Est ce que je préfère les drogues dures ou le fromage doux?…Mon dieu.

Je te demande ça car tu profitais clairement des joies de la vie aux débuts du groupe, non?

Je crois que chacun aurait fait à peu près comme moi au même âge dans la même situation. Le fait d’être dans un groupe te procure à peu près tout ce dont tu peux rêver quand tu es jeune. C’est une opportunité de voyager, faire beaucoup de bruit, de se bourrer la gueule, et d’avoir des relations sexuelles avec quelqu’un de différent chaque soir. Pendant 15 ans, ça a été fantastique, mais ensuite, il fallait savoir se poser. Et se marier.

Quand mes 5 enfants chantent tous en même temps au fond de la voiture, c’est bien meilleur que Glastonbury.

Que penses-tu du 20ème anniversaire de la britpop? Ca sent un peu le moisi cette affaire, non?

Je suis allé récemment à la BBC pour faire un interview là-dessus. Quelqu’un me reconnaît dans les couloirs et me dit : que viens-tu faire ici? Je lui réponds que je viens pour les 10 ans de la britpop. Je ne m’étais pas rendu compte que ça faisait déjà 20 ans. La britpop? Peu importe ce que c’était… J’ai changé depuis et j’ai échangé les boissons alcoolisées contre des sodas.

A ton avis, quel LP sonne le mieux aujourd’hui…

Oh, je crois que…

Entre « The Great Escape » et « Definitely Maybe »?

(Rires) Je n’en ai écouté aucun des deux depuis très longtemps. Je crois que les deux sonnent encore très bien en fait. C’était une époque très spéciale niveau musique. Ce qui se passe aujourd’hui est très différent : les plus gros artistes, les plus grands groupes, ne cessent de grossir et de prendre toute la place. Lady Gaga, par exemple, tu as l’impression que c’est le truc le plus incroyable du monde. Tu n’as plus tellement de groupes indie aujourd’hui comme nous l’étions à nos débuts. J’ai aussi l’impression qu’il y a de moins en moins de groupes, mais de plus en plus d’artistes solo. Parce que c’est plus simple à travailler, à faire tourner, à maintenir en vie.

Tu écoutes quoi en ce moment?

The Avener. Un morceau incroyable, son Fade Out Lines. Il est français, non? C’est putain de cool, ce truc. Sinon, j’écoute ce que mes 5 enfants adorent écouter en voiture. Quand ils chantent tous en même temps au fond de la voiture, c’est bien meilleur que Glastonbury. Les enfants ne trichent pas avec la musique, ils ne sont pas pollués par les influences ou les références. Quand ils aiment, ils aiment. Et quand ils chantent tous en même temps, c’est peut-être la meilleure façon de décrire ce que tu peux ressentir quand tu es dans un groupe. Tu es comme ces enfants.

Un magazine français vient de titrer « Blur : le retour des survivants de la britpop ». Partages-tu ce constat?

C’est vrai que tous les groupes « britpop » sont un peu morts. Même nous à une période pas si lointaine. Mais tu sais, tu ne choisis pas vraiment la manière dont tu es décris, ou les raisons pour lesquelles tu es célèbre. Je suis quasiment certain qu’on a posé ces questions sur la britpop aussi souvent à Oasis qu’à Blur. Franchement, à chaque fois que j’entends le mot britpop, je me sens mourir un peu plus. J’ai l’impression d’avoir affaire à une marque de fringues, et je crois que j’en ai marre d’entendre cette expression.

Oublions donc le mot britpop.

En même temps, si ce terme peut rendre Blur plus facile à identifier dans le futur, alors c’est cool.

Chaque semaine, tu écris une critique culinaire pour The Sun. Est-ce que cela a modifié ta perception des chroniques musicales sur ton propre travail. Tu es plus tolérant vis-à-vis des avis négatifs?

J’ai toujours lu les chroniques sur nos disques. Mais n’oublie jamais ce que disait Andy Warhol quand il parlait des critiques : ne les lisez pas, écrivez-les. Il y a de la vérité là-dedans. Le plus important selon moi, c’est d’écrire ou de faire les choses pour de bonnes raisons. Et alors ce sera une réussite, au moins pour l’auteur de la chronique. Si c’est écrit pour de mauvaises raisons, alors…qu’ils aillent se faire foutre. Mais continuez quand même, ça ne me touche pas.

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Il y a peu de temps, je parlais de café avec Tim Burgess des Charlatans car il en fabrique désormais. De ton côté, tu es devenu depuis quelques années producteur de fromage, l’un d’entre eux porte même le nom d’un morceau de New Order. Bon sang, mais qu’est-il arrivé aux stars de la….britpop?

J’ai toujours adoré le fromage. Le public m’en donne souvent d’ailleurs, particulièrement en France. Sur scène, Tom Jones récupère des culottes. Moi, on me jette des emballages de fromage. Graham a droit à des poupées en plastique, et Damon encore autre chose. Je crois que c’est assez sain de travailler par passion, et un jour, devenir producteur de fromage m’est apparue comme la chose la plus sensée à faire puisque je vivais dans une ferme. J’ai étudié le fromage, et ce truc me fascine. J’en mange tous les jours, par exemple de l’emmental, ou du morbier pas plus tard qu’hier…

Depuis « Leisure », votre premier album sorti en 1991, l’industrie musicale a profondément changé. En bien?

Je crois que pour les groupes qui débutent, c’était mieux avant. Ce que j’aimais dans l’industrie musicale des 90’s, c’est que tu pouvais écrire un morceau dans ta chambre qui sonne super bien, et 6 mois plus tard, être célèbre dans le monde entier. Les maisons de disques investissaient pas mal d’argent sur de nombreux groupes, car elles ne savaient pas vraiment lesquels allaient marcher auprès du public. Elles ne savent toujours pas d’ailleurs, sauf que le fric a disparu. Le seul truc dont tu avais besoin à l’époque, c’était d’une bonne suite d’accords. La musique était au centre de tout. Aujourd’hui, pour cartonner, tu as l’impression qu’il faut avoir fait une école de commerce spécialisée en modèles économiques. Et la notion de célébrité a relégué la musique au second plan. Mais dans les 90’s, le changement était déjà là, car il y avait encore plus de diversité et d’argent dans les 80’s. Des groupes comme Duran Duran ou Spandau Ballet dépensaient des millions dans une seule vidéo, pendant que Half Man Half biscuit jouait dans des nightclubs. Une très grande diversité.
Celui [l’artiste, NDR] que j’écoute le plus en ce moment, c’est Leadbelly. J’adore ce mec, putain. Et pourtant, ce mec a passé une grande partie de sa vie en prison, un peu comme Dostoïevski. Sans être célèbre. Mais sa musique restera. Même si elle a été produite dans des conditions extrêmement mauvaises. Je crois encore au pouvoir de la musique. J’adorerais que plus de gens pratiquent un instrument, peu importe lequel. C’est ce que je dis à mes enfants quand ils me disent qu’ils veulent être dans un groupe. Faites d’abord de la musique pour le plaisir, le reste viendra.

Blur // The Magic Whip // Warner
http://www.blur.co.uk/

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